Dépassés certainement par le jusqu’au-boutisme de leurs pairs, certains syndicats de base ont pris leurs responsabilités. Des levées de motion de grève s’observent depuis lundi au niveau des enseignements maternel, primaire et même supérieur, contre la volonté des interlocuteurs du Gouvernement. Une situation qui affaiblit les centrales et les oppose à leurs syndiqués.
Au Bénin, les responsables syndicaux ne parlent plus le même langage. Ils sont divisés sur la crise qui mine le secteur de l’éducation depuis quelques mois. Alors que les secrétaires généraux des centrales syndicales entretiennent un bras de fer avec le Gouvernement, des syndicats de base se désolidarisent du mouvement et appellent leurs syndiqués à la reprise du travail. Tout a commencé lundi soir, avec l’Intersyndicale de la maternelle et du primaire qui a levé sa motion de grève, se basant sur les efforts faits par le Gouvernement. Des communiqués et contre-communiqués ont été diffusés. Mardi, ce fut le tour d’un des syndicats du supérieur qui a, lui aussi, retiré sa motion de grève, invitant ses camarades à reprendre les cours.
L’information est allée loin et dans certaines écoles, les élèves et écoliers répondent présents déjà. Les directeurs d’école essayent de les contenir en attendant le retour des enseignants. Sur les réseaux sociaux, c’est la guerre des communiqués. Les syndicats ayant retiré leur confiance aux centrales multiplient les appels à la reprise. Ceux qui sont dans le radicalisme dénoncent les patriotes. Ils font croire aux enseignants que ceux qui ont retiré leur motion de grève ont été corrompus.
Cette situation a mis en difficulté les responsables des centrales syndicales qui se sont lancés, depuis hier mercredi 21 mars 2018, dans une course de remobilisation de la base. Plus de repos, car ceux qui leur ont donné mandat pour agir en leur nom les lâchent en plein combat. Pour qui se battent-ils finalement, si à la base, l’appel à la reprise des chemins de classe continue d’être lancé ?
Des centrales et confédérations inefficaces ?
Un vrai problème se pose, au regard de la situation qui prévaut au sein des organisations syndicales. Les responsables des centrales, à part quelques-uns, sont, pour la plupart, de nouveaux élus. Ils ont été investis, il n’y a pas longtemps, et sont pratiquement à leur vraie épreuve de négociations. Au temps de Guillaume Atingbé, Gaston Azoua, Pascal Todjinou et même Paul Essè Iko, on se rappelle de comment les choses évoluaient. D’abord, ils démarrent leurs luttes avec de la méthode. Ensuite, ils prennent toutes les précautions et épuisent souvent toutes les voies de recours avant de lancer le mouvement de grève.
Parfois, ils vont jusqu’à organiser des tournées d’information avant de lancer les grèves. Certainement qu’ils avaient un bâton magique, mais ils avaient l’art de la négociation. Jamais ils n’étaient en déphasage avec la presse et l’opinion publique dans leurs luttes, comme c’est le cas depuis quelques semaines avec leurs successeurs. Et mieux, ils ne laissaient pas souffrir leurs syndiqués autant avant d’obtenir des satisfactions.
Qu’est-ce qui se passe aujourd’hui, avec ceux qui sont là en ce moment pour que des syndicats de base soient obligés de se désolidariser ? Un problème d’incompétence, d’inefficacité ou d’expérience ? Difficile de l’affirmer. Seulement, on remarque une difficulté à maîtriser la troupe depuis quelques jours, et à cette allure, la suite pourrait ne pas leur profiter.
Le Gouvernement peut maintenant radier
Sans doute, les syndicalistes offrent des moyens au Gouvernement pour sévir. Un syndicat a des syndiqués, connus et enregistrés au Ministère de l’intérieur. Les motions ne sont valables que lorsqu’elles sont signées des syndicats et d’autres organisations. Un enseignant dont le syndicat de base a rapporté la motion de grève est-il encore en droit de manquer les cours sans aucune sanction ? Une question dont la réponse devrait amener chaque enseignant à examiner sa position et voir s’il lui est possible de poursuivre ou non la grève. Le Gouvernement pourrait prétexter des motions de suspension pour faire sanctionner des enseignants grévistes en allant au-delà de la défalcation des salaires. Seulement, le Gouvernement, sans réfléchir et demeurant ferme, peut voir ce qui est possible de son côté pour que cesse cette crise qui n’arrange personne.