Qui a tué Jacqueline Ahouangbévi ? La question continue de tarauder l’assistance en dépit de la charge de 10 années que porte l’accusé d’hier, jeudi 19 juillet 2012. Albert Gbagbé s’est longuement défendu. Ces nombreux témoins ont déposé, mais le flou reste entier sur le meurtrier réel de cette jeune fille retrouvée gisant dans une mare de sang le 19 février 2012.
Les faits se sont déroulés à Kétou dans l’auberge dénommée « la cité ». Ce jour, Jacqueline, réceptionniste de l’auberge a été retrouvée morte dans l’une des chambres, ligotée à l’aide d’un câble électrique. Au cours de sa déposition hier, 19 juillet 2018, l’accusé, agent d’entretien du lieu au moment des faits, a déclaré que Jacqueline avait dans le temps un ami de nationalité nigériane avec qui elle avait entamé une relation relativement sérieuse. Ce jeune-homme, affirme-t-il, venait de temps en temps, et leur faisait de petits présents. Le dimanche 19 février, le jeune-homme que l’accusé a identifié comme étant l’auteur du meurtre était, selon sa déposition, venu à bord d’un véhicule et est entré dans l’une des chambres avec la réceptionniste qu’il prenait pour sa compagne. Une heure passe, deux heures, trois heures, sans mouvement d’homme. C’est alors qu’Albert alerta le gérant de l’auberge et ils sont tous deux rentrés dans la chambre. L’irréparable était déjà fait, Jacqueline était déjà morte. Ni le criminel encore moins l’arme du crime n’a été retrouvé. Le véhicule en question a aussi a disparu. A la barre, Albert a affirmé n’avoir même pas entendu de coup de feu alors qu’il a été extrait du corps de la victime des balles. Comment cela peut bien s’expliquer ? Au cours des investigations menées, les personnes interrogées sur les lieux ont affirmé ne pas apercevoir un véhicule dans les parages au moment des faits. Dans le même temps, un témoin a laissé entendre hier à la barre qu’elle a entendu un grand bruit comparable à un coup de feu au moment du crime. Dans le registre que tient la réceptionniste décédée, il n’est fait mention d’aucun nom de visiteur le jour du drame. Pourtant, Albert et Jacqueline filaient le parfait amour. La défunte rendait même de fréquentes visites à la petite famille de l’accusé, et la femme de celui-ci et elle étaient amies. Etait-il imaginable d’envisager que Albert soit amené à tuer Jacqueline alors même qu’ils n’avaient aucun problème. Si l’hypothèse était à envisager, où a-t-il trouvé l’arme et où se trouve l’arme ? A la barre hier, l’accusé a laissé entendre qu’il ne peut jamais commettre un crime pareil et qu’il n’a d’ailleurs jamais tiré. L’enquête de moralité lui est largement favorable. Il est décrit comme un personnage assez ouvert d’esprit et intègre. Le Nigérian en question a été appréhendé, mais il a été relâché par le magistrat instructeur faute de charge suffisante. Celui-ci avait laissé entendre qu’il n’était pas avec sa compagne le dimanche 19 et qu’il n’a d’ailleurs pas de véhicule.
20 ans pour le ministère public, infraction non constituée pour la défense
Le ministère public a établi le crime d’assassinat et requis contre l’accusé 20 ans de travaux forcés. Selon l’Avocat général, Robert Dadaglo, l’accusé a fait le choix de la dénégation pour se fabriquer un exutoire. Il a relevé l’intention coupable de la victime qui, selon lui, est le cerveau principal. La défense proteste affirmant que l’infraction n’est pas constituée. Selon Me Gabriel Dossou, l’accusation est fondée sur la supposition. Pas de preuve pour étayer la réquisition du Ministère public qu’il a contesté dans sa plaidoirie. Il a plaidé, au principal, l’acquittement pur et simple pour non constitution de l’infraction. Au subsidiaire, il a plaidé l’acquittement au bénéfice du doute. Au terme des débats, la Cour a condamné l’accusé Albert à 10 ans de travaux forcés. Elle a débouté le père de la victime qui a réclamé, au civil, 5 millions en guise de dommages et intérêts pour les frais d’enterrement de sa fille.