Le Bénin, quartier latin de l’Afrique, a perdu depuis quelques décennies, les marques de compétence et d’excellence qui lui furent reconnues dans la sous-région, en Afrique et ailleurs dans le monde. Outre quelques exceptions près, les Béninois ne s’imposent plus de part leur compétence dans le monde. Une baisse drastique de niveau, qui trouve ses racines dans les systèmes éducatifs adoptés et la qualité des enseignants recrutés. Faute de formation adéquate, ces derniers n’ont pas réussi à inculquer le savoir aux jeunes générations, comme ce fut le cas dans un passé plus ou moins lointain. Il suffit d’un petit entretien ou de lire l’écrit d’un enseignant, pour se rendre compte de l’ampleur de la catastrophe. Là où la situation préoccupe le plus, c’est qu’il s’agit de la maternelle et du primaire. Le premier niveau du système éducatif où, les enfants sont censés avoir une base solide avant d’atteindre les cours secondaires et par la suite, le supérieur. Une situation qui inquiète et suscite plusieurs interrogations surtout quand on sait que l’avenir d’une nation dépend de l’éducation et de la formation de ses fils.
En vue de remédier à la situation et de prendre des dispositions pour redorer le blason de l’école béninoise, le gouvernement du président Patrice Talon a initié une évaluation en juin dernier. Cette évaluation vise à jauger le niveau d’études des enseignants de la maternelle et du primaire et à engager des actions pour les rendre plus professionnels. Une action salvatrice que les enseignants ont accueillie avec peur et réticence. Après les agitations de premières heures, ils se sont quand même rendus dans les centres de composition le 16 juin 2018, pour se faire évaluer.
Mais en raison de l’insuffisance des épreuves dans certains centres, de la mal compréhension dans la définition du groupe cible, de certains cas de maladie, des doublons sur les listes d’émargement et du retard dans la confection des codes anonymats, le gouvernement a décidé de la reprise de l’évaluation afin de garantir à tous, des critères équitables de composition ce samedi 28 juillet 2018. Un principe adopté par le pouvoir en place dans l’organisation des concours et divers examens.
Cette décision de reprise de l’évaluation n’a pas été du goût des enseignants qui, comme annoncé par certains de leurs syndicats, ont opté pour le boycott. Se pose alors une question : Pourquoi les enseignants ont boycotté l’évaluation ?
Un regard rétrospectif permet de se rendre compte, il y a quelques années, d’un manque criard d’enseignants pour encadrer les enfants. Ce déficit de maîtres a provoqué dans plusieurs écoles publiques du pays, la pratique de jumelage de classes. Un enseignant pouvait avoir l’encadrement soit, du CI et du CP, du CE1 et du CE2 ou du CM1 et du CM2. Dans certains établissements, des écoliers passaient toute une année à ne rien faire, faute d’enseignant. D’où le recrutement des contractuels locaux, titulaires pour la plupart du Brevet d’études du premier cycle (Bepc) et n’ayant aucune formation professionnelle. Le chômage allant grandissant, beaucoup de jeunes en quête d’emploi ont envahi le secteur de l’éducation afin de se garantir un revenu.
Les recrutements opérés dans le temps ont été faits par des directeurs d’écoles. Ceux-ci, selon les besoins, faisait appel à des jeunes du milieu pour pallier au déficit. Des enquêtes de terrain ont révélé que certains n’ont même pas le Bepc.
Appelés à constituer les dossiers pour être reversés, ils ont fait usage de faux diplômes. Des faits qui, révélés au grand jour, vont leur coûter chers au regard de la lutte engagée par le régime de la Rupture contre les détenteurs de faux diplômes dans l’administration publique.
Face à ce tableau très peu reluisant de l’école béninoise, et la volonté du gouvernement à évaluer les enseignants en vue de les rendre plus professionnels et le boycott qu’opposent ces derniers aux évaluations, se pose une question fondamentale. « De quoi les enseignants ont-ils peur ? ».