Le gouvernement avait décidé il y a quelques semaines de suspendre un contrat d’acquisition de compteurs à prépaiement au profit de la Société béninoise d’énergie électrique (Sbee). C’est un contrat mal négocié qui devrait faire saigner inutilement le contribuable béninois. Mais depuis, plus rien. Le peuple est moins informé.
Que se passe-t-il réellement dans le dossier « acquisition de compteurs à prépaiement au profit de la Sbee» ? C’est un dossier de plusieurs millions de F Cfa que certains cadres de la Sbee voulaient gérer en violation des dispositions du Code des marchés publics. A tout le moins, lors du Conseil des ministres du 28 février 2018, il a été révélé qu’à la suite d’un appel d’offres, la Sbee a signé avec la société Made Sarl en mai 2016 un contrat pour la fourniture de quinze mille (15000) compteurs monophasés monoblocs au prix unitaire de quarante-huit mille six cent soixante-quatre (48664) francs Cfa. Mais, au terme du délai contractuel Made Sarl bien qu’ayant perçu l’avance de démarrage, n’a pu livrer que 1500 compteurs qui, en raison des tests non concluants, n’ont pas été réceptionnés. Selon le gouvernement, la Sbee a dû consulter d’autres fournisseurs pour acquérir des compteurs de même marque et spécifications. L’un des fournisseurs, notamment la société Sge, disposait d’un stock de 14 500 compteurs cessibles au prix de 29 999 F Cfa l’unité. Mais entre temps, la société Made Sarl a saisi la Sbee d’une offre faisant valoir qu’elle éviterait à celle-ci de devoir débourser une nouvelle avance à un autre fournisseur. La même société promettait de livrer dans un délai raisonnable, des compteurs plus performants. En dépit de l’offre faite par la société Sge, Made Sarl déjà défaillante dans l’exécution du premier marché que la Sbee s’est vu confier la fourniture de ces compteurs au prix de 48 664 F Cfa l’unité sur la base d’un avenant du contrat du 26 mai 2016. Le même prix que celui des compteurs qu’elle n’avait pas livrés entièrement lors du premier contrat et pour lesquels elle avait fait l’objet d’une mise en demeure par son partenaire. En exécution de cet avenant, a informé le gouvernement, la société a fourni 5000 compteurs aux spécifications techniques non conformes à celles qui sont attendues. L’exécution de cet avenant aux conditions financières ainsi prévues, ferait subir à la Sbee un manque à gagner estimé à 242 645 000 F Cfa. Face à ces chiffres, le Conseil des ministres avait demandé au ministre de l’Energie de surseoir à l’exécution du contrat, de saisir l’Autorité de régulation des marchés publics (Armp) pour en apprécier la régularité. Plus de 40 jours plus tard, on a comme l’impression que rien ne bouge. Le Conseil des ministres n’a plus jamais communiqué par rapport au dossier. Tout porte à croire que l’Armp n’a pas encore été saisie de ce dossier dans lequel la Sbee risque de subir un manque à gagner évalué à plus de 200 millions F Cfa. Beaucoup pensent que l’Exécutif a fait simplement une annonce médiatique et feint de lutter contre la corruption. En réalité, les Béninois veulent savoir toute la vérité dans cette affaire. Il faudra publier bien des noms et les décisions prises pour sanctionner les irrégularités notées. Ce sont les seules actions qui donneront de crédit au communiqué du conseil des ministres du 28 février 2018. Autrement, le gouvernement aurait apporté de l’eau au moulin de ceux qui pensent que la lutte contre la mal gouvernance est sélective sous le régime de la Rupture.
Mike MAHOUNA