Le chef de l’Etat béninois dispose d’une majorité à l’Assemblée nationale, vous dites ? A priori, oui ! Tout porte à le croire. Cependant, des ingrédients sont réunis pour qu’on en doute.
Trois dates, trois votes historiques au Parlement béninois à l’ère de la Rupture. Il s’agit du 4 avril 2017 avec le vote pour la recevabilité ou non du projet de révision de la Constitution, du 5 juillet 2018 avec le vote pour l’adoption ou non de la proposition d’amendement de la Constitution, puis en dernier ressort, du vote pour la levée d’immunité ou non de trois députés demandée par le Procureur de la République. Si les motifs ou objets ne sont pas les mêmes dans les trois cas cités, ils ont tout de même un élément commun. Le mode du scrutin. A main levée. Une option difficilement acceptée de tous, lors des grands enjeux politiques à l’Hémicycle. Et pour cause, beaucoup estiment que le vote exprimé par le député est su ou connu de tous. Il n’y a pas de discrétion et parfois on ne vote pas librement. On vote contre son cœur, par contrainte. Et le Parlement étant le lieu par excellence des intrigues et coups bas politiques, le ‘’Oui’’ ou le ‘’Pour’’ l’emporte souvent pour éviter la ‘’fatwa’’ de la part de celui dont on a affirmé, urbi et orbi, soutenir les actions. De part et d’autre, c’est-à-dire du côté du gouvernement comme de sa majorité à l’Assemblée, on ne dort pas sur ses lauriers malgré les assurances de la veille ou même à une seconde du vote. Et pour éviter la surprise amère pour le chef et son gouvernement, on opte pour le vote à main levée pour qu’éventuellement les judas se révèlent eux-mêmes. Qui peut oser dans ce cas aller contre le chef dont il dit soutenir les réformes ou actions ? En tout cas, c’est très rare, voire rarissime de voir ce schéma sous les tropiques et au Bénin, en particulier.
Parlant justement du Bénin, sous la gouvernance de Patrice Talon, le recours au vote à main levée sur des questions à enjeux devient fréquent. C’est quand même pour la première fois qu’un débat portant sur la loi fondamentale a passé le cap de la recevabilité en plénière ! C’est aussi la toute première fois dans l’histoire démocratique du Bénin, que des députés ont pu livrer leurs collègues à la justice en leur levant l’immunité parlementaire Mais la question que nombre d’observateurs ou analystes pourraient se poser est que cela a été fait à quel prix ?Ces dossiers pourraient-ils réellement prospérer si le vote avait été secret ? Patrice Talon peut-il se targuer d’avoir une majorité maîtrisée au Parlement ? Si la réponse était ‘’Oui’’, on pourrait alors se demander pourquoi alors on ne peut pas jauger le degré de confiance qu’on place en cette majorité en ‘’décretant’’ le vote secret ? Quand on observe bien, la confiance entre les deux institutions est loin d’être totalement établie. On ne se fait pas mutuellement confiance. Du moins, des soutiens de façade. Et ces signes prouvent à suffisance que le chantre de la Rupture/Nouveau départ danse, peut-être bien, mais sur du sable mouvant.