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Au sujet du non-respect du double degré de juridiction par la Criet : Ce qu’en dit Me Jacques Migan

Publié le mercredi 31 octobre 2018  |  Matin libre
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© aCotonou.com par Didier Assogba
Me Jacques Migan, Porte parole du collectif des avocats de Sébastien Adjavon dans l`Affaire de cocaïne.
Cotonou, le 02 Novembre 2016. Affaire de cocaïne, l`ambiance à la brigarde territoriale de Cotonou.
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Les récriminations dans l’opinion sur la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) ne tarissent pas au Bénin. A tort ou à raison, qu’on soit professionnel de la justice ou non, chacun y va de ses arguments. Sur la structure elle-même et sur son non-respect du double degré de juridiction, Me Jacques A. Migan, ancien Bâtonnier, acteur politique membre du Bloc Progressiste soutenant les actions du Pouvoir Talon, apporte des éclaircissements.

Maître, certains citoyens estiment que l’institution de la Criet ne permet pas la réalisation du droit à un procès équitable. Qu’en dites-vous ?

Monsieur le journaliste, dans un Etat de droit, la justice est la même pour tout le monde, car l’égalité en droit suppose l’égalité devant la justice. Et l’équité du procès suggère la mise en œuvre des garanties comme par exemple, le respect du principe du contradictoire, le jugement des affaires dans des délais raisonnables, le respect du double degré de juridiction. Certaines juridictions en raison de leur nature particulière ont un régime dérogatoire au droit commun. C’est le cas de la Cour de Répression des Infractions Economiques et du Terrorisme sur certains points comme la compétence territoriale nationale etc …Mais elle permet de juger les infractions qui rentrent dans son champ de compétence avec efficacité.

Tenez, de 2013 à 2017, il y a eu 608 cas de poursuite de trafic de stupéfiants, soit plusieurs tonnes de drogue, ce qui fait du Bénin la plaque tournante du trafic de drogue. De même, les deniers publics détournés au profit de certains privilégiés des Anciens Régimes ou par des élus locaux s’élèvent à des dizaines de milliards de Fcfa. Ces détournements auraient pu contribuer à la construction d’infrastructures et servir au bien-être économique et social de nos concitoyens.Ce qui justifie la création de la Criet pour juger toutes ces formes de délinquances récentes dans le cadre bien entendu, de procès équitable.

Monsieur Jacques Migan, est-ce cette efficacité qui fait de la Criet une Cour spéciale ?

Non, pas fondamentalement. En procédure pénale, il y a les juridictions de droit commun et les juridictions particulières que sont les juridictions spéciales et les juridictions d’exceptions. La juridiction spéciale concerne tous les individus pour une catégorie d’infractions, comme la CRIET, alors qu’une juridiction d’exception concerne certaines personnes en raison de leur qualité pour certaines infractions, telle la Haute Cour de Justice.La Criet est une juridiction spéciale créée par la loi conformément aux dispositions de l’article 98 tiret 6 de la Constitution. Il s’agit d’une juridiction à compétence nationale, à laquelle est affectée la répression des crimes de terrorisme et des infractions à caractère économique tels que prévus par la législation en vigueur.

Quid du non-respect du double degré de juridiction qui est la critique fondamentale adressée à la Criet ?

Formellement, le législateur béninois pour faire juger les délinquants des infractions économiques et du terrorisme n’a pas créé un tribunal de 1ère instance. Il a créé directement une Cour de répression contre les infractions économiques et du terrorisme. Cela ne signifie pas une exclusion totale du double degré de juridiction puisque sur la base d’un pourvoi, il existe une possibilité d’évocation de l’affaire à la suite de la décision rendue par la Criet. Ce faisant, le législateur béninois a laissé ouverte la voie du pourvoi en cassation selon les règles de droit commun du code de procédure pénale.Tous les arrêts rendus par la Criet sont susceptibles de pourvoi, avec cette précision qu’un pourvoi formé contre un arrêt rendu par défaut ne peut se faire qu’après l’expiration des délais d’opposition conformément aux dispositions du code de procédure pénale béninois. Or, en cas de pourvoi dans notre droit, soit le juge de la Cour Suprême rejette le pourvoi, soit il l’accepte. Quand il juge le pourvoi recevable, il peut casser purement et simplement la décision rendue par la Criet et renvoyer l’affaire devant la juridiction habilitée à la connaître à nouveau. Cette nouvelle juridiction, c’est-à-dire la Criet autrement composée examine à nouveau l’affaire en fait et en droit suivant la ligne juridique ou l’interprétation donnée par le juge de la Cour Suprême. Cette possibilité d’évocation et de jugement en fait et en droit par la juridiction habilitée est une extension du double degré de juridiction.



Propos recueillis par Matin Libre
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