La jeunesse ne compte pas rester en marge de la construction de l’édifice du développement. A travers cette interview, Arsène Yaovi, Président de l’organe consultatif de la jeunesse, apprécie la gouvernance Talon et les chantiers ouverts à Abomey-Calavi. Ce jeune leader politique n’a pas manqué de dévoiler ses ambitions pour les législatives et communales prochaines.
Que comprendre de l’Organe consultatif de la jeunesse ?
L’organe consultatif de la jeunesse (Ocj) est, selon la loi qui l’a institué, l’instance faitière de toutes les associations, Ong, creusets de jeunesse. L’Ocj est donc l’interface entre la jeunesse, le Gouvernement et les Partenaires techniques et financiers. Quand il y a une question au plan national, départemental ou communal, l’institution qui représente la jeunesse, c’est l’Ocj. Et c’est contenu dans la loi n° 91- 007 du 25 février 1991. Il y a même un décret d’application qui accompagne cette loi, notamment le décret 91- 287 du 17 décembre 1991. Il est sous la tutelle du ministère de la jeunesse et des sports. Seulement qu’ici, le président de l’Ocj n’est pas nommé par le ministre. Il est élu par l’ensemble des associations de jeunesse réparties dans toutes les communes du Bénin. Il a été mis en application sous le Président Nicéphore Dieudonné Soglo le 17 décembre 1991. Sinon, l’Ocj était né d’un projet de loi du Président Mathieu Kérékou. Et ce projet de loi a été voté à l’Assemblée nationale le 25 février 1991. L’Ocj existe depuis plus de 25 ans. Sa mission est d’œuvrer à la promotion de la vie associative juvénile, à la participation des jeunes aux instances de prise de décisions, et à leur implication dans toutes les actions de développement.
Quelles sont les actions menées par l’Ocj ?
Le bureau exécutif national actuel, installé en juillet 2016, a défini 5 axes prioritaires que sont la santé et le bien-être des jeunes, l’emploi et l’employabilité des jeunes, l’environnement et la protection de la nature, le plaidoyer et la participation politique, puis le renforcement des capacités des jeunes et des institutions de jeunesse en République du Bénin. En fonction de tout ceci, il y a beaucoup d’activités qui ont été menées aussi bien par le bureau exécutif national que par ceux départementaux et communaux. Au niveau de l’Ocj Abomey-Calavi, nous avons organisé le forum de la jeunesse de la commune d’Abomey-Calavi. Il fallait faire l’état des lieux. Nous avons invité les responsables des mouvements de jeunes et autres institutions de jeunesse actifs dans la commune d’Abomey-Calavi pour discuter autour des questions de jeunesse. Au terme de ce forum, nous avons une liste des organisations de jeunesse dans la commune d’Abomey-Calavi. Nous avons plus de 100 organisations dans la commune d’Abomey-Calavi. Ce forum nous a permis de mieux connaître ces associations et de faire leur cartographie communale. Après cela, nous avons commencé à organiser des activités. Nous sommes allés dans deux collèges d’enseignement général par arrondissement et nous avons entretenu les élèves sur la santé sexuelle et reproductive. Ceci est en rapport avec l’axe N°1 de l’Ocj. Nous avons aussi organisé au Ceg Houèto deux séances pour apprécier le niveau des élèves de ce collège sur les violences faites aux femmes et aux filles. C’est pour soumettre un projet à des organismes internationaux qui sont très intéressés par des questions liées aux violences faites aux femmes et aux filles. Nous avons organisé durant 2016 et 2017 plusieurs journées de salubrité. Elles sont mensuelles chez nous à l’Ocj, ceci en rapport à un autre axe de l’Ocj au plan national. Toutes les fois, les jeunes ont répondu présents à nos appels. Nous avons participé à des ateliers, à des activités, aux sessions ordinaires et extraordinaires du conseil communal d’Abomey-Calavi, au nom de la jeunesse d’Abomey-Calavi. Nous avons organisé plusieurs activités sportives et culturelles. Nous avons aussi organisé des visites de prise de contact avec tous les Chefs d’arrondissements d’Abomey-Calavi. Actuellement, nous pouvons dire que l’Ocj entretient de très bon rapport avec le conseil communal et les chefs d’arrondissements. L’Ocj est en train de mieux organiser la jeunesse de la commune d’Abomey-Calavi pour sa participation au développement de la commune.
Comment accompagnez-vous la mise en œuvre du PAG dans la commune d’Abomey-Calavi ?
Nous constatons qu’une bonne partie du Pag est accordée à la commune d’Abomey-Calavi. Il y a le démarrage de l’aéroport de Glo-Djigbé, la délocalisation du marché de Gros de Tokpa à Adjagbo, la construction de la cité administrative. Nous nous sommes réjouis de cela. Ce que nous faisons n’est pas forcément un accompagnement au gouvernement. Il a des projets. Ce que nous voulons est que lorsque la mise en œuvre de ces projets démarre, nous puissions jouer notre rôle. Je veux parler du lancement de la route Cococodji-Hèvié, ouèdo- Togba - Calavi Kpota. Nous étions avec le maire et nous avons assisté au lancement des travaux. Nous avons demandé aux jeunes de sensibiliser leurs parents à libérer les emprises. Aujourd’hui, vous allez constater qu’i y a eu plus de peur que de mal. Certains ont pensé qu’il y aura eu plus de résistance, ça a été le contraire. Les gens ont libéré les emprises et cela facilite le travail. Il n’y a que ça que nous pouvons faire. Ce n’est pas parce que nous ne sommes pas impliqués comme cela se doit qu’il faut rester en marge de cela. Nous le soutenons parce que, dès que ces infrastructures seront érigées, Abomey-Calavi va changer de visage. Ce sont des projets qui arrangent tout le monde. Voilà pourquoi nous devons nous donner la main et soutenir la concrétisation du Pag et les actions de développement dans la commune.
Avez-vous également mené des actions à Glo dans le cadre du dédommagement des expropriés ?
Nous n’avons pas mené des actions de sensibilisation de façon directe. Mais nous avons des canaux d’échanges avec les autorités communales. Et nous leur avons fait des propositions pour qu’elles en parlent aux autorités départementales, même au ministre en charge des travaux publics. Ce n’est pas facile de dépenser des millions pour une parcelle et de se voir déposséder du jour au lendemain pour des raisons d’utilité publique. Donc, la proposition fondamentale que nous avons faite à l’endroit du maire, c’est de voir avec l’Exécutif dans quelle mesure le taux sera revu à la hausse. 37.500 Fcfa, c’est dérisoire.
A qui la faute, si les gens ont continué par acquérir des parcelles dans une zone déclarée d’utilité publique ?
La faute n’est pas aux acquéreurs. Il revenait aux autorités locales et communales de répondre devant les juridictions. Parce que quand on déclare une zone d’utilité publique, dès qu’on emmène la convention d’une parcelle vendue dans la zone, vous devez refuser de la signer, l’annuler et dire à l’acquéreur que cette zone n’est pas à vendre. Mais on a constaté que les Chefs de villages, chefs d’arrondissements et maires qui se sont succédé signaient et attribuaient des titres fonciers à certains acquéreurs. Ce sont les autorités locales qui doivent être punies. Ainsi, nous demandons au gouvernement d’être un peu souple avec les acquéreurs. Nous voulons d’un aéroport à Abomey-Calavi. Donc, le projet doit être réalisé dans la commune d’Abomey-Calavi. Pour ce faire, chacun doit faire des concessions. Je sais que les populations sont prêtes pour cela. Mais il faut que le Gouvernement revoie le taux un peu à la hausse. Voilà la doléance que l’Ocj Abomey-Calavi a faite au maire de la commune d’Abomey-Calavi.
Nous avons suivi la sortie des Fcbe à Parakou. Quelle appréciation en faites-vous ?
C’est une belle sortie. Il le fallait. Je voudrais remercier les organisateurs qui ont réussi la mobilisation. Il n’y a pas eu trop d’invectives. On ne demande pas mieux. L’Alliance est devenue aujourd’hui un parti politique. L’ancien président de la République est devenu Président d’honneur et ceci participe à la vitalité de la démocratie.
Nombreux sont ceux qui pensent que Patrice Talon fait beaucoup d’actions sans bruit. Quelle est votre appréciation de la Gouvernance actuelle ?
J’aime bien l’attitude du Président de la République. C’est un homme équilibré, qui bavarde très peu. Pour un pays comme le nôtre, Il faut travailler dans le silence et la discrétion. Le Béninois est adepte du populisme. A ce sujet, la posture du président me plait bien. Il communique très peu. C’est vrai qu’il faut communiquer pour informer le peuple de tout ce que l’on fait dans son intérêt. Mais au même moment, il ne faut pas être populiste. Et le président n’est pas populiste, et il fait ce qu’il pense être le mieux pour son peuple. Mais est-ce que le peuple est dans la même vision que lui ? C’est là le problème. Je suis de ceux qui ont perdu leur emploi depuis l’avènement de ce régime. Mais à quelque chose, malheur est bon. Car, c’est parce que j’ai perdu mon emploi que je réfléchis autrement pour voir comment me prendre en charge. C’est ce qui m’a permis d’être dans l’entrepreneuriat. Et je sais que j’y arriverai.
En dehors de ça, je trouve qu’il y a beaucoup d’autres actions louables telles que la libération des espaces publics, les cantines scolaires, les classes sportives. Les concours ont été organisés et il y a eu moins de contestations. Il y a eu des avancées, mais il faut qu’il y ait plus d’opportunités pour la jeunesse. Je suis pour la lutte contre la corruption, pourvu que cette lutte ne soit pas ciblée. Il faut mettre fin au détournement des deniers publics.
Est-ce à dire que le Chef de l’Etat est sur la bonne voie en moins de deux de gestion du pouvoir ?
En moins de deux ans de gestion, il y a eu des avancées. Il faut être honnête pour le reconnaitre. On ne peut pas dire que depuis que Talon est là, rien n’a bougé. Des décisions encourageantes ont été prises. Mais par rapport à la jeunesse, il reste encore beaucoup à faire. Je voudrais que le Président accorde une place de choix à la jeunesse dans ses différentes initiatives. Qu’il y ait plus de recrutements de jeunes. Qu’il y ait plus d’opportunités pour les jeunes entrepreneurs. Que les conditions de création d’entreprises soient allégées. Qu’il y ait moins d’impôts pour les jeunes.
Quelle est votre appréciation par rapport aux lois votées à l’Assemblée nationale ?
Il y a eu la loi sur les collaborateurs extérieurs. Pour cette loi, je ne suis pas totalement pour, mais les députés l’ont votée. Puisque la représentation nationale a voté, que peut un individu pour aller contre ? C’est la proposition de la majorité des députés. Il y a eu l’échec du projet de révision de la Constitution. L’Assemblée nationale a estimé qu’il était trop tôt pour que la Constitution soit révisée. J’étais plutôt pour la révision, mais qu’on trouve la formule pour que cette révision se fasse dans le consensus. J’espère que cette loi reviendra. En dehors de ça, il y a eu la loi sur la protection de l’enfant pour laquelle je suis totalement d’accord. Il y a eu beaucoup d’autres lois que la représentation nationale a votées. J’adhère entièrement à ces lois, pourvu qu’elles aident la jeunesse à avancer, à s’épanouir d’avantage. Qu’elles aident la jeunesse à s’auto-employer et à se rendre utile pour le développement du pays.
Votre appréciation sur la réforme du système partisan
Je suis d’accord pour la réforme du système partisan. Car, il est inconcevable que dans un petit pays comme le nôtre, on ait plus de 250 partis politiques. C’est inadmissible. Donc, la réforme du système partisan est la bienvenue. Et là, nous avons la mouvance et l’opposition, et tous les mouvements politiques vont se ranger, chacun selon son choix.
Arsène Yaovi a-t-il des ambitions politiques ?
J’ai des ambitions politiques. Je suis né dans la commune d’Abomey-Calavi. Je connais cette commune. Je suis allé partout. Je fais mon combat politique dans cette commune depuis 15 ans. J’ai participé aux côtés de certaines personnalités à plusieurs échéances électorales déjà. Aujourd’hui, nous pensons, au niveau de la jeunesse de la 6ème circonscription électorale que, parce que nous faisons 70% des électeurs de la 6ème circonscription électorale, nous avons notre mot à dire. Il urge donc qu’on se mette ensemble. Nous irons aux législatives de 2019. Dans la 6ème circonscription électorale, il y a 4 sièges. L’objectif, c’est de prendre au moins la moitié. A ce titre, je fais partie des jeunes qui font le travail, qui prennent des contacts pour fédérer les énergies, les ambitions au niveau de la 6ème circonscription électorale. Parce que c’est Abomey-Calavi qui est le poumon de la 6ème circonscription électorale. Sur 400 000 électeurs, 300 000 sont d’Abomey-Calavi. Il faut donc mettre tout cela ensemble et pouvoir travailler avec cette jeunesse. Donc, je serai candidat aux législatives de 2019. Je suis prêt à faire toutes les concessions possibles pour que nous ayons 2 sièges à l’Assemblée nationale. Les élections communales devraient se faire avant les législatives. Je peux vous dire que nous nous préparons également pour participer aux élections communales de 2020.
Avez-vous un mentor politique ou sur quelle liste serez-vous ?
Pour le moment, je ne puis vous dire sur quelle liste nous irons. Ce que nous faisons pour l’heure, c’est que nous travaillons pour nous mettre ensemble, d’abord pour faire accepter la démarche à d’autres jeunes qui nourrissent aussi des ambitions. Donc, on se met ensemble et on crée une grande alliance de jeunesse qui va porter les jeunes qui ont des ambitions politiques dans la circonscription électorale comme dans d’autres. Nous ne pouvons actuellement pas dire sur quelle liste nous irons aux législatives. Mais notre travail, c’est que nous voulons que les jeunes se mettent ensemble. Nous le faisons en toute discrétion, et je pense que les jeunes adhèrent massivement à l’initiative. Nous avons déjà fait le tour des 9 arrondissements d’Abomey-Calavi. Nous l’avons fait à Zè, nous l’avons fait à Sô-Ava. Et nous le ferons encore pour maintenir la veille au niveau de la jeunesse dans les arrondissements. Des impressions des jeunes et même de nos aînés, nos efforts augurent d’un lendemain meilleur. Nous sommes rassurés que l’objectif de 2 sièges au moins à l’Assemblée nationale soit atteint. Pour les communales, nous espérons au moins 10 conseillers sur les 18 dans l’arrondissement de Godomey en 2020. Aussi, nous allons tout faire pour que les jeunes soient positionnés un peu partout dans les autres arrondissements et qu’ils soient élus conseillers communaux.
Un appel à l’endroit du peuple et de son chef
Je voudrais demander au Président de la République de rester intransigeant par rapport à la lutte contre la corruption. Je lui demande de tout faire pour que la lutte contre la corruption ne soit pas une lutte ciblée. Que tous ceux qui sont auteurs de détournements, partisans ou non, répondent de leurs actes. C’est ça qui va prouver au peuple que le Président Patrice Talon est un homme de vérité, qui sait où il va et qui sait les moyens à mettre en œuvre pour atteindre ses objectifs. Je voudrais lui demander de penser plus à la jeunesse. Qu’il y ait plus de projets pour les jeunes.
Je voudrais demander à la population de prier pour le Président. L’ancien Président Boni Yayi l’a d’ailleurs recommandé la dernière fois à Parakou. Je leur demande de le faire, afin qu’il puisse avoir tous ses sens au point, qu’il continue dans ses réformes.
Cependant, il y a des choses que nous regrettons dans ce régime. Il faut qu’il essaye de revoir un peu sa politique sociale. Il faut que le Gouvernement communique davantage. Il y a des porte-parole du Gouvernement qui peuvent être tout le temps en contact avec les populations pour les informer et les sensibiliser.
Adrien TCHOMAKOU