Ils peuvent dormir tranquille. Les acteurs de la commercialisation de l’essence dite de contrebande communément appelée « Kpayo » n’ont pas à s’inquiéter outre mesure de leur sort. L’imminence de la promulgation de la loi n°2018-16 du 4 juin 2018 portant code pénal en République du Bénin faisait planer une grave menace de survie sur cette filière économique qui absorbe des milliers de bras valides. Erigeant cette activité illicite au rang d’infraction passible de sanctions sévères, la future loi qui sera mise en vigueur sous peu annonçait le requiem de ce commerce dont les Béninois auront du mal à s’en passer. Outre les récriminations des populations qui redoutent d’ores et déjà la répression envisagée à cet effet, les acteurs de la filière ne savaient plus où donner de la tête. La perspective du chômage qui s’offrait à eux n’était guère reluisante. Mais sur ce coup, force est de constater que le gouvernement n’entend pas les vouer aux gémonies.
Modeste Toboula, le truculent préfet du Littoral, dont la renommée n’est plus à démontrer, vient de déjouer tous les pronostics. Il était attendu sur le terrain de la répression comme il sait si bien le faire. Mais il a préféré y aller par la douceur. La méthode choisie par le gouvernement pour mettre fin à ce commerce illicite qui a fait d’incommensurables dégâts pendant des décennies est digne d’intérêt. Dans le but d’indiquer la voie à suivre aux acteurs de la filière pour se tirer d’affaire, le préfet du Littoral a reçu hier à son cabinet le collectif des vendeurs de son ressort territorial. Cerise sur le gâteau, le gouvernement a pris des mesures palliatives à caractère social en faveur des acteurs de ce secteur informel en vue de leur reconversion. Cela sonne plutôt comme une bonne nouvelle.
Le recensement de tous les vendeurs opérant dans la filière est la première phase de l’opération de reconversion conçue à leur endroit. Cette activité permettra aux décideurs d’avoir des données sur le nombre exact de Béninois qui s’investissent dans ce domaine afin de mettre à leur disposition, selon des modalités bien définies, des mini stations mobiles ainsi que les équipements de transport du carburant en adéquation avec les normes de sécurité requises. La phase pilote de ce projet démarrera sous peu et s’étendra progressivement dans tous les 13 arrondissements de la ville de Cotonou. Ce n’est qu’au terme de cette phase de généralisation que Modeste Toboula entrera en scène pour réprimer les contrevenants à ces dispositions. Autrement dit, les vendeurs de l’essence « kpayo » qui refuseront de saisir cette main tendue du gouvernement seront seuls responsables des déconvenues qui découleraient de leur entêtement.
Cette politique sociale que le gouvernement se propose de mettre en application est à saluer. Elle vise à épargner la faim et le dénuement à des milliers de familles. Cette sollicitude aurait été de mise en janvier 2017 lors de l’opération de libération des espaces publics que les populations ne se sentiraient pas autant opprimées. C’est heureux que cette fois le gouvernement décide de changer de fusil d’épaule. Lorsque toutes ces bonnes actions auront été accomplies au profit des vendeurs de l’essence de contrebande, la répression aura toute sa raison d’être. Si tout se fait comme annoncé, personne ne trouvera à redire en cas de représailles. En procédant comme cela vient d’être dit, Patrice Talon se rapprochera davantage des populations qui le porteront en triomphe, selon ses vœux. Pourvu que les promesses annoncées se réalisent !
Moïse DOSSOUMOU