Tout est fin prêt pour la mise en service du centre hospitalier Toviklin-Lalo-Dogbo. A travers cet entretien, le promoteur du centre Dr Albert Hounou, médecin généraliste à Burlats en France annonce les premières consultations sous forme foraine pour le 12 mars prochain. Il sera accompagné de 11 médecins français en plus d’une équipe sur place composée de plus de 60 infirmiers, sages-femmes, aides-soignants sans oublier la participation du professeur Rafiou Lawani, ophtalmologue internationalement reconnu. Le président de l’Amical sanitaire franco-béninoise aborde aussi les sujets relatifs à la demande de levée de l’immunité parlementaire des députés Idrissou Bako, Atao Hinnouho et Valentin Djènontin.
Où en êtes-vous avec votre projet Tolado ?
Comme prévu, Tolado (Toviklin, Lalo, Dogbo) a pris corps et lancera ses premières consultations sous forme foraine dès le 12 mars prochain à 9h00. Nous avons bénéficié d’un don de PHI (Pharmacie humanitaire internationale) de plus de 200 millions de matériels de très haute qualité, déjà sur place à Dogbo. En attendant que tout soit prêt, nous avons juste prévu d’envoyer une équipe de 11 personnes sur les plus de 60 infirmiers, aides-soignants, sages-femmes et médecins de toutes spécialités, pour faire un travail exploratoire et allumer en quelque sorte la flamme.
Quelles seront les spécialités qui seront prises en compte ?
Il y a essentiellement la médecine interne, l’ophtalmologie, l’urologie et la diabétologie. Nous avons tous ces médecins en France qui viendront. J’ai préféré choisir un ophtalmologue sur place, le professeur Rafiou Lawani reconnu internationalement pour sa compétence. En plus c’est un ami, un camarade de promotion de la santé navale de Bordeaux.
Pourquoi limiter la zone d’intervention du projet à votre circonscription (Toviklin, Lalo, Dogbo) ?
Nous sommes partout. Et même lors de ce séjour de mars nous donnerons une conférence sur le diabète et l’hypertension à Bopa à la demande de Monsieur Yaovi Barthelemy Gagnon. Il a même demandé la rédaction d’un livre sur ces questions de grande importance sanitaire, livre qui est prêt et disponible. Nous travaillons avec qui le souhaite, sans arrière pensée politique notamment.
Comment gérez-vous votre quotidien de père de 50 enfants à Orphelido ?
C’est une expérience inédite, très riche, humainement parlant. J’ai la chance d’être entouré par de très bonnes personnes qui facilitent la gestion d’Orphelido et donc la vie de ces enfants.
Etes-vous satisfait ?
Je suis très satisfait. Vous savez, quand une cinquantaine d’êtres humains vous appellent papa, cela vous donne un sentiment spécial, de la force, de la puissance mâtinée de candeur et de sérénité insondable. C’est l’alchimie pure du bonheur. Ceci déborde les frontières du rationnel et relève plutôt de la cogitation théologique.
Depuis 2006, nous avons sauvé plus de 150 enfants et aujourd’hui nous comptons de nombreux bacheliers, des instituteurs, des étudiants, des infirmiers, des maçons, des couturières, etc. Ce centre nous coûte environ 1 million F CFA par mois, totalement financé par des donateurs et bénévoles français.
Où en êtes-vous pour votre livre « Le syndrome du tapis rouge » ?
Je ne l’ai pas encore terminé faute de temps. Mais les grandes lignes sont là ! Il est surtout question de la genèse des dictatures. Comme le cas de la Roumanie où un cordonnier de rue est parvenu à devenir un féroce dictateur. Le livre relate aussi les cas de Pinochet au Chili, de Mussolini en Italie, Hitler en Allemagne et plus près de nous Mobutu, Amin Dada, Bokassa et le sinistre Macias Nguéma en Guinée Equatoriale.
Pourquoi écrire sur un tel sujet ?
Pour attirer l’attention sur le risque de la faiblesse des contre pouvoirs (opposition, Cour constitutionnelle, etc.). J’essaie aussi de souligner les dangers de vouloir copier les systèmes politiques qui ont fonctionné plus ou moins bien ailleurs. Joseph Staline en son temps avait dit que vouloir appliquer le communisme à la Pologne revenait à seller une vache…
J’admire Paul Kagamé, mais le système rwandais avec son ordre rigoureux et louable n’est pas du tout applicable au Bénin. Ceci tout simplement parce que ce pays sortait d’une guerre civile et d’un génocide, un terreau pour l’installation d’autocratie. Le Bénin, par contre, n’a jamais connu de guerre et les Béninois adorent le dialogue qui fait notre force. A vouloir mettre de l’ordre là où il n’y a pas de désordre, on finit par provoquer un chaos inutile.
Revenant à l’actualité politique, que pensez-vous du congrès récent des forces cauris à Parakou ?
Je crois que c’est une très bonne chose. J’ai vu la ferveur de la population qui témoigne d’une spontanéité évidente de la sortie des populations de Parakou. Je ne suis pas un militant des Forces cauris pour un Bénin émergeant (FCBE) mais je pense que c’est une bonne chose pour notre démocratie. Sans opposition viable et crédible, point de salut pour notre démocratie.
Vous aviez durement combattu le Président Boni Yavi
Le Président Boni Yayi et l’opposant Boni Yayi sont deux hommes différents du point de vue politique et psycho-comportemental. Combattre le premier hier et encenser voire adouber le deuxième aujourd’hui n’est pas paradoxal ou contradictoire. Ce n’est surtout pas un signe de versatilité dont est coutumière une grande partie de la classe politique béninoise.
Le soutenez-vous ?
Pas de soutien ou de subordination. Au CAP (Cercle d’Actions pour le progrès) que je préside, nous préférons les alliances sur la base du respect et de la considération mutuelle.
On vous prête des intentions politiques d’ordre national
L’ambition est un devoir pour un homme normal. Mais la question n’est pas là. Devons-nous accepter que les élections présidentielles de 2021 soient d’avance cadenassées ?
Il faudra un débat ouvert avec des sujets régaliens comme l’économie, le social et les affaires étrangères. Je veux participer à ce débat et faire entendre une petite musique, c’est tout.
Que pensez-vous de la demande de levée de l’immunité parlementaire des députés Bako, Atao et Djenontin ?
Ces demandes sont légitimes mais gagneraient en crédibilité si elles concernaient tous les députés impliqués dans les scandales. Vous savez qu’au Bénin, beaucoup de gens que vous décorez du nom « homme politique » sont sous les feux de la rampe alors que leur vraie place se trouve dans les prisons. Ce n’est pas normal. Par ailleurs le pouvoir protège ceux qui lui font allégeance. Ce n’est pas l’apanage du pouvoir actuel mais une marque de fabrique issue des mœurs de notre vie politique. Qu’il vous souvienne que Lionel Zinsou n’avait pas fait 10 jours de primature qu’il s’entourait publiquement des pires criminels économiques du pouvoir de Boni Yayi malgré les mises en garde. Tous ces criminels sont encore protégés de nos jours...Moi, j’ai des propositions à faire pour assainir tout ça.
Que pensez-vous des grèves au Bénin ?
Le droit de grève est imprescriptible dans une démocratie. C’est même la quintessence et la pierre angulaire de celle-ci. Je voudrais juste qu’on introduise un service minimum dans les hôpitaux et que ce droit ne soit pas réservé à l’armée républicaine
Ceci précisé, je crois que les revendications salariales sont justifiées. Les gens vivent très mal avec des salaires de misère et je suis pour ma part triste de constater qu’un médecin gagne deux à trois fois moins qu’un ministre ! Quel travail fait un ministre pour gagner plus qu’un médecin ? Et pourquoi dans plusieurs pays comme la France les ministres gagnent moins que les médecins ? Voyez-vous le travail que font nos enseignants ? Et ces instituteurs qui n’ont même pas de quoi nourrir leurs familles, leur refuser la revendication par la grève est inquiétant. On doit résoudre tous ces problèmes par le dialogue social.
Réalisation : Richard AKOTCHAYE