Dans une lettre ouverte qu’il vient d’adresser à l’honorable Claudine Prudencio, présidente de l’Union démocratique pour Bénin nouveau (Udbn), Pascal Bossou Adjinsou-Makabi, instituteur de classe exceptionnelle à la retraite, salue sa brave décision de constituer en seul bloc son parti pour prendre part aux prochaines élections législatives. «Ton courage à dire au chef que tu ne te sentiras pas bien dans ces marigots de caïmans qu’ils appellent des ‘’blocs’’ est la preuve que tu es vraiment un produit de Emile Derlin Zinsou qui ne sait pas vendre son âme pour de la peccadille » a –t-il écrit, entre autres. Lire ci-après l’intégralité de ladite lettre.
Lettre ouverte à Claudine Prudencio
Présidente de l’Union démocratique pour un Bénin Nouveau (UDBN)
Claudine, ma fille,
Je voudrais me permettre de te tutoyer publiquement dans la présente lettre ouvertebien que tu ne me connaisses pas. J’aurais pu te joindre par d’autres voix plus discrètes pour te faire part de mon admiration pour toi et du contenu de cette lettre que je rends ouverte, mais j’ai souhaité volontairement le faire ainsi en usant du canal des médias. Mon objectif est de partager aussi largement que possible cette admiration et ce respect que j’ai pour une femme de grande valeur et de grand mérite comme toi. J’ose croire que tu m’accordes tes excuses pour ne t’avoir pas tout au moins faire part de son contenu que tu découvres comme tous les Béninois. Mais considère mon comportement comme celui d’un père qui réserve une surprise agréable à son enfant qui réussit brillamment à un examen et qui fait non seulement honneur à ses parents, mais à une famille, un village, une commune, un pays.
Oui, Claudine tu fais honneur à mon pays. Tu me rappelles les plus grandes figures féminines dahoméennes du lendemain de la seconde guerre mondiale, précurseurs de l’incursion des femmes en politiques dans les premières années des indépendances (les années 60). En toi je vois se réincarner tes aînées comme Conforte ADIN, Justine BEHANZIN, etc. Cette Justine qui fut l’exemple de la femme intrépide et active en politique, la voix de l’audace et de la ‘’rébellion’’, celle qui ose faire face au Chef et dire ‘’Non’’. Vos destins semblent être similaires. Car j’ai entendu dire que toi, Claudine, tu t’es très tôt familiarisée avec la politique grâce à ton oncle Emile DerlinZinsou. Or Justinea été initiée à la politique par son père qui l’amena à sa première réunion secrète alors qu’elle n’avait que 12 ans. A cette époque (les années 1920 et 1930) où les velléités nationalistes étaient réprimées, son père et ses camarades militants avaient fait d’elle une émissaire. Elle transmettait à Abomey, Lokossa ou Porto-Novo, des messages qui étaient publiés dans la voix du Dahomey, un journal nationaliste. Opposante au Président Maga, Justine Béhanzin a su faire preuve de dignité en rejetant, en 1961, l’offre d’un poste de ministre de la santé. Elle estimait qu’en acceptant ce poste, elle se coupait automatiquement de sa base. «J’ai préféré vivre dans la masse, le temps de faire émerger au plan national la voix des femmes», avait-elle argumenté. Inutile de faire le rapprochement entre ta combativité et celles de MesdamesBalley et RafiatouKarimou qui ont su s’imposer dans la marmaille masculine qui domina l’intermède révolutionnaire de notre pays. Elles ont su faire preuve de courage et d’endurance en imposant parfois leurs idées avec tous les risques de croques en jambes et de sabotage propres à nos réalités socio-politiques depuis 1946. Si Rosine Vieira Sogloa pu garder très haut ce flambeau de femmes de courage et d’audace dans les premières années du renouveau démocratique par son leadership, tu me fais l’honneur de montrer que les femmes sont encore les gardiennes du temple de la démocratie et de l’Etat de droit au Bénin. Mon administration pour vous n’est pas fortuite et dénudée de tout intérêt personnel. Je n’ai eu dans ma vie que des filles qui ont toute réussi sur le plan scolaire et professionnel. Leur engagement et leur croyance en leur capacité propre à faire autant que les hommes ont fait de moi un père béni et heureux. Malheureusement, elles n’ont porté aucun intérêt pour la politique.
Claudine, depuis le dernier congrès de ton parti, je scrute l’horizon politique et, chaque jour, je me retrouve à m’interroger sur ce que les expériences de certains leaders politiques ont apporté à la démocratie béninoise. J’ai bien l’impression qu’au soir de leur vie, ils se rendent compte du gâchis qu’ils ont été pour le Bénin par leurs conflits de clochers et leur avidité pour les intérêts personnels. Après avoir saboté et relayé à l’inutile l’intérêt général des Béninois, ils agissent comme un pécheur qui, au soir de sa vie, s’adonne à des œuvres caritatives pour se donner l’espoir de bénéficier de la clémence de Dieu. Ils se sont engagés dans une course contre la montre pour réparer leur tort. Mais comme à l’accoutumée, entre ruse pour le mal et l’intelligence pour le bien, il y a un grand faussé. Ils ne savent pas par quels moyens corriger le climat de désordre et de chaos politique qu’ils ont créé depuis 1990. Alors qu’ils sont déjà K.O., ils s’embourbent dans la volonté du Président de la République de faire des réformes politiques qui s’imposent sur les principes. Cela justifie certainement leur ralliement, les queues entre les jambes sans le toupet de dire au Chef ses erreurs et sa mauvaise lecture de la politique béninoise et des réalités de la sociologie politique béninoise. C’est normal que le Président Talon se trompe, c’est son droit. Et d’ailleurs, un Chef qui ne se trompe pas n’est pas un bon chef. Il appartient à ceux qui sont proches de lui et qui le soutiennent de lui dire ses erreurs et de lui faire des propositions convenantes. Je me réjouis de ton audace de montrer souvent la voie à suivre à tous ces « grands garçons » sans couilles et de mauvaise volonté et de savoir dire au Chef ce qui n’est pas bon et ce qui ne te sied pas. Ton courage à dire au Chef que tu ne te sentiras pas bien dans ces marigots des caïmans qu’ils appellent des ‘’blocs’’ est la preuve que tu es vraiment un produit de Emile DerlinZinsou qui ne sait pas vendre son âme pour de la peccadille. Tu es la vraie image de cette Rosine Soglo qui déballe et dégaine quand c’est mauvais. Mais tu sais le faire avec la manière. Ta sagesse et ta témérité empreintes de sincérité doivent être en réalité un gage de confiance pour le Président Patrice Talon.
J’ose croireque Patrice Talon saura faire la revue de la troupe pour identifier que tu es en réalité la loyauté, la franchise et le vrai soutien face aux prédateurs et aux charognards qui attendent qu’ils tombent dans ses propres pièges ou ceux qu’ils lui tendent, pour s’occuper de sa carcasse quand l’opposition aura dévoré son cadavre.
Je t’encourage à rester ce que tu es, à rester toi-même et à continuer. Tu es l’espoir de ce peuple et que les jeunes et les femmes soient véritablement ton appui et ton socle. Va et que les esprits de nos ancêtres t’inspirent dans la direction où tu t’es engagée et que ce que femme pense, Dieu exauce.
Bonne chance ma fille et que le succès t’accompagne.
Pascal Bossou ADJINSOU-MAKABI, Instituteur de classe exceptionnelle à la Retraite, Téléphone 94 94 89 49, Abomey-Calavi