L’évaluation diagnostique à l’endroit des enseignants du primaire et du secondaire, annoncée par le Chef de l’Etat Patrice Talon à l’occasion de sa dernière rencontre avec les Secrétaires généraux des Confédérations et Centrales syndicales et représentants du Csds des trois ordres d’enseignements, fait couler beaucoup d’encre et de salive. Les acteurs de l’éducation, les enseignants et bien d‘autres se prononcent sur cette stratégie du gouvernement, de répondre au besoin de renforcement et de recyclage permanent des enseignants dans le secteur de l’éducation. Si certains épousent la proposition gouvernementale en vue de panser les béantes plaies qui dégradent la qualité de l’éducation au Bénin, d’autres qui sont passés sous anonymat, se montrent méfiants face à ce guet-apens du pouvoir Talon adopté pour licencier les enseignants et les soumettre au chômage. Les avis sont partagés. Les appels au boycott montent de plus en plus dans le rang des enseignants, au moment où les secrétaires généraux des confédérations et centrales syndicales apaisent les cœurs et rassurent des bonnes initiatives du gouvernement Talon.
Ils ont dit
Enseignant anonyme: « Le but de cette évaluation ne devrait pas consister à licencier les enseignants »
« Tout le monde sait que les enseignants ont besoin de renforcement et de recyclage permanent. C’est une évaluation qui permettra d’identifier les besoins de renforcement et de recyclage mais le but de cette évaluation ne doit pas consister à licencier, car les enseignants ne sont pas devenus du jour au lendemain enseignants, ils ont suivi un cursus de formation sanctionné à chaque étape par des diplômes. Et dans un contexte du genre, ceux qui ont assuré la formation de ces enseignants et qui leur ont délivré des diplômes ne disent paradoxalement rien comme si la présidence de la République a compétence de remettre en cause le cursus des enseignants. Quand les ministres avaient pris l’arrêté de mise en formation des enseignants, ils ont exigé dans le dossier que chaque enseignant devrait déposer à L’ENS de Porto-Novo et de Natitingou un engagement décennal qui lui fait obligation de servir l’Etat après sa formation pendant 10 ans au moins avant de quitter le secteur. Et aujourd’hui on pense aussi facilement qu’une évaluation diagnostique permettrait de licencier ces enseignants. Quelle est cette façon de réfléchir ? »
Alexandre Adjinan, Responsable syndical: « Pas de composition.. Boycott à 100% »
« Des gens qui sont dans les arcanes du pouvoir nous conseillent de ne pas aller composer. Des gens qui sont très proches et qui défendent le régime bec et ongle nous disent des choses qu’on ne peut pas révéler au grand jour. Moi, je peux vivre sans être agent permanent de l’Etat, et je sais que vous pouvez vivre aussi. On a consulté des gens et reçu des conseils. Nous devons choisir le bon chemin et le bon chemin c’est de ne pas aller composer pour lui donner cette caution. Ils ont déjà leur plan. Ils ont voulu tenter l’évaluation en janvier mais ça n’a pas marché parce qu’on a boycotté. On le confie maintenant au chef de l’Etat qui a convié les secrétaires généraux. Chers camarades, ne faisons pas l’erreur. Pas de composition. Boycott à 100%. Il faut y croire. Pas de composition »
Enseignant anonyme: « Il y a effectivement un piège qui guette les reversés de 2008 »
« Personnellement, j’ai l’impression d’être pris entre deux feux : le choix du boycott, option des syndicalistes et la volonté de composer pour définitivement régler la question et laver l’affront. Que le gouvernement rassure davantage. Par ailleurs, je n’ai pas compris pourquoi l’Ortb n’a pas diffusé cette séance avec les centrales comme à son habitude pour permettre aux enseignants de se faire leurs propres opinions. Il y a effectivement un piège qui guette les reversés de 2008. Que le gouvernement fasse preuve de pédagogie en montrant le bien-fondé de l’évaluation diagnostique. Je veux bien sûr composer mais que la transparence entoure le processus et qu’on en profite pas pour licencier des enseignants qui se sont sacrifiés depuis 12 ans et dont certains ont eu d’autres opportunités qu’ils ont laissées pour se consacrer à la formation des jeunes. Doit-on se mettre à rédiger des demandes d’emploi à 50 ans? Ce serait injuste et révoltant ».