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Appels à l’ingérence étrangère par des forces politiques béninoises: « Indigne de responsables politiques », selon le Pcb

Publié le lundi 27 mai 2019  |  La Nation
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© Autre presse par DR
Le Professeur Philippe Noudjènoumè, constitutionnaliste et 1er secrétaire du Parti Communiste du Bénin (Pcb)
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Depuis le début du processus des dernières élections législatives, le débat politique a pris toute une autre tournure au Bénin. Il est fait de plus en plus de fiel et a tout autant un relent anxiogène voire violent dans les propos, dont au gré de l’évolution des faits, on se rend compte qu’il est voulu ainsi, à dessein, par les ayants cause qui ont sans doute tourné la page de l’esprit de conciliabule qui a caractérisé jusque-là le pays, et se montrent prêts à franchir la ligne rouge, le Rubicon. A l’instar de nombreuses forces politiques qui rejettent un tel postulat, le Parti communiste du Bénin n’entend pas jeter la patrie par terre, comme on le dit au Bénin.

Le fiel a pris le pas dans le débat politique au Bénin actuellement, qui prend une tournure dangereuse, disons-le tout de go, pour ne pas avoir à faire la politique de l’autruche ou des trois singes qui ne veulent rien voir, rien entendre ni rien dire. Loin de cela, on est en droit de se demander si c’est dans le Bénin de l’arbre à palabre que d’aucuns prennent ainsi des positions aussi extrêmes, au nom d’une bisbille politique comme on en a déjà vu, de l’élection présidentielle de 1996 contestée par Nicéphore Soglo au K.O qui a sanctionné la présidentielle de 2011 dans la foulée de la Liste électorale permanente informatisée alors qualifiée de « bafouée » et ayant par conséquent généré une victoire au premier tour contestée, du jamais vu dans l’histoire de la présidentielle sous le renouveau démocratique, et chose encore plus inconcevable, vu les forces politiques fédérées à l’époque contre le candidat Boni Yayi!
Comme on peut le noter, les querelles politiques n’ont jamais, aucunement, cédé place aux postures observées actuellement, aux positions et discours tenus par certains acteurs politiques qui, au nom d’une élection à laquelle ils n’ont pu prendre part du fait des lois de la République qui n’ont pu permettre leur participation, choisissent de tirer sur le fil au risque de le rompre, de vilipender les institutions de la République dont les prérogatives sont remises en cause, de jeter de l’opprobre sur le chef de l’Etat et de peindre le pays en noir, de le trainer carrément dans la fange afin de régler, selon toute évidence, des comptes politiques. Et, pense-t-on, en vue d’affecter les dirigeants actuels. Le jeu en vaut-il la chandelle ? Est-il raisonnable, suite aux évènements des 1er 2 mai derniers, de dire sur des chaines internationales de télévision qu’il y a eu « beaucoup de morts » quand soi-même, on avoue ne pas en connaitre les chiffres exacts ? Est-ce digne d’un responsable politique qui, prétextant de querelles politiciennes, projette une telle image (négative) de sa patrie, se fondant sur des données erronées ?

Pcb et patriotisme

Il faut s’en inquiéter, s’interroger sur le sens de l’attitude par exemple d’un ancien chef d’Etat, Nicéphore Soglo, qui se vante d’avoir fait des démarches à l’extérieur afin que les partenaires techniques et financiers privent le Bénin de ressources via les accords de prêts…Au motif que le Parlement issu des dernières législatives serait illégitime ! Selon des allégations qui lui sont attribuées, il aurait convaincu, sans doute, fort de son aura irradiant d’ancien administrateur de la Banque mondiale, des partenaires techniques et financiers qu’un tel Parlement n’est pas représentatif du peuple béninois, et que ce serait à leurs risques et périls s’ils prennent en compte des lois sur des accords de prêts venant de cette législature…Et ce n’est pas tout, pour ceux qui s’excuseraient du peu, selon le patriarche qui clame pourtant ses amours pour le patriotisme et le panafricanisme, les autres chefs d’Etat n’attendraient que la décision du président
Muhammadu Buhari du Nigeria pour sceller le sort de Patrice Talon et du Parlement. Belles recette et moisson que voilà !
Dans cette démarche, il est précédé par les Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) dont le Bureau politique appelle la Communauté internationale, à savoir l’Union européenne, la Cédeao et l’Ua, les Etats-Unis, l’Organisation de la Francophonie, à faire du Bénin «un pays de concentration de ses efforts, une priorité… ».
Un appel que le Bureau politique du Parti communiste du Bénin, quant à lui, réuni le 23 mai 2019, juge « grave et surprenant et auquel une réponse positive aura un impact profond et durable sur le sort du peuple et du pays de Béhanzin, de Bio Guerra et de Kaba… ». Et d’ajouter que « Sur la base des principes universels de souveraineté, le Parti communiste du Bénin (Pcb) a toujours défendu que tout problème interne au Bénin, qu’il soit d’ordre politique, sécuritaire ou autre, ne peut être résolu que par le peuple béninois lui-même, certes avec le soutien des peuples du monde, mais sans intervention militaire étrangère… ». Selon le Pcb, « Appeler à l’ingérence humanitaire (Ndlr : étrangère) dans son pays, revient donc, au vu de l’expérience concrète, à un appel à l’agression de son pays par les puissances étrangères, et cela n’est pas digne de responsables politiques qui tiennent à la souveraineté de leur peuple et à l’indépendance de leur pays », argumente ce parti, selon qui, « Cela s’apparente tout simplement à une trahison des héros de l’histoire de notre pays et à la mise en avant d’intérêts particuliers, à l’exclusion des intérêts supérieurs de la patrie ».
Non sans avoir qualifié le régime de Talon « d’autocratique », selon son antienne séculaire, le Pcb considère les dernières législatives jugées du reste non inclusives par lui, comme une bataille de perdu, mais certes précisent les ‘’rouges’’, « La perte d’une bataille n’a jamais signifié la perte de la guerre et ne peut autoriser l’appel à l’agression de son pays par des puissances étrangères. Tout acte de désespoir doit être condamné… ». Cela étant,
« C’est pourquoi le Pcb déplore et désapprouve fermement l’appel du Bureau politique des Fcbe à une ingérence humanitaire (Ndlr : étrangère) dans notre pays »...Et « réaffirme que si des puissances s’avisaient, sur la base de ces appels, à organiser l’agression de notre pays, le peuple ne manquera pas de trouver les voies et moyens d’y répondre pour recouvrer en même temps que sa démocratie, sa dignité et son indépendance, en traitant de la même manière les agresseurs et leurs complices nationaux ».
Au gré des évènements, et des postures observées chez certains politiciens actuellement, on est bien tenté de crédibiliser la thèse défendue par Bruno Amoussou récemment au cours d’une conférence de presse. Selon cette thèse, en effet, la crispation notée sur la scène politique actuellement ne relève pas de choses politiques, mais de rancunes et de comptes personnels, qui déterminent notamment, dit-il, les anciens chefs d’Etat Nicéphore Soglo et Boni Yayi, décidés, a-t-il ajouté, à « pourrir le mandat de leur successeur, le président Patrice Talon »,
indique l’ancien président de l’Assemblée nationale et ministre d’Etat. Est-ce là des signes du fameux « complot » dont il jure de l’existence ?

Esprit de dialogue ?

Etonnant que certains acteurs politiques aient choisi de s’affranchir de l’esprit de pacifisme qui a prévalu jusqu’à présent depuis « l’historique conférence nationale ». Pourquoi ce revirement aux antipodes du dialogue incarné par ladite conférence, dont on se convainc pourtant de ce qu’elle est le socle de la vie institutionnelle et politique depuis 1990. Le dialogue, l’esprit de conciliation qui l’a caractérisé se serait-il volatilisé?
Est tout aussi bafouée, la Constitution issue de ce socle, à chaque fois que certains acteurs politiques se permettent de tourner en dérision les institutions à la République soi-disant à la ‘’solde du pouvoir exécutif’’, de remettre en cause l’ordonnancement constitutionnel, de remettre en cause l’ordre législatif à travers des lois votées par l’instance habilitée à le faire, et les institutions de la République, y compris la Cour constitutionnelle censée trancher en fonction de la loi suprême et déterminer le sens et la portée que doivent revêtir les dispositions votées par l’Assemblée nationale, entre autres. Que de quolibets, pourtant, au sujet du ‘’certificat de conformité’’ essuyés par la Cour constitutionnelle ! Que de diatribes essuyées par la Commission électorale nationale autonome (Céna), récemment, qui n’a pourtant fait qu’exercer ses prérogatives, légales. Ce que feignent de retenir ceux qui, opportunément et en fonction de la circonstance, veulent jeter le bébé avec l’eau du bain, au nom de leurs intérêts remis en cause, notamment celui de pouvoir siéger au Parlement, par des dynamiques qui confortent l’intérêt général et le progrès national. Avec en filigrane, la remise en cause du code électoral, de la charte des partis, des lois votées par la majorité des députés, de la mouvance comme de l’opposition. De sorte que l’opinion nationale voire internationale, qui perd son latin face au méli-mélo actuel, ne retient pas une telle réalité de vue, chose que du reste les ayants cause font tout pour occulter, à savoir que ces lois ont fait l’objet de conciliabules à Dassa, à Grand-Popo et à Cotonou (Azalai), avant d’être votées par le Parlement presque à l’unanimité, y compris par certains plaignants aujourd’hui.

Fair-play

Un facteur clé de la démocratie, du jeu politique, est cependant le fair-play, comme a pu en faire montre avec panache Lionel Zinsou dès le lendemain des résultats du deuxième tour de l’élection présidentielle de 2016. Car, au terme de la bataille politique, ainsi le veut la règle du jeu, il faut pouvoir rendre les armes, au premier desquelles le dilatoire, les enchères de mauvaise foi épaisse, etc. Et ne plus laisser prévaloir que la force de la loi, l’ordre légal. En l’occurrence, c’est au nom de la loi que certains partis n’ont pu avoir le certificat de conformité, qui, au-delà de toute polémique, reste une bonne trouvaille de la haute instance qu’est la Cour constitutionnelle pour ne pas laisser libre cours à l’interprétation qu’il faut donner, au terme du processus de mise en conformité par les partis existant antérieurement à la nouvelle loi. C’est au nom de la loi que la Céna a rejeté certains dossiers frappés de manquements, non pas mineurs, mais appelant à l’invalidation des listes en cause. C’est au nom du droit positif béninois que la Cour constitutionnelle a validé les législatives et que la 8e législature a pris fonction…Quel autre déterminant peut justifier les postures et résistances observées, même après le processus électoral ? La défiance à l’ordre légal ?

Paul AMOUSSOU
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