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Coups mortels (29e dossier): Hervé Zinsounon acquitté, Noël Coffi et Yao Adjègan écopent de 7 ans de travaux forcés
Publié le mardi 22 mai 2018  |  La Nation
Le
© Autre presse par DR
Le palais de justice de Cotonou






Au menu de l’examen du vingt-neuvième dossier inscrit au rôle, la cour d’assises de la cour d’appel de Cotonou a connu, ce jeudi 17 mai, d’une affaire de coups mortels survenue en février 2012 à Midombo Akpakpa. Elle met en cause les nommés Noël Coffi Adjègan, Yao Adjègan et Hervé Zinsounon tous mis sous mandat de dépôt le 15 février 2012. Au terme des débats, les deux frères Noël Coffi Adjègan, Yao Adjègan ont été reconnus coupables de coups mortels et condamnés à 7 ans de travaux tandis qu’Hervé Zinsounon a été acquitté au bénéfice du doute.

Sept ans de travaux forcés contre Noël Coffi Adjègan et Yao Adjègan et acquittement au bénéfice du doute pour Hervé Zinsounon. C’est la sentence prononcée par la cour d’assises de la cour d’appel de Cotonou, ce jeudi 17 mai 2018, à l’issue de l’examen de la vingt-neuvième affaire inscrite au rôle de la première session de 2018 et relative aux coups mortels.
Dans leurs dépositions au cours de l’interrogatoire à la barre, chacun des prévenus Noël Coffi Adjègan, Yao
Adjègan et Hervé Zinsounon s’est expliqué sur les faits de coups mortels à eux reprochés. De façon globale, personne d’entre eux n’a reconnu avoir donné de coups à la victime Prudence Yétonnon. Cela n’a empêché ni le président de la cour ni le ministère public de maintenir la traque par des questions pour situer les responsabilités. Il ressort de leurs explications qu’en allant acheter à manger la nuit du vendredi 10 février 2012 à Midombo à Akpakpa, ils ont aperçu une demoiselle du nom de Vicentia qui a intéressé Hervé Zinsounon. Ce dernier l’a appelée. Selon eux, celle-ci n’aurait pas voulu répondre à la sollicitation d’Hervé. Arrivés à un certain niveau, des jeunes, les ayant vus, les auraient interpellés pour en savoir sur les raisons pour lesquelles ils seraient en train d’importuner la fille. Sur ces entrefaites, une première bagarre se serait engagée après une paire de gifles à Noël Coffi Adjègan et des coups du plat de machette par les assaillants.
Sur la question de savoir s’ils n’ont pas eu à brutaliser la fille, obligeant les agresseurs à intervenir, leur réponse a été négative. « Les assaillants étaient environ six », précise Noël Coffi Adjègan qui dit également s’être défendu face aux coups reçus de la part des assaillants sans être capable de dire avec quoi il l’a fait. Et les débats s’étaient éternisés sur ce détail. Mais il aura fallu la persévérance du président et du ministère public pour que Noël révèle que c’est au cours de la deuxième bagarre qu’il aurait arraché aux assaillants un bâton dont il se serait servi pour se défendre alors que son frère Yao serait tombé sous les coups des agresseurs. Ce que confirment ces co-accusés.
Mais de quoi a succombé la victime Prudence Yétonou ? Personne n’a pu y répondre parmi eux jusqu’à la fin du procès. Mieux, ils arguent de l’obscurité qui régnerait au moment des faits pour indiquer qu’ils ne sauraient dire quel coup lui aurait été fatal. Car, Yao explique avoir reçu des coups des gens de son propre camp pour insinuer que cela pourrait aussi être le cas pour la victime dans son camp. Alors le président et le ministère public ont confronté Noël à sa déclaration à la police et devant le juge d’instruction : « J’ai arraché à mes assaillants un bâton dont je me suis servi pour me battre contre eux ». En réponse, Noël baisse la tête et ne parle plus.
Le frère aîné de la victime, le sieur Marius Yétonou, cité en tant que témoin, fait comprendre que Prudence aurait reçu des coups à la tête. Et qu’il a été transporté dans trois différents centres de santé avant d’être admis dans un quatrième pour des soins. L’examen de scanner demandé depuis 10 h, c’est vers 15 h qu’il a pu rassembler les fonds. Et c’était trop tard. « J’entrais dans la salle quand mon frère rendait l’âme », témoigne-t-il. Toute en refusant de se constituer en partie civile.

Dompter ses pulsions

Plantant le décor pour son réquisitoire, Virgile Kpomalégni indique que l’homme est capable du meilleur comme du pire et qu’il faut de la tolérance pour dompter ses pulsions et sa tendance à la violence. Le dossier en examen concerne les coups mortels qui sont des faits prévus et punis par l’article 309, alinéa 4 du Code pénal. Il les définit comme des coups portés et blessures faites ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Cette infraction est établie dans ce dossier, a-t-il dit avant d’en démontrer les éléments constitutifs. L’élément légal réside dans l’article 309, alinéa 4 du Code pénal et correspond ici au résultat des coups. En ce qui concerne l’élément matériel, Virgile Kpomalégni trouve qu’il réside dans les coups portés et les blessures faites à la victime Prudence Yétonou. Il établit un lien de causalité entre les coups portés et la survenue de la mort de la victime. L’élément intentionnel réside dans la volonté de donner des coups et non dans les résultats (la mort). En conclusion, Virgile Kpomalégni requiert que la cour dise qu’il y a doute sur la culpabilité d’Hervé Zinsounon et de l’acquitter au bénéfice du doute. Quant à Noël Coffi Adjègan et à Yao Adjègan, l’avocat général requiert que la cour les déclare coupables de coups avec cette circonstance que les coups portés ont entraîné la mort sans intention de la donner ; et que Noël Coffi Adjègan et Yao Adjègan soient condamnés à 10 ans de travaux forcés.

De quel coup est mort Prudence ?

Pour défendre les mis en cause, trois avocats ont officié : Me Robert Hounkpatin pour Yao Adjègan ; Me François Kèkè pour Noël Adjègan et Me Sakariyaou Nourou Guiwa pour Hervé Zinsounon. Tous rejettent les réquisitions du ministère public et chacun argumente.
Me Robert Hounkpatin s’interroge : « De quel coup serait mort Prudence ? » Selon lui, tant que l’on ne parvient pas à répondre avec précision à cette question, on ne saurait entrer en condamnation contre son client. Car, dit-il, les faits s’étaient déroulés dans la nuit et dans la confusion, la victime aurait pu recevoir des coups des gens de son propre camp. Mieux, les accusés n’avaient pas prévu la bagarre avec leurs agresseurs. Se référant aux faits, il soutient que la victime n’aurait pas reçu des soins adéquats et que cela aurait été la cause de son décès. Il conclut que les faits de coups mortels ne sont pas constitués.Pour ce faire, il utilise comme moyens l’article 328 du Code pénal pour soutenir qu’il n’y a ni crime ni homicide et l’article 64 pour montrer qu’en situation de légitime défense, il n’y a pas délit. Il plaide que la cour fasse bénéficier à son client la légitime défense, ou à défaut la contrainte, ou encore l’excuse de provocation. Il conclut que son client soit acquitté purement et simplement.
Pour le compte de Noël Coffi Adjègan, Me François Kèkè plaide l’acquittement. Il souligne que les faits s’étant produits de nuit et donc dans l’obscurité et la confusion, l’on ne saurait dire, sans se tromper, qui a donné le coup fatal. Comme son confrère Me Robert Hounkpatin, il va sur le terrain de l’excuse de provocation et de la légitime défense. Mieux, le lien de causalité entre les coups et le décès est douteux. Pour lui, même si ce lien existe, il a été rompu dès lors que les soins adéquats n’ont pas été administrés à la victime à temps. A ce sujet, il se réfère aux propos du frère aîné de la victime sur cet aspect du dossier et dont il s’est fait, entretemps, donné acte. Alors, il plaide l’acquittement. Et si la cour n’est pas convaincue, que la peine se limite au temps passé en détention.
Quant à Me Sakariyaou Nourou Guiwa, il s’associe aux moyens de ses confrères. Toutefois, il s’insurge contre l’acquittement au bénéfice du doute pour son client. A cet effet, il se réfère à l’arrêt de renvoi pour relever qu’il s’est fondé sur des déclarations pour entrer en accusation. Car à la charge de son client, dit-il, il ne note aucun coup donné. « Mon client ne devrait pas comparaître, ni être emprisonné. Et pourtant, il a passé six ans en détention préventive », observe-t-il, ajoutant qu’il plaide l’acquittement pur et simple. Puis pour renforcer sa plaidoirie, il revient sur le lien de causalité entre les coups et la mort et mentionne que le rapport d’autopsie indique qu’il y a « défaut de soins adéquats ».
Après les délibérations, la cour a déclaré non coupable de coups mortels Hervé Zinsounon et l’acquitte au bénéfice du doute et ordonne qu’il soit immédiatement mis en liberté s’il n’est retenu pour autre cause. Par contre, Noël Coffi Adjègan et Yao Adjègan ont été reconnus coupables d’avoir porté des coups à Prudence Yetonou avec cette circonstance que lesdits coups ont entraîné la mort sans intention de la donner. Ces faits étant prévus et punis par l’article 309, alinéa 4 du Code pénal, la cour les condamne à 7 ans de travaux forcés. Les accusés mis sous mandat de dépôt le 15 février 2012, ils doivent poursuivre leur séjour en prison pour moins d’un an encore.

Les faits

Le vendredi 10 février 2012 vers 23 h, au quartier Midombo Akpakpa à Cotonou, Noël Coffi Adjègan, Yao Adjègan et Hervé Zinsounon ont interpellé Vicencias Ténontin, qui rendait visite à son copain. Au cours de leurs échanges, Prudence Yétonou et Maxime Houton se sont rapprochés d’eux. C’est alors qu’une dispute éclata entre eux. Il s’en est suivi une altercation au cours de laquelle Noël Coffi Adjègan, Yao Adjègan et Hervé Zinsounon ont assené des coups de bâton à Prudence Yétonou qui s’est évanoui.
Transporté d’abord dans une clinique ensuite à l’hôpital de zone de Kowégbo et enfin à l’hôtpital Béthesda, Prudence Yétonou rend l’âme.
Interpellés et inculpés pour crime de coups mortels, Noël Coffi Adjègan, Yao Adjègan et Hervé Zinsounon n’ont reconnu les faits ni à l’enquête préliminaire ni devant le juge d’instruction.

Composition

Président : Marie A. Soudé- Godonou

Assesseurs : Maximillien Kpéhounou et Razak Bello

Jurés : Andréa Bachioumba ; Pélagie Lokossou ; Gaston Adékambi et Bouraima
Kochégbé

Ministère public : Virgile Kpomalégni

Greffier : Félicien Fatondji


Alain ALLABI
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