De tout temps, les attentes des populations au plan énergétique n’ont pas changé : la réduction sensible du délestage et du coût des consommations électriques. Le gouvernement actuel semble très avancé sur ces deux chantiers. C’est ce qu’a démontré le ministre de l’Energie, Dona Jean-Claude Houssou face aux participants à l’atelier du Réseau francophone des régulateurs de l’énergie (Regulae-Fr) au Bénin.
Avec environ 10% des 45 projets phares pour près de 800 milliards F Cfa à injecter entre 2016 et 2021, le gouvernement actuel consacre au secteur de l’énergie une place de choix dans son Programme d’action. Plusieurs réformes et chantiers ont déjà été lancés dans ce sens. Les investissements mis en œuvre sont concentrés sur quatre projets phares. Le premier vise à garantir une meilleure disponibilité en matière d’énergie électrique. « Le Bénin est un pays structurellement déficitaire en matière énergétique puisque nous importions plus de 90% de notre énergie. D’ici 2021, nous allons arrêter définitivement d’en importer et changer de paradigme par rapport à cela. Déjà, à partir du mois prochain, nous allons inaugurer la toute première centrale de 120 Mw en dual fuel de notre pays, qui est en test actuellement et dont la construction a duré moins de temps que prévu soit 14 mois au lieu de 18 mois », a indiqué le ministre de l’Energie, Dona Jean-Claude Houssou dans son adresse aux membres du Réseau francophone des régulateurs d’énergie venus de plus de vingt pays.
Le deuxième projet phare du gouvernement, poursuit-il, ce sont les énergies renouvelables. En effet, le gouvernement a pris le défi, dès son entrée en fonction, d’avoir un mixte énergétique responsable en exploitant toutes les potentialités disponibles au Bénin. Et au titre des potentialités, l’énergie solaire disponible en abondance a été longtemps négligée. « Pour ce qui est du solaire, nous jouions à ce que j’appelle l’effet tournesol. C’est cette fleur qui, à une certaine partie de la journée, tourne le dos au soleil alors qu’il est en abondance. Le Bénin est abondamment doté de cette ressource et le gouvernement entend tout mettre en œuvre pour l’utiliser et la mettre au cœur de sa politique énergétique », a précisé le ministre de l’Energie. Il annonce : « En l’espace des deux ans à venir, nous allons progresser de plus de 25% dans le cadre de notre capacité globale installée au Bénin ; soit 400 Mw dont 100 Mw d’électricité d’origine solaire, avec deux projets structurants. Le premier est financé par l’Agence française de développement et l’Union européenne pour 25 Mw au sud est du Bénin, et le deuxième avec l’appui du Mca 2 pour 50 Mw répartis sur quatre coins du territoire et dont l’appel d’offres va bientôt être lancé ».
Agir sur le distributeur et le consommateur
Le troisième projet phare qui concentre les investissements mis en œuvre dans le secteur de l’énergie est la restructuration de l’opérateur national. « Nous voulons que tous les acteurs du maillon soient efficaces pour obtenir un système électrique performant », explique le ministre Jean-Claude Houssou. Dans ce sens, le Bénin s’est engagé dans une gestion déléguée dont le processus est à son terme. Un contrat plan est mis en place entre l’Etat et la Société béninoise de l’Energie électrique. Ce contrat tient compte de l’ensemble des critères de performance dans tous les domaines ; lesquels critères sont revus trimestriellement pour s’assurer de ce que les améliorations attendues sont bien au rendez-vous. Le gouvernement a également réactualisé et modifié la composition du Conseil d’administration de la Sbee. « Nous voulons que la gouvernance de cette société majeure pour notre pays, soit à un niveau tel qu’il n’y ait pas de reproches à faire », justifie le ministre de l’Energie.
Si le troisième projet est axé sur la restructuration du distributeur national, le quatrième projet phare s’intéresse à la maitrise des consommations énergétiques à travers l’efficacité énergétique, la sensibilisation. « Pour cela, nous avons initié un certain nombre de réformes ; des réformes profondes, courageuses, parfois douloureuses mais je dirai que c’est à ce prix que nous allons pouvoir éradiquer les dysfonctionnements que nous rencontrons dans le sous-secteur de l’électricité », souligne l’autorité ministérielle. Il évoque les réformes sur les produits importés, ampoules, climatiseurs, téléviseurs… « Nos pays sont devenus des poubelles où les choses qui ne sont pas acceptées ailleurs sont déversées ici à des prix que nos populations trouvent être des prix intéressants, mais en fait c’est leurs factures pendant des mois et des années qui vont compenser cela. C’est ce que j’appelle des vendeurs d’illusions », relève-t-il. C’est sans occulter la réforme relative à l’électrification hors réseau qui a fait un bond extraordinaire au Bénin avec une forte demande. Et à en croire le ministre, ces efforts portent déjà leurs fruits. « Nous commençons déjà par avoir des résultats satisfaisants qui nous montrent que les choix qui ont été faits depuis 2016 sont justes. En 2015, nous avions un taux de coupure d’une durée qui était en moyenne de 75 heures par client et par an. C’est ce que nous appelons le critère B. Et fin 2018, nous sommes à moins de 15 heures. C’est-à-dire qu’en l’espace de deux ans et demi, nous avons divisé par cinq. Nous avons diminué de plus de 75% cette souffrance à nos concitoyens », fait-il remarquer. Et misant sur la détermination du gouvernement, il présage pour le Bénin, un lendemain meilleur au plan énergétique : « Nous avons aussi pris un décret pour offrir un cadre attractif et performant aux investisseurs avec une vision claire de ce que nous voulons aujourd’hui, de comment le faire et de quand le faire. Je crois qu’avec la priorité offerte au secteur, nous pouvons dire que nous avons de belles chances de réussir ».
Le Bénin, point de mire de la sous-région
Outre ses efforts au plan local pour sortir les populations de la précarité énergétique, le gouvernement inscrit aussi le Bénin dans des initiatives régionales. « Le Bénin est la capitale du West african powerpoint (Wap), un système d’échange d’énergie électrique de l’Afrique de l’Ouest. C’est du Bénin que de nombreuses initiatives notamment en termes de maillage du système électrique des 14 pays de l’espace Wap se mettent en œuvre. Je vous annonce d’ailleurs que 10 sur les 14 pays sont déjà interconnectés », fait savoir le ministre Jean-Claude Houssou. Il ajoute que le Wap, institution de la Cedeao, construit actuellement au Bénin, un centre de dispatching régional. « C’est donc du Bénin que sera géré tout le flux électrique de l’Afrique de l’Ouest », explique-t-il.
En outre, le Bénin abritera d’ici fin 2020, la salle de marché de l’électricité ouest africain. « Nous espérons que les bénéfices que toutes les autres régions du monde qui se sont inscrites dans cette dynamique ont trouvé, feront également jour dans notre espace », soutient le ministre Dona Jean-Claude Houssou. Pour lui, il est nécessaire pour les pays d’Afrique en l’occurrence subsaharienne, de réviser leurs stratégies pour répondre aux enjeux et assurer une meilleure couverture énergétique. « Le défi à relever est immense car la situation énergétique dans nos pays est particulièrement préoccupante. Il nous faudra œuvrer pour le développement d’un marché sous régional de l’électricité, actif, compétitif, à travers la mise en œuvre de partenariats public-privé dans un cadre réglementaire approprié », a-t-il exprimé aux membres du Réseau francophone des régulateurs de l’énergie.
L’utilisation optimale des ressources énergétiques et une compétitivité plus grande dans la production pourraient, selon lui, contribuer à sécuriser les approvisionnements, engendrer une baisse de coût de fourniture de l’électricité et permettre au sous-secteur de l’énergie de jouer pleinement un rôle moteur, socle du développement de tout pays.