Le visage du Bénin aujourd’hui en matière de démocratie, d’Etat de droit et des droits de l’Homme est désespéré. Notre pays est saccagé, banalisé et fragmenté. Le Bénin coule. Notre pays présente un visage amaigri, osseux, inquiet, déprimé et comateux. Le chef de l’Etat et son clan, de véritables Césars, sont venus voir un Bénin heureux, uni, libre, juste, solidaire, stable, paisible, sécurisé, épanoui, aimé, respecté et prospère. La démocratie était tranquille chez elle. Mais, en moins de deux ans, ils l'ont déchiré, dépucelé, fragilisé, dépouillé, démoli, divisé, humilié et pillé, arrogamment. D’où la fronde sociale dans tous les secteurs. La grève générale en cours sur l’ensemble du territoire national est très largement suivie. La preuve que les travailleurs en ont véritablement marre des réformes économiquement inefficaces et socialement affameuses du chef de l’Etat. Et il ne peut en être autrement vu que l’idéologie du régime fait craindre le pire pour le pays : la ruse et la rage avec un mode opératoire de : Surgir, Agir et Disparaître.
Je me réjouis de la décision de la Cour Constitutionnelle qui a déclaré contraire à la Constitution la disposition du statut général de la fonction publique portant retrait du droit de grève aux agents de la santé, de la justice et aux forces de sécurité publique. La décision stipule clairement que les députés de la majorité parlementaire n’ont pas le droit de retirer le droit de grève aux travailleurs ciblés. Le seul pouvoir dont ils disposent est de définir les conditions d'exercice du droit de grève.
C’est en premier lieu une victoire de la démocratie. Il s’agit d’une victoire du peuple travailleur sur une minorité arrogante, gloutonne, vorace, méchante, inhumaine, sauvage, complexée et dangereuse pour la démocratie et l’Etat de droit, une minorité déterminée à démolir notre Constitution. Des éperviers (GANKAN) à la tête de notre pays. Cette victoire ferme donc la porte à double tour aux manœuvres autocratiques du pouvoir de Talon visant à réprimer les libertés démocratiques chèrement acquises.
L’opposition béninoise, réunie au sein du Front pour le Sursaut Patriotique (FSP), prend acte avec satisfaction et soulagement cette décision et salue le courage des sages de la Cour Constitutionnelle. Nous espérons que cette décision sera respectée par le chef de l’Etat et son gouvernement. C’est un secret de polichinelle qu’ils violent allègrement les décisions de la haute juridiction (Les décisions relatives au Cos-Lepi et à l’ARCEP-BENIN ont été bafouées). A plusieurs reprises, le président Talon a violé son serment et mérite d’être sanctionné pour haute trahison.
Je salue la mobilisation générale et constante des travailleurs. La guerre n’est pas encore gagnée. Je crois qu’ils ont intérêt à poursuivre le combat, afin de trouver les solutions justes et durables à leurs revendications. Face à un gouvernement sourd et méprisant, qui utilise la force à la place du dialogue inclusif et sincère, les travailleurs doivent maintenir la pression.
Le chef de l’Etat rencontre les centrales et confédérations syndicales mardi prochain. A plusieurs reprises, il a montré qu’il n’est pas un homme de parole. Le chef de l’Etat va les endormir. Il va les mystifier. Je n’attends rien de cette rencontre improvisée pour séduire les responsables syndicaux après les avoir lynchés dans les médias et sur le terrain. J’invite les responsables syndicaux à la vigilance. Seule la lutte paie. Il faut maintenir le cap pour ramener le gouvernement sur le droit chemin.
Dans une démocratie normale, le débat sain, serein et constructif est nécessaire. L’opposition souhaite des débats contradictoires. Que le chef de l’Etat envoie ses ministres débattre avec des acteurs de l’opposition. Je lance un appel pressant dans ce sens. Qu’on nous envoie des ministres et collaborateurs directs du chef de l’Etat pour des débats contradictoires. Je suis prêt. Nous sommes disponibles.
En réalité, Adrien Houngbédji se trompe de cible et de combat. Dans son intervention le 16 janvier dernier, il s’adressait à Patrice Talon et à Pascal Koupaki, tous deux assis devant lui. Suivez mon regard. Il parlait de l’état du Bénin Révélé, le Bénin de Talon-Houngbédji-Koupaki.
Conflits d’intérêts et clientélisme au sommet de l’Etat, marchés de gré à gré érigés en mode de gouvernance, répression des libertés démocratiques, emprisonnement arbitraire des opposants sur la base de faux dossiers, vassalisation de la justice, du parlement, de la Haac et des autres institutions de la République, accaparement du patrimoine national, prise en otage de tous les secteurs vitaux de l’économie nationale, désarticulation de la fonction publique, déstabilisation des partis politiques, vote et mise en œuvre de lois scélérates et liberticides, pression fiscale, redressements fiscaux tous azimuts, audits ciblés à des fins de chantage politique, fuite des investisseurs sérieux, baisse des recettes à tous les niveaux, destruction du tissu social, accentuation de la pauvreté, de la misère et du chômage, suppression en désordre des emplois dans la fonction publique, liquidation sauvage et inhumaine des entreprises publiques, violation de la Constitution et des décisions de la Cour Constitutionnelle, dette publique doublée en 20 mois (de 2000 milliards laissés par Kérékou, Soglo et Yayi pour le compte de plusieurs décennies à 4000 milliards de F Cfa en moins de deux ans), protection des criminels économiques, isolement du Bénin sur la scène sous régionale, régionale et internationale… La liste est longue. Voilà l’état actuel du Bénin. D’où les Etats Généraux du Peuple réclamés par le Front pour le Sursaut Patriotique (FSP).
Je me demande si c’est notre constitution du 11 décembre 1990 qui est toujours en vigueur ou celle jetée à la poubelle le 4 avril 2017 ? Chacun doit de se poser cette question au regard de l’évolution de la situation. Nous sommes dans un Etat voyou, un Etat policier, un Etat de non droit. Le chef de l’Etat et son gouvernement ne respectent pas les décisions de la Cour Constitutionnelle. L’Assemblée nationale lui emboite le pas et bafoue l’autorité de la Cour. Les décisions de justice qui n’arrangent pas le gouvernement et son chef ne sont pas appliquées. Je me demande si c’est notre constitution du 11 décembre 1990 qui est toujours en vigueur ou celle jetée à la poubelle le 4 avril 2017 ? Chacun doit se poser cette question au regard de l’évolution de la situation.
Dans un tel environnement pollué, que doivent faire les citoyens ? Que recommande la Constitution en vigueur pour les Béninois? Il est temps d’appliquer au gouvernement l’article 19 alinéa2 de notre pierre angulaire : « Tout individu, tout agent de l'État est délié du devoir d'obéissance lorsque l'ordre reçu constitue une atteinte grave et manifeste au respect des droits de l'homme et des libertés publiques. »
L’emprisonnement de Laurent Mètongnon pour ses opinions, la radiation du capitaine Patrice Trèkpo pour ses opinions, l’arrêt de rigueur de l’ancien directeur de la Bef sous le prétexte qu’il n’a pas attrapé les pieds de Léhady Soglo, l’interdiction d’activités aux organisations d’étudiants, l’interdiction du sit-in des journalistes à la Haac suite à la fermeture de sept médias critiques, la suspension des sites d’informations indépendants, le piratage des médias qui ne font pas l’éloge du pouvoir, le vote de lois scélérates et liberticides pour réprimer les libertés démocratiques, espionner les citoyens… Voilà autant de faits qui portent atteinte aux libertés publiques. Si le gouvernement et le parlement ne respectent plus rien dans le pays, les citoyens doivent prendre leurs responsabilités.