De nouveau, la plateforme électorale des Organisations de la société civile (Osc), fait part de ses préoccupations sur le processus en cours d’amendement de la Constitution. Elle appelle à un large débat sur les nouvelles propositions, et exige un scrutin qui respecte les principes démocratiques. Lire le communiqué.
Déclaration de la Plateforme électorale des Osc du Bénin sur les processus de révision constitutionnelle et du référendum
Notre pays le Bénin, connaît, depuis le 28 juin 2018, une nouvelle aventure de révision de sa Constitution du 11 décembre 1990. Contrairement aux tentatives vécues jusque-là, le processus initié par huit (08) députés de la majorité présidentielle a passé le cap de la prise en considération. Le processus de révision par voie parlementaire n’a pu cependant aller à son terme par défaut d’obtention de la majorité des 4/5 requise par la Constitution. De fait, s’est ouvert, depuis l’échec de la voie parlementaire le 05 juillet 2018, le processus référendaire pour la révision de la Constitution du 11 décembre 1990. .
Interpellée par la question du référendum comme pour toute élection, la Plateforme électorale des Osc du Bénin s’est réunie, dans un atelier tenu à Cotonou le 09 juillet 2018, pour échanger sur le référendum en perspective et faire des recommandations afin qu’il se déroule dans des conditions paisibles et transparentes.
A travers cette déclaration, la Plateforme veut, dans un premier temps, éclairer l’opinion publique nationale sur certains aspects du projet de révision, ensuite opiner sur le processus de révision tel que conduit par les députés et enfin, faire quelques recommandations pour un référendum paisible.
De quelques clarifications
A ce premier point, la Plateforme électorale voudrait éclairer une certaine opinion publique qui taxe la société civile d’avoir suscité l’actuel processus de révision de la Constitution du 11 décembre 1990. Il est vrai qu’une Coalition des Osc dénommée : « Maintenant la Cour des comptes », différente de la Plateforme électorale même si certaines Ong et Réseaux se retrouvent dans les deux, a démarré un plaidoyer pour une révision ciblée de la Constitution en vue de l’institutionnalisation de la Cour des comptes. Faut-il le rappeler, ce plaidoyer ne date pas d’aujourd’hui et a de tout temps été porté par de nombreuses voix et pas uniquement celles de la société civile. Cependant, les Osc coalisées pour le plaidoyer pour la Cour des Comptes n’ont retenu que ce seul point et n’ont pas du tout été associées à la proposition d’amendement déposée par les 08 députés le 28 juin 2018. Des points tels que l’alignement des mandats et l’organisation d’élections groupées, la peine de mort ou même encore la question de la promotion de la femme que comporte cette proposition des députés n’ont jamais été débattus au sein de la plateforme » Maintenant la Cour des Comptes « .
La Plateforme électorale des Osc se dissocie donc entièrement de la proposition d’amendement de la Constitution engagée par voie parlementaire.
De la conduite du processus de révision de la Constitution telle que faite par voie parlementaire
Ayant suivi avec attention le processus de révision tel que mené par les parlementaires depuis l’introduction de la proposition jusqu’au vote de refus d’adoption, la Plateforme :
– constate une certaine logique dans les résultats des deux (2) votes faits par les députés. En effet, il paraît logique que les 62 députés ayant voté la prise en considération de la proposition aient voté aussi les amendements proposés. De même, il semble tout aussi logique que les 19 ayant voté contre la prise en considération aient voté aussi contre les amendements proposés. Il aurait été, en effet, fort surprenant qu’il y en ait qui aient voté contre la recevabilité du texte et qui votent pour les amendements proposés et vice-versa ;
– déplore la conduite exclusivement parlementaire, sous fond de précipitation caractérisée par la célérité d’instruction du dossier et la procédure d’urgence choisie à l’issue du vote pour la prise en considération, empruntée par les députés sans association des autres acteurs, sans mise à disposition et mise en débat public du texte d’amendement. Une telle démarche est d’autant plus déplorée que les amendements proposés ne sont pas sans conséquences sur le dispositif électoral et démocratique hérité de la Conférence des Forces Vives de la Nation.
– déplore, d’une part, cette attitude des hommes politiques à mélanger aux préoccupations techniques consolidantes qui font l’unanimité des préoccupations politiciennes fortement discutables et, d’autre part, le choix, chaque fois d’un passage en force pour conduire les processus de révision de notre Constitution. Cet état de choses érode le crédit de bonne foi accordée aux dirigeants actuels, renforce la suspicion des populations et fait perdre au pays des occasions de révisions techniques de la Constitution qui permettront des avancées consolidantes de la démocratie et le progrès.
III. Du référendum et de quelques recommandations pour sa tenue paisible
Pour beaucoup de Béninois(es), ce référendum sera une première de leur vie de citoyen(ne) et une occasion particulière pour tout(e) Béninois(e) parce qu’il s’agit de la révision de notre Constitution, cette loi fondamentale pour laquelle tous(tes) les Béninois(e)s ont un attachement particulier. A cet effet, la Plateforme exhorte les acteurs politiques, tous les responsables des institutions concernées et le Chef de l’Etat en particulier, à faire les choses dans les règles de l’art afin que ce référendum soit pour tous(tes) un véritable moment de célébration et d’avancée de notre processus démocratique.
La Plateforme rappelle, par ailleurs, que le référendum est une élection et en tant que telle, doit respecter les normes sous régionales et nationales en matière d’élections. A cet effet, elle rappelle le Protocole de la Cedeao sur la démocratie et la bonne gouvernance et plus particulièrement son article 2 qui interdit toute modification des lois électorales six mois avant la tenue de l’élection concernée.
En tout état de cause, la Plateforme déconseille vivement toute précipitation et toute organisation bâclée qui seraient préjudiciables à notre démocratie.
Elle recommande :
– aux acteurs politiques :
le strict respect des dispositions de la loi référendaire, des délais légaux y contenus;
le strict respect de l’article 2 du Protocole A/SP1/12/01 sur la démocratie et la bonne gouvernance additionnel au protocole relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité;
la mise à disposition du public, et de manière officielle, du texte de proposition d’amendements ;
la publication officielle de la question du référendum ;
des débats d’idées et des débats constructifs autour des aspects d’amendements ;
– à la presse :
de jouer son rôle d’éducatrice de la population ;
de privilégier des informations objectives, équilibrées de nature à aider les populations à comprendre véritablement les enjeux du moment ;
– aux populations en général :
le calme et la sérénité ;
le strict respect des lois électorales en général ;
la veille citoyenne électorale habituelle afin que soient consolidés les acquis de notre démocratie.
Comme pour chaque élection, la Communauté internationale a les yeux rivés sur le Bénin. Ensemble, évitons d’entrainer notre pays dans un conflit électoral et faisons de ce référendum un mémorable moment de cohésion, d’unité et de paix.