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La Presse du Jour N° 1989 du 10/10/2013

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Révision de la Constitution : Un projet au contenu anti-démocratique selon Philippe Noudjènoumè
Publié le jeudi 10 octobre 2013   |  La Presse du Jour


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Le Professeur Philippe Noudjènoumè, constitutionnaliste et 1er secrétaire du Parti Communiste du Bénin (Pcb)


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Le Professeur Philippe Noudjènoumè, constitutionnaliste et 1er secrétaire du Parti Communiste du Bénin (Pcb), a organisé hier, mercredi 09 octobre 2013, au Codiam de Cotonou, une conférence publique pour analyser le contenu de l’actuel projet de révision de la Constitution du 11 décembre 1990. Il a procédé à un décryptage des principaux reculs dont fait état ledit projet par rapport aux acquis en matière de libertés, de démocratie et de bonne gouvernance.

Loin de se prononcer sur l’opportunité ou non de la révision de la Constitution, le professeur en droit public et constitutionnaliste Philippe Noudjènoumè a énoncé hier, mercredi 09 octobre 2013, les « graves reculs » démocratiques que comporte à son avis le projet actuel de révision de la constitution introduit par le gouvernement au Parlement. C’était au cours d’une conférence publique qu’il a donnée pour, explique-t-il, le respect et la sauvegarde de la démocratie au Bénin. Encadré pour la circonstance de deux porte-parole de la Convention patriotique des forces de gauche et du porte-parole du Pcb, Jean Kokou Zounon, le Professeur Philippe Noudjènoumè a indiqué qu’en plusieurs points, ce projet de révision contient d’énormes incongruités qui font penser à une manœuvre dolosive du gouvernement visant à maintenir l’actuel président au pouvoir en 2016. Ainsi, il a d’abord relevé que le texte du projet introduit devant le Parlement et publié dans les journaux est très différent de celui édité par l’Onip et mis à la disposition des citoyens. Pour lui, le second texte ne fait nullement montre des principales entorses faites aux principes démocratiques de notre pays. Au titre de ces entorses, il mentionne que ce projet comporte beaucoup de commentaires. Or en tant que constitutionnaliste, il affirme que le programme ou la Constitution ne doit jamais être mêlé à des explications ou commentaires. De ce fait, il affirme qu’il s’agit d’une confusion visant, d’intention avouée ou non, à changer le contenu des dispositions constitutionnelles de notre loi fondamentale.
Un projet aux dispositions anti-démocratiques

Rappelant que le préambule est le concentré des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et sur lesquels repose la Constitution, Philippe Noudjènoumè indique que le changer, (ce qui est à ses dires très rare), c’est changer de Constitution, donc aboutir à une Nouvelle République. Ensuite, il confie que le nombre surabondant des articles à modifier, soit 51, est un fait jamais noté dans un processus de révision. Et il ajoute que tous les articles objets de révision portent sur des questions substantielles d’une Constitution. Ce qui, explique-t-il, réduit la sphère d’exercice des libertés des citoyens et touche au régime politique présidentiel instauré depuis 1990, en le remplaçant par celui parlementaire, du fait de l’introduction du concept d’initiative populaire. Pour ce qui est des dispositions régressives en matière de liberté des citoyens, Noudjènoumè confie que ce projet fait entrave au droit de grève en le limitant d’une part au respect de la continuité du service public et en exigeant qu’il ne porte pas atteinte à la liberté du travail ni ne mette en péril la sécurité de la Nation et la santé de la population. Estimant que ces paramètres sont généralement appréciés par le gouvernement, il affirme que le droit de grève est ainsi bafoué, car soumis à l’autorisation préalable de l’Etat. Dans ce projet de révision, poursuit-il, les partis politiques sont aussi laissés à la volonté du pouvoir exécutif, car leur création sera désormais conditionnée à « un projet de société propice au développement humain durable ». Il ajoute que selon ledit projet, ces partis ne seront plus astreints aux principes de souveraineté, de démocratie et de laïcité. Ce qui selon lui donnera lieu à une floraison de partis politiques ouvertement régionalistes et religieux avec pour effet la naissance de conflits régionalistes et religieux à outrance.

Des modifications fallacieuses
Jugeant que l’article 37 de la Constitution de 1990 prévoit déjà la lutte contre la corruption au niveau des agents publics et privés, Noudjènoumè affirme qu’il n’ait point besoin de réviser la Constitution en vue d’y intégrer l’imprescriptibilité des crimes économiques. Aussi, a-t-il mentionné, cette seule introduction ne suffit nullement pour poursuivre économiquement les membres du gouvernement et le Chef de l’Etat. Il y ajoute donc la nécessité de l’indépendance de la Haute Cour de Justice, de la Cour Suprême et de la Cour des comptes. Ce qui n’est pas encore le cas, précise-t-il. Puis, il explique que la constitutionnalisation d’un simple organe technique, en l’occurrence la Cena, n’est pas nécessaire. Puisqu’à ses dires, la Cena est le socle le plus solide de la fraude au Bénin. Quant à la Cour des Comptes, il indique que le gouvernement ne devrait pas être mu par les conditions posées par l’extérieur, en l’occurrence l’Uemoa, mais qu’il doit plutôt prendre en compte les réalités et les besoins du pays. Par ailleurs, il mentionne que ce projet renforce la suprématie de la Cour Constitutionnelle sur les autres institutions de la République. En tant que constitutionnaliste, il affirme donc qu’il est inacceptable qu’une Institution non élue donne des ordres à celles élues. Ce qui, indique-t-il, est une grande menace pour la démocratie béninoise.

En définitive, Philippe Noudjènoumè affirme que ce projet met désormais l’initiative de la révision aux mains de l’Exécutif, du Parlement et de l’initiative populaire. Ce qu’il juge anti-démocratique. De ce fait, il exige le retrait pur et simple de ce « projet autocratique » qui, selon lui, est à l’antipode des acquis démocratiques de notre pays et tissé sur la base des modèles étrangers.
Les propositions du Pcb

Au regard de toutes ces entorses aux principes démocratiques relevées par le Professeur Noudjènoumè, mais tout en n’étant pas contre une révision de la Constitution, celui-ci a proposé au nom du Pbc que le projet de révision tienne compte, entre autres, des points ci-après : l’inscription et la sanction des crimes politiques pour mettre définitivement un terme à ceux-ci ; la reconnaissance aux travailleurs du droit et du devoir d’exercer le suivi et le contrôle de la gestion de la société dans laquelle ils exercent leur fonction. Se basant sur le principe universel selon lequel aucun peuple ne se développe en s’appuyant sur la langue d’autrui, ils exigent aussi que soit inscrite dans la Constitution l’instruction dans les langues maternelles du Bénin en supprimant d’abord l’article 1er de la Constitution de 1990 qui érige le français en seule langue officielle. Ils exigent que soit aussi inscrit dans la Constitution le droit de protection des opérateurs économiques nationaux contre la concurrence déloyale des grandes métropoles étrangères ; la protection des ressources naturelles et la non privatisation des entreprises des secteurs stratégiques des domaines publics comme les fleuves, lacs et plages, ainsi que la reconnaissance des pouvoirs et savoirs de toutes les autorités traditionnelles du pays. Ils souhaitent également la suppression de l’article 66 en interdisant les bases militaires étrangères sur le territoire béninois et l’appel aux forces militaires étrangères dans les conflits internes du pays. Le Pcb veut enfin qu’un accent particulier soit mis dans la Constitution sur la décentralisation qui devra imposer une large autonomie locale aux niveaux supérieur et inférieur.

Monaliza Hounnou

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