La crise qui secoue le Bénin oblige le président Nicéphore Soglo et l’ancien médiateur, Albert Tévoédjrè à sortir de leur silence pour appeler au dialogue. Ils exhortent le président de la République, Patrice Talon à prendre la mesure de la situation pour engager un dialogue franc et sincère avant qu’il ne soit trop tard.
« Un vieux assis voit plus loin qu’un jeune debout ». Comme l’indique ce proverbe burkinabè, les anciens perçoivent avec gravité la situation qui prévaut au Bénin. Nicéphore Dieudonné Soglo, ancien chef d’État béninois, (84ans) et Albert Tévoédjrè, ancien médiateur de la République du Bénin (89ans), sont très inquiets. « Vous comprendrez aisément ma préoccupation devant la situation économique, sociale et politique de notre pays », a déclaré avec consternation, le 24 mars dernier, Nicéphore Soglo. Plus pessimiste, Frère Melchior, resurgit pour constater avec amertume que « C’est désormais une évidence : Notre pays vit des jours sombres de très grave et périlleuse crise sociale malgré quelques arrangements partiels. Le pessimisme et le découragement se manifestent dans tout le pays. L’inquiétude grandit ». Ces constats faits par ces deux personnalités de notre pays ne les rassurent guère. Soucieux de la pérennisation de la paix, Nicéphore Soglo et Albert Tévoédjrè préconisent tous le dialogue. Dans un message qu’il a adressé au peuple béninois à l’occasion de la création du parti de Sébastien Ajavon, Nicéphore Soglo a indiqué qu’ « Il faut sans délai, un dialogue responsable de tous ces acteurs ». De son côté, Albert Tévoédjrè, dans un message qu’il adresse directement au Président de la République, a lancé un vibrant appel « je vous invite à vous situer dans le camp du dialogue et de l’espérance. L’heure est venue de l’écoute mutuelle attentive, du dialogue sincère, du consensus le plus large dans l’intérêt de tous ». Cette alerte des anciens s’adresse particulièrement au Président Patrice Talon qu’ils invitent d’ailleurs à donner un signal fort : « Ensemble, prions le Président de la République de prendre l’initiative courageuse et très attendue d’une concertation nationale inclusive et appropriée de vrai « salut public» prenant bien en compte les forces sociales en mouvement ! », a insisté l’ancien médiateur, tandis que l’ancien président de la république estime que « La jarre trouée du roi Guézo nous invite tous à nouveau à l’union et aussi au pardon ».
Voici en intégralité les Messages de deux Personnalités
Message du Président Nicéphore Soglo COTONOU, Le 24 MARS 2018
Monsieur le Président,
Honorables Invités et Distingués Participants,
Mesdames et Messieurs,
Chers Compatriotes,
Mes chers amis, je reviens du VIème sommet de Baku en Azerbaïdjan qui réunissait 25 chefs d’Etats et 25 Premiers Ministres, sans oublier les sommités des plus grandes universités et organisations financières internationales venues d’Asie, d’Europe, d’Afrique et d’Amérique du Sud.
J’ai présenté une communication sur la Renaissance de l’Afrique au Sud du Sahara. Le temps est enfin venu de mettre un terme à la balkanisation de l’Afrique noire qui date de 1885. Et de lui redonner sa souveraineté monétaire, militaire et maritime. Car, il ne faut pas se le cacher, le continent est encore un véritable baril de poudre. La poudre s’appelle démographie et le détonateur se nomme emploi. L’équation est simple : en 2050, l’Afrique au Sud du Sahara aura la population de la Chine, et les jeunes en âge de travailler y seront trois fois plus nombreux. Comment vont-ils se nourrir ? Se loger ? Quels seront et où seront les emplois ? Et surtout, comment vont-ils s’occuper ? Deux Africains sur trois ont moins de 25 ans. Les jeunes, pour le moment, sont attirés par l’Eldorado européen qui malheureusement est en piteux état, avec des attentats à répétition hélas. La Méditerranée est un tombeau et les pays du Nord du continent à une rare exception, traitent les Noirs comme au temps de la traite négrière. Le 14 novembre 2017, la chaine de télévision CNN nous a apporté la preuve de l’existence de l’esclavage en Libye.
Tout en condamnant sans équivoque l’effroyable génocide des Indiens, l’histoire des Etats-Unis d’Amérique, la première puissance du monde, nous offre des pistes de solution.
Vous comprendrez donc aisément ma préoccupation devant la situation économique, sociale et politique de notre pays.
Je me devais de me rendre au congrès de Monsieur Sébastien AJAVON, le Président du patronat béninois. Car, c’est au patronat, aidé par le gouvernement, de créer des emplois pour résorber le chômage. Or nous savons tous pourquoi leurs relations sont détestables. Et le troisième membre de ce triumvirat, le monde du travail, entretient un dialogue de sourd avec le gouvernement. La famine est de nos jours, hélas, la compagne de trop nombreuses familles dans notre pays sans oublier la maladie. Il faut sans délai, un dialogue responsable de tous ces acteurs sinon, notre pays court de graves dangers.
Il nous faut donc renouer avec la philosophie de la Conférence Nationale Souveraine basée sur la non-violence, le dialogue, le pardon et la réconciliation et surtout, avoir plus de compassion pour les pauvres, les déshérités. Aimé CESAIRE, ne disait-il pas qu’on juge un homme à son attitude à l’égard de la souffrance humaine ?
La jarre trouée du roi GUEZO nous invite tous à nouveau à l’union et aussi au pardon.
Je vous remercie.
COTONOU, LE 24 MARS 2018
Nicéphore Dieudonné SOGLO,
Ancien Président de la République du Bénin (1990-1996),
Ancien Maire de la ville de Cotonou,
Vice-Président du Forum des Anciens Chefs d’Etats et de Gouvernements d’Afrique créé en 2006 à Maputo, sous le haut patronage de Nelson MANDELA
Message de l’ancien médiateur Albert Tévoédjrè DE THÉOPHANIA, LA MAISON AFRICAINE DE LA PAIX
« L’opinion publique est une force politique qui n’est inscrite dans aucune constitution»(Alfred Sauvy)
Béninoises, Béninois!
C’est désormais une évidence : Notre pays vit des jours sombres de très grave et périlleuse crise sociale malgré quelques arrangements partiels. Le pessimisme et le découragement se manifestent dans tout le pays. L’inquiétude grandit …
Je me situe néanmoins résolument et je vous invite à vous situer dans le camp du dialogue et de l’espérance. L’heure est venue de l’écoute mutuelle attentive, du dialogue sincère, du consensus le plus large dans l’intérêt de tous. «Ne mettons pas un point final là où Dieu n’a mis qu’une virgule!»
Ensemble prions le Président de la République de prendre l’initiative courageuse et très attendue d’une concertation nationale inclusive et appropriée de vrai « salut public» prenant bien en compte les forces sociales en mouvement !
Dieu protège le Bénin !
Albert TEVOEDJRE (Frère Melchior)
«La paix par un autre chemin»