La promotion des cadres de l’Administration béninoise donne lieu de plus en plus à des occasions de discours teintés de marques allant à l’encontre des habitudes. Des cadres avec ou sans histoires parfois, promus à des postes de responsabilité, se découvrent soudainement, des talents d’orateur au cours de grandes messes de remerciement, où dans le discours, l’on ne perd pas de temps pour verser dans une rhétorique propre à donner la chair de poule.
La chose n’est plus nouvelle. Elle est connue. Ces discours qui, de plus en plus foisonnent et créent une scission tacite entre les différentes communautés du Bénin. Hier, sur des chaines de télévision, l’on pouvait suivre le reportage d’une manifestation publique organisée par un ministre de la République, pour dit-il, remercier le chef de l’Etat pour sa nomination. Et cette manifestation, il l’a organisée au milieu des siens. C’est-à-dire, ceux de sa région natale. Parents, amis, collègues et personnalités de rangs considérables, tous assis, pour aller dans le même sens que lui : remercier le chef de l’Etat, le président de la République, celui là qui a jugé opportun de promouvoir l’un des fils de leur région. L’un des intervenants au pupitre ne cachera pas d’ailleurs toute son émotion à cet effet. Il remercie carrément le chef de l’Etat qui, de plus en plus, selon lui, promeut les fils de sa « communauté ».
Ainsi, le plaisir de voir un compatriote promu, semble n’être trouvé que lorsqu’on partage avec lui la même provenance régionale. L’on fête la promotion du fils du terroir, et rare d’ailleurs sont les fois où au cours de ces manifestations, l’on ne parle des défis qui l’attendent dans le cadre de sa nouvelle fonction. Rare sont les fois où l’on pense à la nation. Le nouveau promu occupe une fonction pourtant d’envergure nationale. Il doit servir des peuples, formant un peuple, celui béninois. Quel message passe t-on, lorsqu’on organise dans ce contexte, une manifestation publique pour remercier le chef de l’Etat, le garant de l’unité nationale, sans aucune retenue dans le discours politique, en magnifiant les origines natales ?
Et la politique perd son vrai sens
Les autres Béninois des autres régions du pays, n’ayant pas les leurs promus dans le gouvernement, ou à un niveau de responsabilité élevée, à qui iront-ils se plaindre ? En effet, le développement d’une commune ou d’une région, semble désormais lier à la promotion des cadres natifs de ces parties du Bénin. Ou à tout le moins, que ces cadres soient du même bord politique avec le pouvoir exécutif. Les discours tenus par certains récents transhumants politiques attestent cette thèse.
De plus, à travers ces manifestations, se dessinent clairement une tendance. Celle du fils du terroir promu, de ne promouvoir lui à son tour, que ceux qui viennent de la même région que lui. Les soutiens circonstanciels de ces manifestations de remerciement ont ainsi un intérêt à défendre, en montrant leur dévouement spontané et sans condition aux côtés de leur frère élevé en rang. Puisque, s’ils le font bien, ils seront peut-être les premiers collaborateurs nommés du promu. Les résultats, sont d’ailleurs déjà visibles. Les témoignages existent. Chaque nouveau ministre, chaque nouveau directeur,…nommé, très souvent, arrive avec ses propres collaborateurs, ceux provenant de sa région natale. Plus de raisons donc d’être surpris, quand éclatent les scandales. Les promus avaient déjà la tête tournée vers leur ventre aux premières secondes de l’annonce de leur promotion. Que cherchera la Nation dans leurs préoccupations, si ce n’est du bout des lèvres !