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Art et Culture

Souvenir des amazones du Dahomey: Ces héroïnes dont les échos retentissent

Publié le mercredi 14 novembre 2018  |  La Nation
Bicentenaire
© aCotonou.com par Didier Kpassassi et Didier Assogba
Bicentenaire du roi Guézo,le roi Guézo est à l’honneur à travers différentes manifestations prévues pour le compte de la commémoration de son bicentenaire d’intronisation
Abomey le 07 NOvembre 2018. Cérémonies du Bicentenaire du roi Guézo à Abomey
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Résistance, fermeté et bravoure. Ce sont, entre autres, les qualités qui caractérisaient les amazones du Dahomey, actuel Bénin. Puissantes guerrières,elles détruisaient tout sur leur passage. Leur résistance face à l’armée coloniale française en dit long. Des siècles après, leurs empreintes démeurent. Souvenirs et témoignages des femmes leaders d’aujourd’hui en l’honneur de ces figures dont la bravoure défie tous les clichés sur les femmes.

Rien qu’à l’évocation de leur nom et, l’on éveille les émotions. Beaucoup de femmes et d’hommes leur vouent admiration et respect pour leur bravoure, leur sens de citoyenneté et leur esprit de sacrifice suprême. Les amazones du Dahomey représentent tout un symbole, des valeurs ! Véritables guerrières, elles ont marqué leur temps. La démarche énergique, le crâne rasé soutenu par un bonnet portant le sceau d’un caïman, le visage grave, ces guerrières étaient redoutées pour leur dextérité et leur robustesse.

Très vaillantes, elles savent résister à tout. Elles ne reculent devant aucun danger : la patrie ou la mort face à l’ennemi. Ce sont de braves femmes engagées, loyales, patriotes et combattantes.
« Les amazones, un corps d’élite de femmes noires, africaines, combattantes, créé à une époque de l’histoire de l’humanité où la femme continuait d’être considérée à peine comme un être humain, pour ne pas dire un objet sans personnalité juridique, c’est une réalité historique indéniable dans le royaume du Danhomê qui a évolué vers la République du Bénin », se souvient Claire Houngan Ayémona, ancienne ministre de la Famille.
Intrépides et courageuses, ces femmes se sont démarquées par leur charisme et leur capacité à conduire les missions délicates.
Selon Me Huguette Bokpè Gnacadja, « la création du corps des amazones symbolise un acte de valorisation des compétences professionnelles de la gent féminine posé par une femme, en l’occurrence la reine Tassi Hangbé, sœur du roi Akaba, au début du XVIIIe siècle ».

Traces ineffaçables

Aujourd’hui encore, les amazones demeurent plus vivantes que jamais, présentes dans les cœurs et mémoires. Les traces de leur combat sont restées ineffaçables. Corps de guerrières de l’armée dahoméenne constitué sous le règne du roi Akaba, elles se sont révélées à la patrie et à d’autres nations par leur force, leur courage et leur bravoure à aller au combat. Leur nombre avoisinait les 4000. Leur mission : assurer la sécurité du roi, du royaume et en allant au front au même titre que les hommes.
« Durant les règnes d’Agadja, de Glèlè et de Gbéhanzin, les femmes soldates ont assuré la garde rapprochée de ces trois rois, ce qui témoigne de l’importance qu’elles revêtent et de la confiance dont elles étaient créditées quand bien même, elles devaient obéissance totale au roi », apprécie Me Huguette Bokpè Gnacadja.
Ces héroïnes ont constitué le fer de lance de l’armée dahoméenne. « Souvent placées en première ligne lors des assauts, elles étaient les premières à périr », se souvient-elle.
Aussi imprégnée du parcours des amazones que les précédentes, Mireille Agossou, femme leader renchérit : «Elles combattaient comme les hommes et excellaient dans l’espionnage, le camouflage ou l’infiltration ».
Corps militaire entièrement féminin constitué à la fin du XVIIe siècle, ces guerrières étaient vouées aux métiers des armes toute leur vie et condamnées au célibat.On faisait recours à elles pour combler les pertes en vie humaine dans les rangs des hommes.
En fait, en cette période, beaucoup de guerriers mouraient sur les champs de bataille. Il fallait donc combler le vide. Les amazones étaient bien indiquées pour assurer la mission. Et elles n’avaient jamais démérité.
Elles étaient soumises à des exercices physiques réguliers et excellaient dans le maniement des armes. Leur physique renseigne sur le type d’individus qu’elles incarnaient.
Félix Iroko, professeur d’histoire, renseigne en 2014 « qu’on leur coupait le sein droit afin de leur permettre de bien tirer leurs arcs ; c’était des femmes vierges, d’un engagement et d’une bravoure remarquables ».
Le parcours des amazones est extraordinaire et contraste avec le rôle habituel dévolu à la femme. « Les amazones ne se contentent pas du rôle reproductif que leur confère la société, mais jouent aussi un rôle productif. Elles sortent de l’ombre pour venir au-devant de la scène », apprécie Mireille Agossou.
Ces femmes savaient bien prendre le devant des choses et anticiper sur des situations. « Avant d’aller au front, elles se protégeaient contre les mauvais esprits et les balles des ennemis avec des amulettes », explique Félix Iroko. Leur engagement n’était pas toujours un choix délibéré. La décision peut venir du roi. Dans ce cas, on devient amazone parce que désignée par ce dernier ou par conversion d’une peine capitale à laquelle est condamnée l’assujettie.

Servir les desseins d’un Etat libre

26 octobre 1892. Les soldats français marchent sur le Dahomey. Ils réussissent à décimer les premiers guerriers envoyés par le roi Guézo. A 50 km environ d’Abomey, ils seront confrontés à une autre armée constituée uniquement des amazones. Munies d’armes blanches, celles-ci ne céderont pas facilement à l’acharnement de l’ennemi. La bataille dure des heures. Le détachement français, bien qu’impressionnant de par son effectif, ne s’est pas tiré facilement d’affaire.
Le général Alfred Amédée Dodds, à la tête des 3000 soldats français aurait décrit « cette journée comme la plus destructrice de sa campagne ». Hélène d’Almeida Topor, auteure de ‘’Les Amazones, une armée de femmes dans l’Afrique précoloniale’’, indique que « ces femmes-soldats étaient nées pour servir les desseins d’un Etat libre ; leur organisation ne survit pas à la disparition de la liberté ». L’existence de ces héroïnes, selon l’auteure, démontre que dans n’importe quel contexte, un conditionnement bien conduit l’emporte sur tous les préjugés socioculturels.
Combien sont-elles encore aujourd’hui à se donner corps et âme à la République ? Les temps ayant évolué, les femmes de la trempe des amazones, le Bénin n’en compte certainement que quelques-unes.

Maryse ASSOGBADJO
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