Le ministre de la Justice a appelé hier 10 décembre 2018 à la défense des droits de la personne à l’occasion de la célébration de la journée internationale des Droits de l’homme. Une position qui parait plutôt curieuse vu la situation de restriction systématique des libertés individuelles et collectives imposée depuis peu au Bénin. Me Sévérin Quenum se serait bien trompé de discours.
Le ministre de la Justice, Sévérin Quenum vit-il la même la réalité que les Béninois? Le discours qu’il a fait hier lundi dans le cadre de la commémoration du 70ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme tient-il vraiment compte de la situation qui prévaut actuellement au Bénin? Sa déclaration étonne en tout cas plus d’un. « Nous devons défendre nos droits et ceux des autres. Nous pouvons agir au quotidien pour défendre les droits qui nous protègent tous et ainsi promouvoir l’appartenance de tous les hommes à la famille humaine», a-t-il en effet laissé entendre. Pour lui, des progrès ont même été enregistrés dans la lutte que mène le gouvernement du Bénin dans le cadre de l’amélioration des conditions de jouissance des droits de l’homme. Des propos qui décrivent tout le contraire de ce qui vit le Béninois. On pourrait dire qu’entre l’idéal peint par le Garde des Sceaux et la réalité, c’est comme le jour et la nuit. Le Bénin vit en fait un drame depuis le 06 avril 2016. Aucun défenseur des droits de l’homme vivant au Bénin ne peut être fier des difficultés qu’éprouvent les travailleurs pour défendre leurs droits élémentaires. Le ministre Sévérin Quenum est-il sûr que les travailleurs peuvent protester aujourd’hui contre le retrait du droit de grève sans une menace de radiation? Sous le régime de la Rupture auquel appartient l’avocat personnel de Patrice Talon, des journalistes qui n’ont que leurs stylos, cameras et enregistreurs comme armes de défense, ont été chassés par un dispositif impressionnant de forces de sécurité parce qu’ils voulaient marcher pacifiquement contre la fermeture illégale de certains médias. Le ministre de la Justice sait-il au moins que l’accès à l’information est un droit ? Qu’a-t-il fait pour que ce droit soit respecté depuis que les antennes de Soleil Fm sont brouillées? Permettrait-il que les citoyens qui ont droit à l’information, prennent d’assaut les rues de Cotonou que dirige le préfet Modeste Toboula, pour défendre leurs droits et ceux des autres, comme il le clame? Qu’est-ce que le ministre de la Justice a pu faire face aux dénonciations qui fusent contre la création de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (Criet) par rapport aux violations des droits de la défense? Le Barreau du Bénin ne l’a-t-il pas interpellé? Les Magistrats, n’en parlons pas. La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples n’a certes pas encore pris une décision de fond au sujet de l’affaire des « 18 kg de cocaïne » dont s’est saisie la Criet, mais l’ordonnance qu’elle a prise le 7 décembre dernier à Tunis (Lire Matin Libre du lundi 10 décembre 2018) doit faire douter le Garde des Sceaux et son gouvernement sur l’état de la justice au Bénin. Le thème de la journée internationale des droits de l’homme de cette année porte est « Défendez les droits de l’homme et agissez pour plus de respect, plus de liberté et plus de compassion ». C’est un thème qui demande encore des efforts aux Etats par rapport à la situation des droits de l’homme. Et beaucoup se demandent s’il est encore possible de défendre des droits sous le gouvernement de Patrice Talon dans lequel l’avocat Sévérin Quenum occupe une place de choix. A moins que défendre ses droits et ceux des autres ait une autre explication que seul le Garde des Sceaux maîtrise. Sinon, à vrai dire, ce discours de Me Séverin Quenum reste une fiction.