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Coups mortels et exercice illégal de la médecine /3e dossier): Félicien Adjérévo écope de deux ans de travaux forcés
Publié le vendredi 18 mai 2018  |  La Nation
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© Autre presse par DR
Le palais de justice Béninois




Le troisième dossier au rôle de la cour d’assises de la cour d’appel d’Abomey a connu son troisième dossier, mercredi 16 mai dernier. Il s’agit d’un dossier de coups mortels et d’exercice illégal de la médecine impliquant le sieur Félicien Adjérévo. Au terme des débats, la cour a requalifié les faits en homicide involontaire et condamné l’accusé à deux ans de travaux forcés.

Maintenu en détention depuis le 13 décembre 2013, soit cinq ans et demi ans passés en prison, Félicien Adjérévo est désormais libre de ses mouvements. La cour a commué les chefs d’accusation de coups mortels et d’exercice illégal de la médecine pour lesquels il était poursuivi en homicide involontaire, pour condamner l’accusé à deux ans de travaux forcés.
Présenté à la barre, mercredi dernier, l’accusé Félicien Adjérévo a retracé le film des actes ayant conduit à la mort de son épouse Valentine Yéwa Djègui. Il explique que depuis sept ans, il vit avec sa petite famille à Abeokouta au Nigeria où il fait le jardinage pour subvenir à ses besoins. Tout allait bien jusqu’en décembre 2012 où la femme tombe malade avec l’apparition d’un abcès sur la cuisse droite. Mais ayant eu quelques notions de médecine, il fait coucher la femme et pratique une incision sans anesthésie sur l’abcès. Puis, ayant constaté qu’il n’y avait aucun pue à l’intérieur, il suture la partie incisée avec de fil du cordonnier. Il s’ensuit une hémorragie incontrôlée qui a provoqué la mort. Confus, Félicien Adjérévo déclare avoir par la suite fait traiter le corps à la traditionnelle afin de le conserver durant quatre jours avant de le convoyer sur Dassa-Zoumè.
Face aux questions de la cour sur ses connaissances en médecine, Félicien dit qu’il est en vérité cultivateur mais qu’il a reçu quelques notions en médecine au Togo ; ce qui lui permettrait de soigner des gens, ne serait-ce que les fièvres et autres maladies qui ne nécessitent pas grands soins. « Je fais de piqures aux gens à la maison », ajoute-t-il pour convaincre la cour de ses compétences pourtant non avérées.
A la question de savoir s’il a un parchemin qui lui permet de prodiguer des soins, il répond « Non ! », mais que tout le monde l’appelait ‘’Doto’’ avant qu’il ne rencontre sa femme et de partir avec elle en aventure au Nigeria.
Appelés à la barre, les parents de la victime sont surpris par ce qu’ils viennent d’entendre de la bouche de Félicien. Pour la mère de la victime et son oncle, l’accusé ne leur avait jamais dit ce qui s’est passé avec leur fille. Il leur a tout le temps caché la vérité sur la mort de leur fille au Nigeria. En effet, racontent-ils, Félicien n’est même pas connu de la famille. Quand il a engrossé leur fille Valentine, la mère lui a proposé d’aller voir la famille. Il ne l’a pas fait jusqu’à ce que la fille accouche. Ils en étaient là quelques mois après l’accouchement quand ils ont constaté la disparition du couple. Sans rien dire à qui que ce soit, ils partent on ne sait où.
C’est bien sept ans après que la mère apprend par les voisins qu’une fille portant le même nom que sa fille serait morte au Nigeria dans des conditions bizarres. C’est l’angoisse et la confusion dans la famille. Ils se rapprochent des voisins qui ont des parents au Nigeria. Puis la nouvelle est confirmée. Des négociations sont entreprises pour que le corps soit rapatrié au Bénin. Ce qui fut fait grâce à la générosité des membres de la communauté vivant dans le même quartier que le couple à Abeokuta. C’est ainsi que le corps est rapatrié à Dassa. La dépouille est là avec le mari et quatre enfants. C’est dire qu’en plus de celui que le couple a eu avant de partir, au Nigeria, la femme en a eu trois autres. En l’espace de sept ans, le couple a eu quatre enfants. Au moment du drame, l’aîné avait 7 ans et le benjamin, 7 mois. Un lit bien fertile !
A la vue du corps, les parents constatent des blessures et des hématomes. Pire, en plus de la plaie béante sur la cuisse, le corps porte des traces de sang sur les narines, les oreilles et par la bouche. Que s’est-il passé ? Félicien répond aux parents qu’il découvre ces anomalies au même moment qu’eux. Il feint ne rien comprendre. Le doute s’installe dans la famille. Les autorités sont saisies et le médecin légiste examine le corps.
Le président de la cour Désiré Dato interroge l’accusé Félicien, « Pourquoi aviez-vous caché la vérité aux parents ? » Et Félicien fond en larmes et sort un mouchoir blanc, s’essuie le visage avant d’expliquer qu’il avait manqué de courage devant le drame.
Après avoir écouté le récit de l’accusé, la cour rappelle les parents pour en savoir sur les conditions de vie des enfants. A ce propos, la belle-mère déclare que de leur retour du Nigeria, c’est elle qui a la charge des quatre enfants. Elle-même cultivatrice se débrouille pour subvenir à leurs besoins. A la question de savoir si la famille se constitue partie civile pour réclamer des dommages et intérêts suite au décès de leur fille, ni l’oncle ni la belle-mère de l’accusé n’en trouvent l’intérêt. Pour eux, la vie n’a pas de prix. Et visiblement, on pouvait sentir que la question agaçait. A la limite, c’était indécent pour eux de réclamer de l’argent en contrepartie du décès de leur fille.

Des infractions prévues et punies

Prenant ses réquisitions, l’avocat général Alain Sèmassou fait observer que l’accusé Félicien Adjérévo est bel et bien l’auteur de la mort de Valentine Djègui et l’a d’ailleurs reconnu à travers ses réponses à la cour. En clair, les trois éléments constitutifs des faits sont réunis pour les deux chefs d’accusation. Il évoque l’infraction des coups mortels qui constitue la violence exercée sur un individu peu importe l’état dans lequel il se trouve. Une infraction prévue et punie par l’article 309 alinéa 4 du Code pénal. Et les faits témoignent que la victime a beaucoup saigné du fait de l’accusé. En ce qui concerne l’exercice illégal de la médecine, il est sévèrement puni au Bénin par plusieurs textes en vigueur et tout comme le Code pénal qui le réprimande. Alors, tout le corps des délits étant constitué, l’avocat général demande à la cour de condamner l’accusé à 6 ans de travaux forcés.
A la suite de l’avocat général, la défense assurée par Me Hermann Yénonfan prend la parole pour saluer la volonté de membres de la cour à aller loin dans ce dossier pour comprendre les faits et surtout les circonstances du décès de dame Valentine Djègui. Il a surtout invité la cour à la clémence dans l’intérêt des enfants qui sont abandonnés depuis la mort de leur mère et le maintien en détention du père. Me Hermann Yénonfan dira qu’il y a des remords qui sont éternels et qu’il vaut mieux laisser l’accusé face à ses remords et à ses responsabilités de père. Pour lui, il n’est pas normal que la belle-mère avec son âge avancé continue de se battre pour nourrir et mettre à l’école les quatre enfants. « Il faut qu’il sorte pour assumer », lancera-t-il à la cour en lui demandant de le condamner juste à la durée de la détention.
A la délibération, la cour présidée par Désiré Dato a jugé juste de requalifier les chefs d’accusation. De coups mortels et exercice illégal de la médecine, elle retient plutôt l’homicide volontaire et condamne l’accusé Félicien Adjérévo à deux ans de travaux forcés. L’intéressé recouvre sa liberté.

Composition de la cour

Président : Désiré Padel Dato

Assesseurs : Jocelyn Gbaguidi, Appolinaire Hounkannou

Jurés : Victorine Agbémahoué, Ernestine Tonoukouin, Françoise Koukpaki, Albert C. Guèdègbé

Avocat général : Alain Sèmassou

Greffier : Robert John Houngbadji
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