Les membres de l’Observatoire de la déontologie et de l’éthique dans les médias (Odem) se sont réunis en séance plénière le mercredi 22 août 2018 au siège de l’institution pour examiner, entre autres points, des plaintes de citoyens contre des organes de presse. Pour ce qui concerne Matin Libre, il s’agit de l’article ‘’Dossier Fnm…’’ publié il y a quelques mois. Après analyse de la publication, le Tribunal des pairs (Odem) a décidé de la condamnation du journal « pour violation du code de déontologie ». Lire l’intégralité de la décision.
DECISION N° 93/08/ODEM 7
Par une correspondance en date du 3 mai 2018, Monsieur Cosme F. GOUNDETE, expert-comptable, commissaire aux comptes et membre de l’Ordre des experts comptables et comptables agréés du Bénin a saisi l’ODEM d’une plainte pour diffamation contre le journal ‘’Matin Libre‘’
LES FAITS
Dans sa parution N° 897 du vendredi 2 mars 2018, le journal ‘’Matin Libre’’ a publié à la une en premier titre un article intitulé : ‘’Dossier FNM : Protégée par l’OEC une grosse débitrice en liberté’’
A la page 5 il est publié sous la rubrique Economie, un article surtitré Microfinance, dossier FNM et portant le même titre.
Quelques extraits :
‘’…Du conflit d’intérêt à l’impunité du Cabinet Canal Audit non perçus par le Procureur de la République dans le dossier d’audit politique du FNM?…’’
‘’… Le juge chargé du dossier FNM ne devrait-il pas délivrer un mandat de dépôt contre Cosme F GOUNDETE (…) et Alain T. T. AGNIKPE pour « faux et usage de faux et complicité » ? ‘’…’’
‘’… Au regard de tous les points soulevés dans ce dossier, il est aisé de comprendre toute la supercherie autour de ce dossier…’’
Le journal aborde le même sujet dans les parutions suivantes : 902 du 9 mars 2018, 903 du 12 mars 2018, 904 du 13 mars 2018 et 907 du 16 mars 2018.Dans cette dernière l’intégralité du droit de réponse a été publié.
Le plaignant mentionne dans sa plainte que le journal Matin Libre ne s’est jamais rapproché de lui pour avoir sa version avant de publier des articles sur lui. Il affirme qu’il ne se reconnait nullement en ce qu’il qualifie d’’’ Allégations publiées dans plusieurs parutions dudit journal.’’ Dans sa plainte il indique que le contenu desdits articles, est diffamatoire et porte gravement atteinte à son honneur et à sa considération.’ Monsieur Cosme F. GOUNDETE poursuit :’’ Le plus grave est que le journal Matin Libre n’a pas daigné, dans un premier temps publier l’intégralité du droit de réponse que je lui ai adressé. Il a fallu que je le somme par exploit d’huissier avant que l’intégralité ne soit publiée. ’’
DE L’INSTRUCTION
Conformément à l’article 16 de son Règlement intérieur, l’ODEM a saisi le Directeur de Publication du journal «Matin Libre» par la correspondance n° 063 /ODEM 7/SG/PDT en date du 5 juin 2018, afin qu’il apporte les preuves de ses écrits.
Dans sa réponse à l’ODEM en date du 11 juin 2018, le Directeur de publication du journal «Matin Libre» Maximin TCHIBOZO, a reconnu que dans plusieurs de ses parutions le journal a publié des écrits sur le Fonds National de Microfinance(FNM) dans lesquels le nom du Sieur Cosme F. GOUNDETE a été cité plus d’une fois. Pour répondre aux préoccupations de l’Observatoire il a suivi une démarche en sept points faite d’affirmations et de pièces jointes avant de conclure que le Cabinet Canal Audit a conduit l’audit aux FNM avec légèreté et des manquements graves à l’éthique et à la déontologie de la profession d’Expert-Comptable. ’’Nous sommes d’ailleurs surpris que ce soit le Sieur Cosme GOUNDETE lui-même qui a signé cette plainte’’
Conformément à ces textes, l’ODEM a transmis la réponse du Directeur de publication de Matin Libre au plaignant pour que ce dernier puisse exercer son droit de réplique. Il fait observer que le Directeur de publication du journal ‘’ Matin Libre’’ persiste dans l’amalgame en assimilant la situation débitrice de l’association AssEF à celle du couple AGNIKPE et qu’il évoque vaguement les normes internationales sans en donner aucune précision.
Dans une autre correspondance en date du 24 juillet 2018, Monsieur GOUNDETE précise qu’au lieu d’apporter des preuves claires, le journal continue d’insinuer que le cabinet Canal Audit aurait réalisé un « audit politique » au FNM, sans en apporter la moindre preuve du caractère politique de cet audit.
APPRECIATION
A l’analyse de cette publication, l’ODEM constate que :
Le journal n’a pas daigné confronter les informations reçues avec la part de vérité du plaignant.
Le journal s’est opposé dans un premier temps à publier le droit de réponse de la personne objet de ses écrits.
Le journal fait des jugements de valeur sur l’activité du cabinet d’audit en se basant sur le rapport de son travail s’en en être un spécialiste et sans faire référence à l’expertise nécessaire qui déprécie valablement et légalement le travail du cabinet d’audit.
DE LA DECISION
Par ces motifs, l’ODEM condamne le journal ’’Matin Libre’’ ainsi que son Directeur de publication Monsieur Maximin TCHIBOZO pour violation des articles suivants du Code de déontologie de la presse béninoise:
Article 2 alinéa 1 et 2 : « Le journaliste publie uniquement les informations dont l’origine, la véracité et l’exactitude sont établies.
Le moindre doute l’oblige à s’abstenir ou à émettre les réserves nécessaires dans les formes professionnelles requises ».
Article 6 : « Le journaliste s’interdit le plagiat, la calomnie, la diffamation, l’injure et les accusations sans fondement ».
Article 20 : ‘’Tout manquement aux dispositions du présent code de déontologie expose son auteur à des sanctions disciplinaires qui pourront lui être infligées par les instances d’autorégulation des médias et les associations professionnelles.
Le journaliste accepte la juridiction de ses pairs, ainsi que les décisions issues des délibérations des instances ci-dessus mentionnées.
Le journaliste s’oblige à connaître la législation en matière de presse.’’
Par ailleurs, l’ODEM condamne, ‘’Matin Libre’’ à publier la présente décision conformément à l’article 31 alinéa 1er de ses Statuts qui précise : « Lorsqu’un média est concerné, la décision prise à son encontre doit être publiée par celui-ci, et reprise par les autres organes du paysage médiatique béninois, qu’ils soient publics, privés, audiovisuels ou écrits. »