Saisie de deux requêtes, la Cour constitutionnelle se déclare incompétente pour connaître de la légalité de la suspension de Léhady Soglo à la tête de la mairie de Cotonou, suivie de sa révocation. Et pour cause !
La Cour constitutionnelle est incompétente pour juger de la légalité de la suspension de l’ancien maire de Cotonou, renseigne la décision n°18-039 du 20 février rendue par la haute juridiction.Elle a été saisie d’une requête en date du 7 août 2017 par le sieur Olivier Noël Koko qui sollicite le « contrôle de constitutionnalité de la suspension de monsieur LéhadySoglo par l’arrêté
n° 2014-002 du 07 avril 2014 pour violation du droit à la défense accordé à tout accusé ». Par une autre requête en date du 4 août 2017, l’ancien maire de Cotonou lui-même a formé un recours « contre le préfet du département du Littoral, le ministre de la Décentralisation et de la gouvernance locale et le Gouvernement de la République du Bénin ».
A l’analyse du dossier, les sages de la Cour concluent que « Le grief fait au préfet du département du Littoral par les requérants se rapporte à la mise en œuvre qu’il a faite de la procédure d’audition prévue et organisée par les articles 16 et suivants de la loi n°97-028 du 15 janvier 1999 portant organisation de l’administration territoriale en République du Bénin ». Aussi, le dossier révèle-t-il que, de fait, la requête formulée tend, en réalité, à faire apprécier par la Cour les conditions d’application par le préfet de cette loi ; et que la haute juridiction est ainsi invitée à procéder à un contrôle de légalité. La Cour souligne qu’elle est juge de la constitutionnalité et non de la légalité, et par conséquent, ne saurait en connaître.
Entre autres, les requérants estiment que la décision intervenue dans une certaine précipitation a « violé le principe des droits à la défense et du contradictoire pour faire suspendre et amener à révoquer un maire élu », malgré la demande de l’intéressé devant le préfet du Littoral.
Pour rappel, Léhady Soglo a été suspendu de ses fonctions de maire de Cotonou, par arrêté n°26/MDGL/DG/SGM/DGCL/SA/O11/SGG17 du ministre en charge de la Décentralisation en date du vendredi 28 juillet 2017, suite à son audition par le Conseil départemental de concentration et de coordination (Cdcc) du Littoral sous la direction du préfet Modeste Toboula. Cette décision du ministre de tutelle est sous-tendue par des « fautes lourdes » au nombre desquelles « la vente ou l’aliénation abusive de biens domaniaux, la violation des règles de déontologie administrative, l’augmentation des frais de représentation qui passent de 2 millions à 10 millions F Cfa pour l’année 2017 sans délibération spécifique du Conseil municipal ou de l’autorité de tutelle, l’engagement de dépenses en dehors de la procédure des marchés publics ». Distorsion de ressources financières, organisation de simulacre de consultations en matière de marché public, effacement des traces de documents administratifs et comptables par incinération sont également des griefs portés à l’encontre de l’ancien maire de Cotonou et mentionnés dans la décision signée du ministre Barnabé Dassigli. Mais au-delà de ces « faits graves » (selon l’arrêté ministériel), la suspension par le ministre de tutelle puis la révocation plus tard en Conseil des ministres de l’ancien maire de Cotonou sont intervenues dans un contexte de longue guéguerre politique entre lui et l’autorité centrale.
Sept mois après, le successeur de LéhadySoglo n’est toujours pas connu ; le gouvernail de la mairie est resté jusque-là dans les mains du premier adjoint au maire, Isidore Gnonlonfoun.