Élu lors des législatives d’avril 2019, le ministre de l’intérieur et de la sécurité publique a décidé de ne pas siéger. Il a préféré céder sa place à sa suppléante Mariam Talata Chabi. Après cette démission intervenue avant l’élection du Bureau du Parlement dont Mariam Talata Chabi occupe le poste de 1ère Vice-président, beaucoup se demandent si Sacca Lafia a suivi rigoureusement les normes en la matière avant de céder sa place.
Contrairement à ses autres collègues ministres qui sont aussi élus députés, Sacca Lafia est le seul qui a déjà démissionné de son poste de parlementaire. Une promptitude qui ne laisse pas certains hommes de droit indifférents. Ceux-ci doutent du respect de l’article 12 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale dans cette promptitude. C’est le cas du juriste Prince Agbodjan qui a rappelé sur sa page Facebook les dispositions de l’article 12. Même s’il s’est abstenu de faire particulièrement des commentaires sur le cas de Sacca Lafia, on lit à travers la publication qu’il pose un problème sur la démission du ministre.
Sur la toile, le sujet fait grand bruit et beaucoup affirment que le ministre n’a pas respecté les dispositions de cet article 12 du règlement intérieur du Parlement qui régit la démission d’un député en début de législature. Mais contrairement à cet avis, d’autres pensent que la démission du ministre est légale et ne viole nullement le règlement intérieur de l’Assemblée nationale. « La démission de Sacca Lafia est d’abord légale en ce sens que son élection n’a pas été contestée. Le siège n’a fait l’objet d’aucun recours dans le délai de 10 jours prévu pour le dépôt des requêtes en contestation. Donc le tiret 1 de l’article 12 incriminé a été respecté. Étant donné que l’élection de Sacca Lafia n’a pas été contestée, le tiret 2 de l’article 12 n’est pas en l’espèce applicable à son égard. », explique Thibaud Nagnonhoun.
Lecture du dernier alinéa de l’article 12
En ce qui concerne le dernier alinéa de l’article 12, Thibaud Nagnonhoun pense que la démission de Sacca Lafia ne souffre d’aucune insuffisance. En effet, le dernier alinéa de l’article 12 précise que « Les démissions sont adressées au Président. A la séance plénière suivante au plus tard, il en informe les députés et les notifie au Gouvernement ». Ici, il se pose le problème de « à qui la lettre de démission est adressée? ». Sacca Lafia a adressé sa lettre de démission au président du Bureau d’âge, une possibilité que lui offre l’imprécision du dernier alinéa de l’article. Mais au delà, Thibaud Nagnonhoun estime que l’article 7 du même règlement intérieur apporte une solution à cette imprécision.
L’article 7 parle en effet des attributions du Bureau d’âge jusqu’à l’élection du nouveau Bureau du Parlement. « A l’exception des questions urgentes d’intérêt immédiat et de celles relatives à l’élection du Bureau, aux vacances, à l’admission et à l’invalidation des députés, aucun débat ne peut avoir lieu sous la présidence du Doyen d’âge. » De la lecture croisée des articles 12, 7, 6 du règlement intérieur, Thibaud Nagnonhoun conclut que la démission de Sacca Lafia est totalement en phase avec les textes.
Que dit l’article 12 du règlement intérieur?
Article 12.- Démission
Tout député peut se démettre de ses fonctions à tout moment.
Toutefois, en début de législature, cette démission ne peut être reçue que dans les conditions ci-après :
• soit après l’expiration du délai de dix (10) jours prévu pour le dépôt des requêtes en contestation si son élection n’a pas été contestée ;
• soit après la notification de la décision de rejet rendue par la Cour Constitutionnelle, si son élection a été contestée.
Les démissions sont adressées au Président. A la séance plénière suivante au plus tard, il en informe les députés et les notifie au Gouvernement.