Les députés devraient examiner dans les prochains jours, des textes réorganisant le Conseil économique et social (Ces) et l’Assemblée nationale. Mais quel intérêt y-a-t-il à programmer ces grandes réformes en fin de législature? Une nouvelle manœuvre de la Rupture pour affaiblir les institutions?
Le Ces et le Parlement devraient être au cœur de la deuxième session ordinaire de 2018 de l’Assemblée nationale. Le projet de loi portant loi organique sur le Ces et la proposition de résolution portant révision du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale sont aussi en effet des points inscrits à l’ordre du jour de la session budgétaire qui s’est ouverte la semaine écoulée. Et quand on fait une analyse rigoureuse des faits, on constate que la réforme sur le Ces qui n’avait pas abouti en 2017 à cause de l’échec du projet de révision de la Constitution sera à nouveau au centre des débats parlementaires. Comme le soulignent plusieurs observateurs, c’est sans doute la révision de la Constitution du 11 décembre 1990 qui continue de se faire par ‟pièces détachées”. En 2017, certains voulaient faire disparaître complètement le Ces. Mais avec le temps, ils ont dû comprendre et accepter l’importance de l’institution dans la vie socio-économique du pays. Si pour le moment, le projet de loi portant loi organique sur le Ces n’est pas encore rendu public, on peut tout de même souligner que le gouvernement et ses députés du Bloc de la majorité présidentielle (Bmp) pourraient être tentés de réduire les attributions de l’institution ainsi que son influence sur la politique du gouvernement. Car, on a bien comme impression que l’Exécutif dirigé par Patrice Talon est décidé à éliminer tous les obstacles, quelles que soient leurs tailles, se dressant sur son chemin. Quant au règlement intérieur de l’Assemblée nationale, beaucoup s’étonnent de découvrir une proposition de résolution visant à le réécrire. Et ils ont peut-être raison puisque depuis 1991, le Parlement n’a pas connu de crise majeur dans son fonctionnement pour nécessiter une réforme aussi importante. Pourquoi veut-on retoucher le règlement intérieur du Parlement? Veut-on faire évoluer le débat sur l’importance des secrétaires parlementaires dans le fonctionnement du Parlement quand on sait qu’en 2014 plusieurs séances de l’Assemblée nationale avaient été reportées à cause de l’absence de ces derniers? Pourquoi a-t-on jugé nécessaire d’engager une telle réforme alors qu’on est en fin de législature? Ou bien, les députés du Bmp comptent-ils affaiblir le Parlement et lui arracher certaines de ses prérogatives pour faire plaisir au Chef de l’Etat? Ces députés veulent-ils affaiblir le Parlement au point de rendre la prochaine législature inoffensive et moins exigeante vis-à-vis du gouvernement quelle que soit sa configuration politique? On observe à tout le moins que le régime actuel est bien décidé à changer l’architecture institutionnelle installée depuis 1990 pour se faire passer pour un réformateur. Mais certaines réformes souhaitées et engagées comportent des risques énormes pour la démocratie. Et puis, quand on sait la façon dont fonctionne la présente législature, notamment les députés du Bmp qui votent sans réfléchir des lois à polémiques depuis 2016, il y a de quoi s’interroger sur ce que le Parlement réserve au peuple béninois par rapport à ces deux points inscrits à l’ordre du jour de la session ordinaire en cours.