C’est un ouf de soulagement pour les étudiants. Ceux inscrits à l’Université de Parakou et qui sont en instance de soutenance viennent de voir une partie de leurs peines allégée. Il y a encore quelques jours, ils étaient obligés de respecter une coutume. Offrir des présents aux maîtres de mémoire et aux membres du jury est encore à bien d’endroits une règle stricte à laquelle personne ne peut déroger. Systématiquement, les étudiants en fin de cycle étaient amenés à débourser pour contenter leurs enseignants chargés de procéder à l’évaluation finale de leur grade académique. Qu’il s’agisse du Brevet de technicien supérieur, de la licence, du master et même de la thèse, il fallait faire un effort financier conséquent pour obtenir le quitus des seigneurs de l’Université. Sensible à la galère subie par la communauté estudiantine depuis des lustres, le rectorat de l’Université de Parakou (Unipar) a enfin sifflé la fin de la récréation.
Par une note de service en date du 16 avril 2018, le Professeur Prosper Gandaho, recteur de l’Université de Parakou interdit désormais « aux impétrants d’offrir des cadeaux et autres colifichets aux membres de jury lors des soutenances de mémoire de Master ou de thèse de doctorat ». Sans appel, la sentence est tombée. Sans état d’âme, elle devra s’appliquer dans toutes les entités de ce haut lieu du savoir. Subtilement, le recteur rappelle à l’ordre ses collègues enseignants qui éprouvent du plaisir à vider les poches de leurs étudiants parvenus au seuil de la soutenance. A cette étape clé des études universitaires, ils sont la cible de tous les chantages, de toutes les menaces et de toutes les intimidations. Désireux d’obtenir leur diplôme, la plupart des étudiants cèdent à ces exigences édictées de manière fantaisiste par la seule volonté de certains enseignants cupides, qui font des misères à leurs apprenants dans l’optique de leur soutirer des sous et/ou des présents.
Avant l’ultime évaluation que constitue la soutenance, les étudiants souffrent le martyre avec leurs maitres de mémoire qui ne reculent devant rien pour s’en mettre plein les poches. Certains vont pousser l’indignité jusqu’à réclamer des enveloppes financières conséquentes à leurs étudiants qui sollicitent leur encadrement pour la rédaction des mémoires avant d’accéder à leur requête. D’autres encore exigent du vin et des spiritueux d’une certaine valeur en guise de primes de motivation. Cette vilaine tradition a cours dans plusieurs entités universitaires publiques et privées. Maillons faibles de la chaîne, les étudiants souffrent le martyre et rongent leur frein en silence. Mais, les responsables des universités, conscients de la situation, ont toujours laissé faire. Cette fois-ci, l’interdiction formelle vient de Parakou. Et les étudiants peuvent et doivent dorénavant brandir cette note de service salvatrice pour se mettre à l’abri des intentions malsaines de leurs enseignants.
A l’Université de Parakou tout au moins, l’assainissement des mœurs universitaires est enclenché. Les enseignants qui ne jurent que par l’argent vont devoir mettre un peu d’eau dans leur vin. L’application de la note de service qui décharge les étudiants de l’obligation de faire des dons à leurs enseignants dépendra non seulement du rectorat mais aussi des étudiants eux-mêmes. Ce serait heureux, si dans un mouvement d’ensemble, les autres universités, publiques comme privées, décident de s’engager dans ce sillage. Le mal qu’a voulu corriger le recteur de l’Unipar sévit aussi dans les autres entités universitaires. Cette réalité n’honore pas la communauté universitaire qui, parce qu’elle est élitiste et scientifique, est appelée à faire preuve de vertu dans ses actes. La décision prise par le recteur de l’Unipar est digne d’intérêt. Elle sonne le glas des mauvaises pratiques fortement enracinées dans les habitudes universitaires. Les étudiants lui en savent gré.
Moïse DOSSOUMOU