Les élus du peuple se sont penchés sur une question d’intérêt social la semaine écoulée. L’adoption de la loi relative à la réglementation du bail à usage d’habitation et celle relative à la réglementation des cautions et avance sur loyer des immeubles à usage d’habitation en République est perçue comme une délivrance par les populations. Cependant, des interrogations restent dans les esprits.
Le règne des propriétaires est en train de prendre définitivement fin avec ces deux dispositions qui ont été adoptées la semaine écoulée. Ces deux textes de loi sont venus chanter le requiem de la pagaille notée dans ce secteur. La grande liberté laissée à ces bailleurs est désormais en sursis avec toujours pour ambition d’encadrer un peu ce secteur. L’idée est bonne et la loi applaudie par la plupart. Toutefois plusieurs difficultés pratiques jalonnent la mise en œuvre diligente de cette loi si elle arrivait à être promulguée. Le premier niveau de difficulté reste la question de l’adressage et du cadastre. En fait, Cotonou, la ville vitrine du Bénin souffre fondamentalement de ces deux problèmes. La plupart des habitations ne sont pas véritablement identifiables. Il est quasi impossible pour tout étranger venu à Cotonou de se rendre directement chez celui qui l’accueille sans faire recours au téléphone du Zémidjan où du taximan qui le remorque. Difficile d’identifier les avenues, difficiles d’identifier les habitations. La Mairie avait dans le temps démarré une opération d’adressage des maisons, mais il semble que celle-ci s’est juste limitée aux habitations modernes. L’autre difficulté c’est le cadastre.
En effet, le cadastre est défini par l’Agence nationale du domaine et du foncier (Andf) comme un ensemble constitué de documents cartographiques et littéral à l’échelle national ou local, comportant, le premier des informations graphiques, le second des renseignements attachés, relatifs aux parcelles de propriété individuelle. Cette réforme importante qu’envisage le régime actuel est encore en projet et de ce côté, des efforts restent à être consentis. Cet état des lieux renseigne sur un certain nombre de difficultés pratiques. D’abord, la défaillance au niveau de l’adressage et du cadastre empêche l’identification cartographique réelle des habitations faisant objet de bail et celles qui ne sont pas. A partir de cet instant, il est déjà difficile d’effectuer un contrôle approprié.
L’autre difficulté réside au niveau des habitations dit de non droit. En fait Cotonou connaît ce phénomène d’installation sauvage de certaines populations sur les lits d’écoulement de l’eau. A côté de celles-ci, il y a celles des bidonvilles (le long des berges, des marécages, des lagunes) que l’autre a appelé Bénin profond, mais qui font objet de bail.
Comment est-ce qu’il pourra être possible de cerner toutes ces habitations et gérer les contentieux de location nés dans ces zones déjà invivables ? L’autre avancée notable de la loi, c’est la suppression des intermédiaires classiques appelés ‘’démarcheurs. Si cette mesure a la particularité de supprimer les tracasseries inutiles qu’imposent ces agents véreux, elle présente aussi des difficultés pratiques. La première difficulté se trouve au niveau de l’insuffisance de ces agences immobilières. Pour Cotonou seule, combien d’agences immobilières faudra-t-il pour réponde efficacement et à temps aux sollicitations des locataires ? L’autre difficulté réside dans la gestion des bidonvilles. Le bailleur d’une chambre en banco pratiquement affaissée longeant une berge est-il tenu de solliciter une agence immobilière ou un huissier ou notaire? Même en plein cœur de Cotonou, il y a ces habitations peu enviables qui font objet de bail et dont le montant est compris entre 10.000 et 15.000 Fcfa. Comment peuvent-être gérés ces cas particuliers ? Le bailleur qui ne sollicite pas les agences est-il punissable ? Si oui, comment l’identifier ?
De façon pratique, comment savoir qu’un propriétaire n’a pas sollicité une agence immobilière si tant est qu’ilest en l’espèce impossible de les dénombrer ? Aussi, quels rôles, joueront ces agences dans la prévention des conflits entre bailleurs et locataires (surtout que les conflits qui naîtront désormais entre les deux peuvent faire l’objet d’une procédure au Tribunal).Autant d’interrogations que les différents amendements et relecture devront permettre d’élucider.
AT