10 ans de réclusion criminelle. C’est la sanction infligée à Samou Outchombé par la cour présidée par Adéoti Karimi, qui a été reconnu coupable d’avoir donné la mort à dame Aouti Gnonssoum qui ne cédait pas à ses avances par des pratiques occultes. Les faits de pratique de charlatanisme ou pratiques occultes sont prévus et punis par les dispositions del’article264 bis du Code Pénal modifié par la Loi n°87-11 du 21 Septembre 1987 en son article 1er. Statuant sur les intérêts civils après avoir reçu la constitution de partie civile du frère de la victime, la cour a condamné au civil, l’accusé Samou Outchombé, a payé le montant de 100.000 Fcfa au titre de dommages et intérêts.
Résumé des faits
Courant l’année 2013 à Koubo kouboré dans la commune de Copargo, le nommé Samou Outchombé, cultivateur et guérisseur traditionnel de son état fit plusieurs fois de suite des avances à une dame Aouti Gnonssoum qui les a toujours rejetées. Pour la persuader de ses sentiments, il lui offrait sans cesse des présents, mais en vain.
Ne pouvant plus supporter son échec de cette humiliation, Samou Outchombé prit alors la résolution d’attenter à la vie d’Aouti Gnonssoum par des pratiques occultes. C’est ainsi qu’il alla enterrer très tôt un matin sur le chemin habituel de dame Aouti, un gri-grifait de mélange de diverses racines, de plantes, de piment de guinée et un œuf de poule. Après avoir effectivement emprunté ce chemin, Aouti Gnonssoum se mit à se plaindre constamment de douleurs abdominales. Par finir, elle rendit l’âme quelques jours plus tard en dépit des différents soins qui lui ont été prodigués.
Les débats
L’accusé Samou Outchombé, à la barre a remis en cause ses déclarations antérieures, mais a finalement dit qu’il reconnait avoir tué la victime comme, il a été désigné par le cadavre selon les rites traditionnels.
L’avocat général Bakary Malick Nourou-Dine avant d’analyser les éléments constitutifs de l’infraction de pratique de charlatanisme, a fait observer que la loi s’est contentée de fixer les peines encourues mais n’a pas donné une définition exacte de cette incrimination. L’élément matériel, c’est le gri-gri enterré sur la voie sur laquelle la victime doit passer suite au refus de cette dernière d’accepter les avances de l’accusé. A cela, il a ajouté l’évidence des faits et les aveux de l’accusé selon lesquelles, les ingrédients du gri-gri sont la propriété de l’accusé dont l’effet est de rendre la victime malade puis de la tuer. L’élément intentionnel est la volonté de nuire de l’accusé à la santé de la victime, l’accusé lui-même a déclaré devant le magistrat instructeur que la mort de la victime est son œuvre. Donc, il a projeté le résultat de ces pratiques occultes. Le lien de causalité se trouve dans les déclarations de l’accusé relativement aux effets du gri-gri. C’est au regard de tout cela que l’avocat général a requis que la cour déclare l’accusé Samou Outchombé coupable de pratique de charlatanisme et de le condamner à 20 ans de réclusion criminelle.
L’avocat de la défense, Me Yvon Détchenou, s’est dit surpris des conclusions des réquisitions du ministère public. Si la cour doit apprécier sereinement les faits de la cause, elle doit retenir qu’il n’y a aucun élément au dossier qui rapporte la preuve de ce que son client a enterré un gri-gri sur la voie et qu’il a eu altercation entre l’accusé et la victime. Pour lui, croyances et ignorances sont les deux réalités qui se dégagent des faits de la cause et le législateur a confondu charlatanisme et pratiques rétrogrades. Trop de doutes dans le dossier, l’intention n’est pas établie et mieux, la cour ne dispose pas de l’expertise requise pour qualifier et apprécier les faits. Pas de lien de causalité et l’aveu de son client a été obligé. C’est pourquoi, l’avocat de la défense a plaidé l’acquittement au bénéfice du doute pour son client.