La dépouille mortelle de la présidente de la Fédération nationale des associations de personnes handicapées du Bénin, Géronine Sètchéton Tokpo, sera inhumée demain samedi 30 mars à Abomey. Elle a été arrachée à l’affection des siens, le jeudi 14 juin 2018, à l’âge de 34 ans, après l’accouchement de son premier enfant. Durant son séjour terrestre, elle a démontré que le handicap n’est pas un frein.
Elle était au cœur de tous les combats en faveur de la promotion des droits des personnes handicapées. Juriste, spécialiste en droits de la personne humaine et démocratie, Géronime Tokpo a su laisser des traces indélébiles au regard de son engagement pour l’amélioration des conditions des personnes handicapées.
Elle a poursuivi ses études de troisième cycle en se spécialisant en droits de la personne humaine et démocratie. Jusqu’à son décès, elle était la directrice adjointe du Fonds national de développement et de promotion du tourisme (Fndpt).
Par ses interventions qui forcent admiration et respect au Bénin et en Afrique, elle s’est battue pour l’avènement d’une société inclusive en faveur de ses pairs. Son séjour terrestre, quoique bref, a été le couronnement de nombreux efforts au profit des personnes handicapées. Sa disparition prématurée est une grande perte que pleurent sa famille et ses amis.
Géronime Tokpo est un grand nom dans le paysage de la défense des droits humains. Le 26 février 2016, le groupe de travail de la Commission africaine des droits de l’Homme et du Peuple (Cadhp), sur les droits des personnes âgées et des personnes handicapées en Afrique, avait sollicité son expertise pour la période de février 2016 à novembre 2017. Ce mandat lui a été renouvelé pour une période de 2 ans. Hélas ! Elle n’aura pas le temps de l’achever.
Les témoignages renseignent que le président de la Cour constitutionnelle, Me Joseph Djogbénou, est capable de rédiger un roman entier sur elle. D’ailleurs, son cabinet aurait beaucoup contribué à ses études universitaires, sans doute en tenant compte de ses talents et de ses nombreux efforts pour la cause des personnes handicapées.
Dans une démarche ferme et rassurée, Géronime Tokpo a mené le combat en faveur des personnes handicapées au prix de nombreux sacrifices. Avec ses lunettes noires qui ne passent pas inaperçues, son éloquence qui séduit, l’ancienne présidente de la Fédération nationale des associations de personnes handicapées du Bénin a consacré sa vie au service de ses pairs et de la nation, non sans difficultés.
« Mon parcours a été semé d’embûches comme d’ailleurs celui de la plupart des personnes handicapées. Grâce au soutien de ma famille, j’ai obtenu le Certificat d’études primaires, le Brevet d’études du premier cycle, puis le Baccalauréat aux côtés de mes frères voyants. A l’université, j’ai obtenu une maîtrise en Droit des affaires et carrières judiciaires. C’est à ce moment que j’ai vécu ma plus grande désillusion », témoignait-elle de son vivant.
Pour avoir été recalée au concours des auditeurs de justice du fait de son handicap, elle a saisi la Cour constitutionnelle qui lui donna raison un an plus tard à travers la décision Dcc 12-106 du 3 mai 2012 en se basant sur les dispositions de la Constitution du Bénin et celles de la Charte africaine des droits de l’Homme et des Peuples. Cette victoire l’a davantage renforcée dans son élan de promotion des droits des personnes handicapées au point où elle était présente sur tous les fronts en la matière.
Son départ prématuré est une énorme perte. « Géronime était l’étoile de notre famille. Nous sommes au nombre de neuf et c’est elle la benjamine », regrette l’un de ses frères.
Témoignages
Des témoignages fusent de toutes parts pour saluer la mémoire de l’avocate de la cause des disparues. « Une combattante ne meurt jamais. Tu es partie pour un repos éternel jugé opportun par Dieu et nous nous inclinons devant sa volonté, mais tes œuvres suivront », indique Claire Houngan Ayémona sur la plate-forme « Droits humains Bénin »’ à laquelle appartenait la défunte.
« Le Bénin vient de perdre l’un des défenseurs très engagé des droits de l’homme. Nous saluons cette figure de promotion des droits humains d’une manière générale et des droits des personnes handicapées en particulier », écrit Claudes Kamenga, représentant résident de l’Unicef au nom du système des Nations Unies au Bénin, au lendemain de sa mort dans un communiqué.
Pour Gilles Badet, secrétaire général de la Cour constitutionnelle, qui cite le nom de la regrettée dans ses cours de droits de l’homme à l’université, Géronime était « une institution, un porte-flambeau, le symbole de lutte contre toutes les formes de discrimination ».
Et, à Jean-Claude Dossa, journaliste d’ajouter : « En cette vie, tout est bien éphémère : la santé, la fortune ou la noble mission de devenir mère. De toi, mon cœur garde l’image de la rigueur mais, aussi du leader aimable. Je n’en ai souvent rencontré que dans les histoires, les fables ».
Grande figure de la promotion des droits humains, elle laisse derrière elle, un petit garçon, et des proches inconsolables. Sa dépouille mortelle sera inhumée demain samedi 30 mars à Abomey.