La lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement sera bientôt plus visible et efficace au Bénin. Une nouvelle loi est en étude à cet effet au Parlement. Elle était au cœur d’un séminaire parlementaire, ce mercredi 24 janvier, à l’Assemblée nationale.
Le Bénin est en voie de renforcer son arsenal législatif en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Cette mesure découle des faiblesses notées jusqu’ici dans la mise en œuvre des textes en la matière et qui ne permettent plus une lutte efficace surtout face aux boucliers désormais mis au point par les réseaux mafieux et terroristes. Un nouveau projet de loi de caractère communautaire a été introduit au Parlement par le chef de l’Etat par décret n°2017-518 du 15 novembre 2017.
Il a fait l’objet d’un séminaire organisé, ce mercredi 24 janvier, à l’hémicycle, par le ministère de l’Economie et des Finances. L’atelier visait à permettre aux députés de s’imprégner du contenu et de l’opportunité de ce texte en vue de le voter en toute connaissance de cause. Il a été animé par des experts du domaine du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme dont Désiré Aïhou, avocat à la cour et conseiller technique juridique du ministre de l’Economie et des Finances ; Edouard Cyriaque Dossa, magistrat et directeur des services juridiques au niveau du niveau du ministère chargée de la Justice, et Mensah Houndji, spécialistes des secteurs financiers à la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest et secrétaire général sortant de la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif).
Il ressort des communications et des échanges que les effets mondiaux de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme ont pris une importance accrue ces dernières années et particulièrement depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis d’Amérique. Au-delà des menaces contre la vie humaine et l’intégrité des personnes, les activités des blanchisseurs de capitaux et des terroristes détruisent la stabilité et l’intégrité des systèmes financiers portant ainsi sérieusement atteinte au développement des Etats économiquement fragiles.
Au Bénin, il existe principalement deux textes de loi en la matière. Il y a la loi n°2006-14 du 31 octobre 2006 portant lutte contre le blanchiment des capitaux et la loi n°2012-21 du 27 août 2012 portant lutte contre le financement du terrorisme en République du Bénin. Cet arsenal juridique a été renforcé sur le plan institutionnel par la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif) créée par la loi n°2006-14 citée supra et formalisée par le décret n°006-752 du 31 décembre 2006.
Course contre la montre
L’arsenal législatif pour la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme présente plusieurs faiblesses, relèvent les communicateurs. Ce qui ne permet d’appréhender l’efficacité de cette lutte au Bénin depuis la mise en œuvre de la loi en 2006. Mieux, la justice n’a pu rendre la moindre décision sur cette matière surtout à cause des complexités des infractions mais aussi des limites des textes.
La loi en projet a pris en compte ces insuffisances. Elle comporte plusieurs innovations donnant plus de pouvoirs à la justice d’aller loin dans les enquêtes en matière de blanchiment de capitaux et de financement de terrorisme et de réprimer sévèrement les auteurs. Ce qui n’était pas possible avec les textes actuellement en vigueur. La nouvelle loi, par exemple, remet la liberté de poursuite du blanchisseur de capitaux ou de celui qui finance le terrorisme, dans les mains du procureur de la République sans attendre une quelconque preuve d’une infraction d’origine, ont précisé les communicateurs.
Et cela, pour montrer tout l’intérêt du Bénin à adopter ce projet de loi communautaire et à se mettre au même diapason que les sept autres pays de l’espace Uemoa qui ont déjà procédé à la mise en conformité. Les communicateurs ont invité les députés à aller très vite pour l’adoption de ce texte afin de permettre au Bénin d’être prêt pour l’évaluation mutuelle au niveau Uémoa pour jauger l’efficacité de la mise en œuvre de cette loi.
Les experts du Groupe intergouvernemental d’action contre le blanchiment en Afrique de l’Ouest (Giaba) sont attendus en février 2019 au Bénin pour réaliser cette évaluation mutuelle. Réagissant sur la question, le premier vice-président de l’Assemblée nationale, Eric Houndété, a suggéré à ses collègues députés l’organisation d’une session extraordinaire pour examiner et adopter le projet de loi. Ce qui permettra au Bénin d’avoir une bonne note lors de l’évaluation en février 2019 et de se rendre davantage plus crédible auprès des services financiers internationaux?