Cinq jours de grève sur cinq décrétés par l’Unamab. Une crise sociale qui prend des allures d’un dictat syndical qui ne dit pas son nom. Depuis la fin de l’année passée, les lois portant retrait du droit de grève aux magistrats, aux agents de la justice et de la santé, votées à l’Assemblée nationale, font débat. Pis, pour des lois qui ne sont même pas encore exécutoires, les grèves se multiplient et les populations doivent déjà en payer le prix fort.
Pourtant, jusqu’ici, il n’y a pas péril en la demeure. Les députés, représentants légitimes du peuple, n’ont fait que défendre l’intérêt général en votant des lois. D’ailleurs, le constituant béninois n’a pas donné prérogative à d’autres institutions de légiférer. Mais, avant promulgation et pour éviter que les différentes lois votées ne fassent entorse à la loi fondamentale, elles passent au scanner de la Cour constitutionnelle. Pour le moment, nous sommes à cette étape.
La balle est donc dans le camp des sept sages. C’est d’ailleurs pour ça que tout légaliste devra, en principe, apprendre à faire confiance aux institutions de la République. Sinon, autant, les décisions de justice reviennent aux magistrats, autant, en toute souveraineté, il est impérieux de laisser la Haute juridiction dire si oui ou non, les lois votées à l’Assemblée nationale sont anticonstitutionnelles ou liberticides.
Sinon, à vouloir être plus royaliste que le roi, forcément, il y en a qui, au nom du syndicalisme, posent des actes attentatoires à la démocratie et aux libertés fondamentales des citoyens. Déjà, nul ne doit, d’une manière ou d’une autre, faire pression sur les sept sages. Pis, banaliser cette supra institution. C’est notre fétiche. La fierté de notre démocratie. Jusqu’ici, elle n’a peut-être toujours pas fait l’unanimité, mais elle a, merveilleusement, régulé le fonctionnement des institutions de la République.
Alors, lois de retrait de droit de grève ou pas, la sagesse recommanderait d’attendre toujours ses décisions et de les respecter. Par le passé, elle nous a sortis de l’impasse. Demain, je ne doute pas qu’il en sera encore ainsi. Mais avant, il est temps de faire le débat autour des grèves et de la démocratie. Car, visiblement, avec la manière d’user du droit de grève, cette démocratie acquise de hautes luttes vire à l’anarchie. Alors, il dépend de tous de la préserver. Je ne suis pas contre le maintien du droit de grève. Toutefois, de loin, je lui préfère le droit des populations d’avoir de façon permanente, accès aux services publics essentiels.
D’abord, n’a-t-on pas toujours dit que l’objectif fondamental de la grève, c’est de défendre les intérêts professionnels ? Apparemment, certains syndicalistes perdent de vue cet axiome. Et, dès lors que pour assurer ce service, l’Exécutif prévoit une compensation conséquente, à moins que ça soit des convictions subjectives, je ne vois pas pourquoi, les lois votées ne seraient pas les bienvenues.
Autrement, à quoi bon avoir un statut particulier, être des fonctionnaires exceptionnels avec des avantages faramineux, si pour un oui ou un non, il faut aller en grève ? A mon avis, au nom de la démocratie, on s’amuse royalement avec le développement du Bénin et le bien-être des populations.
Et tant qu’il en serait ainsi, souffrez que je préfère aux sociétés occidentales dites démocratiques que nous copions et qui laisseraient des gens mourir pour faits de grève, les sociétés cubaine, chinoise, japonaise où la grève n’existe que de nom. Dans un miroir, syndicalistes, gouvernants, citoyens, nous devons tous nous regarder. Et ça m’étonnerait que pour un Bénin démocratique mais prospère, chacun ne soit pas mis devant ses responsabilités.
En somme, nul ne doit revendiquer qu’on lui accorde un droit à l’irresponsabilité. De même, il me parait plus judicieux, une démocratie où les pouvoirs publics reconnaissent les droits des travailleurs et eux, les droits des usagers. En attendant la Cour, il revient à chacun de se dire que ce qui est dangereux pour le pays l’est tout aussi pour lui. Enfin ! C’est ce que je crois. Et pour une démocratie productive, avançons !
Angelo DOSSOUMOU