Elle s’annonce à pas de géant. La grande saison des pluies dans la partie méridionale du Bénin est à nos portes. Les précipitations enregistrées il y a quelques jours sont les prémices de l’ampleur du phénomène qui nous guette. Saluées dans les campagnes pour leur effet salvateur sur les cultures, les pluies ne sont pas toujours vues d’un bon œil dans les villes. Vecteur d’inondations, elles sont vécues comme un cauchemar par les populations qui ont élu domicile dans les zones inondables. Dès que le ciel s’assombrit, la désolation se lit sur des milliers de visages qui devront affronter la furie des eaux. Outre les habitations qui sont prises d’assaut par les eaux, les ruelles, les voies secondaires et même certaines grandes artères subissent le même sort. Inutile de préciser que certains services socio-éducatifs tels que les écoles et les centres de santé sont obligés de fermer leurs portes durant tout le temps que dure ce sinistre.
Habituellement, c’est la ville de Cotonou, dont le niveau est situé en dessous de celui de la mer, qui paie le prix fort de la furie des eaux. Pendant des semaines, des quartiers entiers, apparemment bâtis sur la terre ferme, se transforment en cités lacustres. Jusque dans les habitations, dans l’intimité des ménages, l’eau s’invite avec son cortège d’incommodités et de malheurs. En dehors de l’hygiène qui se trouvait menacée, même en saison sèche, le péril hydro-fécal dicte dès lors sa loi. Parce que les latrines sont inexistantes ou inadaptées, les populations, celles vivant dans les marécages, ne se gênent pas pour faire leurs besoins dans les eaux stagnantes. Cette situation, pour le moins désastreuse, s’étend progressivement depuis quelques années à plusieurs autres communes. Hormis la ville de Cotonou habituée aux affres des inondations, celles de Porto-Novo, de Sèmè-Podji, d’Abomey-Calavi font face à ce drame. Les communes de la vallée de l’Ouémé et celles de la région Agonlin n’échappent pas à ce phénomène.
Ces collectivités locales situées dans la partie méridionale du pays ne sont pas les seules à subir l’impitoyable loi des eaux. D’autres communes situées dans le Mono, les Collines et dans le Septentrion paient le prix fort chaque année en saison pluvieuse. A des degrés divers, elles prennent leur part de douleur dans ce sinistre qui frappe sans désemparer. Dotées de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, les communes s’organisent, chacune avec ses moyens et ses stratégies pour alléger les peines des populations. D’une localité à une autre, les actions de prévention et de riposte se ressemblent. Elles se limitent essentiellement au curage des caniveaux, à l’ouverture des voies et au pompage des eaux. L’assistance sociale en direction des sinistrés au moyen des dons de vivres et de couvertures s’ajoute à ce tableau. Ces actes dérisoires et ponctuels sont insignifiants quant à l’étendue des dégâts.
La solution pratique et responsable qui s’offre aux communes est celle de la mutualisation des moyens. Celles qui sont voisines ont plus intérêt à s’unir pour lutter contre le phénomène au lieu d’y faire face en rangs dispersés. Porto-Novo, Sèmè-Podji, Cotonou et Abomey-Calavi par exemple ne peuvent pas prétendre œuvrer contre les effets des inondations sans prendre la peine de se concerter et d’agir ensemble. Une action disparate d’une commune, même efficace, engendre immédiatement des répercussions sur l’autre. De plus, compte tenu de l’insuffisance et de la rareté des ressources, quoi de plus simple que de se regrouper pour aller en croisade contre l’ennemi commun ? C’est en parlant d’une même voix, c’est en définissant des stratégies communes que les autorités locales, souvent débordées par le phénomène, trouveront des approches de solutions pertinentes et efficaces. Si d’aventure elles s’inscrivent dans cette dynamique, l’appui du gouvernement et des autres partenaires n’en serait que renforcé.
Isac A. YAÏ