La sixième mandature de la Haute juridiction s’installe avec une volonté affirmée de réformer. Pour une première fois, les membres de l’institution s’inscrivent dans une démarche de rupture dans la continuité. Le geste provoque déjà des remous, mais quoiqu’on dise, la mandature actuelle de la Cour constitutionnelle est pleinement dans ses prérogatives.
Le changement surprend. Les conservateurs qui ont toujours rêvé voir la Cour dans ses apparats d’antan rechignent toujours. La logique qui consiste à faire de la Haute juridiction, une institution immuable sans possibilité aucune d’amélioration de l’existant, est définitivement révolue. La mandature actuelle s’inscrit dans une dynamique de changement en apportant du neuf à l’institution. Dans son discours de prise de fonction, l’actuel Président de la Cour Joseph Djogbénou, a déjà annoncé les couleurs. Il a fait savoir que l’institution doit s’arrimer aux réalités de son temps et aux enjeux de développement. Les premiers actes de cette volonté affichée s’écrivent déjà avec la modification du règlement intérieur de l’institution. Depuis 2005, ce document produit sous l’égide de la Présidente Conceptia Denis-Ouinsou a été gardé comme « la bible » sans possibilité d’ajouter ou de retrancher une lettre. Les mandatures successives ont travaillé dans cette démarche de stricte continuité en maintenant intactes les lignes de ce document qui reste perfectible. La marche des institutions se fait avec les hommes. Joseph Djogbénou arrive pour bousculer un peu l’immobilisme structurel au sein de la Haute juridiction. Mais cette volonté ne reste pas sans respect des textes. En fait, le règlement intérieur de la Cour constitutionnelle a prévu les modalités de sa modification. C’est l’article 56 du document qui fixe les contours. Selon cet article : « Sur l’initiative de tout membre, le règlement Intérieur peut être révisé par la Cour Constitutionnelle, et dans ce cas, le vote a lieu à la majorité absolue de ses membres ». Au cours de son point de presse, le Secrétaire Général, Gilles Badet, a rappelé les conditions d’adoption du projet de modification du règlement intérieur. Le processus rappelle-t-il, a été conduit en respect des textes et l’initiative de modification du règlement a été acceptée par l’unanimité des membres. La volonté de réformer de l’actuel Président de la Cour est adossée au respect des textes constitutionnels en vigueur. Il n’y a vraiment pas matière à critiquer une réforme faite en respect des dispositions constitutionnelles. L’autre mérite de cette volonté de réformer, c’est justement les motivations. Le premier souci partagé par tous, c’est l’absence de transparence. La Cour constitutionnelle a toujours essuyé cette critique d’être la boîte noire d’où sortent des décisions dont personne ne maîtrise les mécanismes. Cette récrimination date de la création de l’institution et aucun Béninois objectif ne peut le nier. On est pratiquement arrivé à un moment où la crédibilité de la Cour est sérieusement à l’épreuve du doute et de la suspicion. La présente mandature a voulu changer la donne en proposant une formule qui permet aux parties de présenter ouvertement leurs prétentions. Cette volonté de transparence est encore renforcée par le caractère public du débat. Il s’agit finalement de la mise en œuvre totale et complète de la volonté des parties. Outre cet avantage notable, c’est le respect du délai raisonnable consacré par tous les manuels de droit qui est assuré. Il est évident de comprendre que par le passé, les décisions de la Cour prennent assez de temps. Ce dysfonctionnement est en voie d’être corrigé avec les audiences qui démarrent ce jour. Cette nouvelle formule proposée permettra l’instauration d’une célérité des décisions de l’institution. Autant de motivations partagées par tous et qui témoignent de l’importance de ces réformes.