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Huguette Akplogan Dossa, directrice générale de Emeraude Tours: « La question des loisirs et du tourisme n’est pas encore ancrée dans nos mœurs »

Publié le mercredi 24 juillet 2019  |  La Nation
Huguette
© Autre presse par DR
Huguette Akplogan Dossa, directrice générale de Emeraude Tours
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Depuis quelques semaines, les vacances scolaires sont là. Beaucoup de parents et d’enfants continuent de s’interroger sur les loisirs à s’offrir. Plusieurs structures de la place proposent des activités tout aussi ludiques qu’éducatives pour occuper les enfants pendant ce temps. Mais la grande majorité des enfants restent toujours dans leur cadre habituel, puisque la question des loisirs et du tourisme n’est pas encore ancrée dans nos mœurs, estime Huguette Akplogan Dossa, directrice générale de Emeraude Tours et du cabinet H2A Conseil, deux structures qui promeuvent la destination Bénin et surtout l’agro et l’écotourisme.

La Nation : La tradition était d’aller au village, chez la tante, chez l’oncle ou chez les grands parents. Cette tradition a régressé sinon disparu pratiquement. Comment expliquez-vous ce changement de comportement ?

Huguette Akplogan Dossa: Je crois que la modernité a commencé à prendre le pas sur la tradition et les familles ont commencé à se retrouver en famille mononucléaire, ce n’est plus la grande famille. De la même manière, les préoccupations journalières font que les parents n’ayant plus la possibilité de rentrer à midi s’occuper des enfants ou même se reposer, les mettant à la cantine pendant toute l’année scolaire, se demandent comment faire pendant les vacances au moment où eux ils sont au travail. Ceux qui arrivent à le faire mieux sont ceux qui prennent les vacances en même temps que les enfants et généralement, vous constatez que c’est des gens qui ont un peu de moyens et qui veulent partir avec leurs enfants. La première trouvaille, c’est le Togo ou le Ghana. Le gros lot reste à la maison. Aujourd’hui, il n’y a presque plus personne au village pour recevoir qui que ce soit.
Dans ces conditions, quand les parents sont au travail, les enfants sont laissés à eux-mêmes. Il y en a qui guettent les activités organisées par les start-up telles que le dessin, la chorégraphie et la danse, les activités de ferme où les gens initient des activités journalières qui permettent aux enfants de partir de Cotonou le matin et reviennent le soir. Les parents inscrivent les enfants tout en payant pour le service. Le meilleur des cas, c’est ceux qui ont les moyens de payer pour les colonies de vacances. Dans ce cas, malheureusement, on constate que les gens préfèrent encore aller à l’extérieur plutôt que de faire le tour du Bénin que nous, nous planifions depuis six ans.

Justement, parlant des structures comme la vôtre qui sont censées faire des offres dans ce sens. Peut-on dire qu’il y a suffisamment d’offres, à moins qu’elles manquent de visibilité ?

Nous avons commencé cette activité depuis six ans, les gens le connaissent. La première année, nous avons fait beaucoup de battage médiatique. La deuxième année, les réseaux sociaux ont pris le relais. Troisième et quatrième années, on n’a pas réalisé l’activité faute d’inscrits. L’année dernière, on l’a réalisée avec un groupe restreint. Cette année, elle ne sera pas réalisée faute d’inscription suffisante car en réalité, une colonie de vacances, ça demande un budget faramineux parce que nous avons fait l’option de mettre les enfants dans de très bonnes conditions pendant 15 jours que dure le tour du Bénin. Malheureusement, les Béninois n’ont pas compris et trouvent toujours que c’est cher.

Le mot est revenu plusieurs fois dans votre intervention. Est-ce que finalement, tout ne se résume pas au problème de moyens ?

Pour faire ce type de colonie, il faut déployer beaucoup de moyens : louer les bus, l’hôtel, manger dans des restaurants, visiter les sites touristiques. Pour faire une bonne colonie de vacances, le minimum que nous déboursons, c’est trois millions de francs Cfa. Dans des pays développés, l’Etat soutient un certain nombre d’activités et demande aux parents un complément pour en bénéficier. Il y a des centres qui accueillent les enfants pendant les vacances. Nous n’en avons pas au Bénin, donc nous sommes obligés d’aller les loger dans les hôtels.

Dans un contexte où l’Etat béninois investit beaucoup dans la promotion de la destination Bénin, quelles sont les relations entre l’Etat et les structures de promotion du tourisme?

A l’étape où nous sommes, le gouvernement est en train de mettre en place les différents sites qui doivent être visités. Il a terminé les études et a commencé à travailler sur un certain nombre de sites. Ce qui se fait va faciliter un peu notre travail d’autant plus que certains de ces sites ne seront plus payants, d’autres le seront. A nous de choisir les sites éducatifs qui ne sont pas trop chers ou qui ne sont pas payants à intégrer dans nos programmes. Déjà, on a appris qu’on peut désormais visiter gratuitement les musées, c’est un grand exploit venant du gouvernement. C’est tout ce que le gouvernement peut faire car ce n’est pas lui qui a les bus, ce n’est pas lui qui a construit les hôtels donc je ne vois pas encore, en dehors des routes et des pistes qui sont aménagées pour nous faciliter la circulation, ce que le gouvernement peut faire d’autre.

Est-ce à dire qu’entre le gouvernement et les acteurs privés de promotion du tourisme, il n’y a pas une passerelle pour discuter et atteindre les objectifs communs ?

Au niveau des associations, nous avons commencé les discussions mais le gouvernement dit: « actuellement, je ne suis pas encore entré dans la phase de promotion, donc je ne peux pas encore discuter de ça avec vous. Je suis à la phase de mise en place, de construction, peut-être d’ici à fin 2019, quand j’aurai fini ça, on parlera de promotion». Peut-être qu’en ce moment, le gouvernement mettra des chèques-vacances à la disposition des agences ou des agents méritants, on ne sait pas encore comment la promotion va se faire quant à l’incitation des Béninois à consommer le tourisme local. Sinon, le Béninois lui-même n’a pas été éduqué à faire du tourisme. Tout le tourisme qu’on connait, c’est le tourisme mortuaire, où on doit aller à l’enterrement loin du milieu de travail, où on part vendredi et on revient dimanche. Et ce tourisme aussi, si on le travaillait correctement, on pouvait le transformer en une source de devises, travailler sur le mental des Béninois pour qu’au moins, quand ils arrivent là-bas, qu’ils dorment dans des hôtels pour aider les hôteliers à rentabiliser leurs investissements.
En clair, le Béninois n’a pas une culture des vacances comme c’est le cas dans les pays développés.

Non. Quand le Béninois met l’argent de côté, c’est pour acheter des briques. Et quand les vacances arrivent, on dit à l’enfant, on prépare ta rentrée, il faut chercher l’argent pour la scolarité et les fournitures, donc la question des loisirs et du tourisme n’est pas encore ancrée dans nos mœurs. C’est un travail de sensibilisation et d’éducation à faire, peut-être faudrait-il inscrire cette préoccupation dans les programmes éducatifs afin que les générations futures sortent de ce carcan. Il faut dire aussi que le pouvoir d’achat du Béninois ne lui permet pas de mettre des ressources de côté pour faire du tourisme.

Que diriez-vous pour finir cet entretien ?

Je dirai aux parents que les vacances, c’est les vacances, il faut les offrir aux enfants et qu’il y a des structures spécialisées. Même s’ils ne veulent pas les passer en colonie, qu’ils s’organisent en famille ou ils viennent nous voir, on va leur proposer des packages pour qu’ils partent en vacances avec les enfants pour aller se reposer et mieux échanger avec eux, car durant toute l’année scolaire, ils n’ont pas eu le temps de le faire. Question de faire le bilan avec eux avant de repartir pour une nouvelle année
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