Dans le cadre de la célébration du 59e anniversaire du Bénin, l’Honorable Dakpè Sossou fait une analyse rétrospective de la situation sociopolitique du Bénin. A travers cette interview, ce leader de l’Union Progressiste salue l’engagement du Président Patrice Talon à corriger les tares observées depuis toujours.
Le Bénin vient de célébrer 59 ans d’indépendance. Comment vivez-vous cette célébration ?
Ça n’arrive qu’une seule fois dans la vie. L’année prochaine, on ne fêtera plus 59 ans mais 60 ans. Tous les Béninois doivent se réjouir de cette opportunité que nous offre la vie d’être témoins de cet anniversaire et d’en profiter, peut-être aussi pour faire le point des avancées et des échecs. Nous ne devons pas regretter d’avoir demandé et obtenu notre indépendance. Quoi de plus normal qu’un peuple qui souhaite être libre et indépendant. Cependant, à l’analyse, on constate aisément que l’indépendance du Bénin est heureuse sur certains plans mais aussi, et cela à regret, nous avons manqué de rayonner sur un autre plan.
Quels sont, selon vous, les échecs et les acquis de ces 59 ans d’indépendance ?
Il faut avoir vécu ce 1er août 1960 pour comprendre cette liesse populaire, ce sentiment d’une mission accomplie qui se dégageait du visage de nos leaders d’alors. C’était un moment de gloire collective, le point départ d’une nouvelle ère, celle rêvée pour le progrès. Or, le développement exige comme préalable, d’éliminer les réticences et résistances de notre culture à la modernisation. Le peuple béninois ne semble pas être totalement prêt à cela quoique, les trois dernières années nous permettent, tout de même de commencer par nous forger une autre opinion de la question.
Je pense globalement que s’il y a eu échec, c’est le tort des leaders successifs qui n’ont pas pu imprimer au peuple la dynamique susceptible de permettre le décollage économique. Des exemples de mauvaise gouvernance, la qualité de la formation des ressources humaines, les affaires de corruption et de détournement de fonds publics, la résistance au changement, le manque de vision, l’incivisme et le défaut de patriotisme sont quelques-uns des maux qui gangrènent notre processus de développement. Vous pouvez investir tout l’argent de ce monde dans un tel environnement, vous n’aurez aucun résultat. Le constat est là. Après 58 ans d’indépendance, certains ont carrément regretté le départ du colonisateur : un cadre de vie sale, des éléphants blancs, la famine, une agriculture restée à l’état archaïque, le chômage, une administration mal en point, la dépendance économique et même culturelle. C’est une honte. Ce sont les plus grands maux de notre Bénin d’aujourd’hui. Et je peux vous assurer que cette situation n’arrange personne.
Nous devons nous relever et marcher la tête haute. Et cela a commencé déjà. Au cours des trois dernières années, nous avons à la tête de notre pays des gens vraiment en avance sur ceux de la classe politique béninoise actuelle. La beauté de leurs rêves et la magnificence de leur dynamisme annoncent un avenir radieux pour notre pays. Je ne fais pas de la politique en l’affirmant. Voyez par vous-mêmes. Tout est en mouvement autour de nous : le paysage, l’économie, le sport, l’agriculture, la culture. Je me demande ce qui inspire autant le Président de la République et ses collaborateurs.
Tous les Béninois n’adoubent pourtant pas la gestion du régime de la rupture…
Oui, c’est vrai. C’est ce que j’appelais plus haut la résistance au changement. On n’acquiert rien facilement. Nous devons avoir l’honnêteté de le reconnaître et de considérer qu’on ne saurait aller de l’avant si on ne fait pas de sacrifice. En clair, pas de progrès sans sacrifice. Pour bâtir une belle maison, on désherbe le terrain. Pour réussir à un examen, on sacrifie ses temps de jeux. C’est la vie qui est ainsi faite. La Chine et l’Inde étaient au même niveau de développement que nous à l’indépendance. Aujourd’hui, ils sont cités au nombre des pays les plus développés. Ce n’est pas avec des dirigeants complaisants qu’on avance. A un moment donné, il faut savoir être rigoureux et rester droit dans ses bottes.
C’est pour cela que je voue une admiration infinie pour le Président Patrice Talon. Quelle perte que le Bénin n’ait pas connu plus tôt, des dirigeants de son rang ? Des leaders qui ne pensent pas à l’image que les gens auront d’eux, aux avantages qu’ils perdent et à leur intérêt politique. Vous alignez des dirigeants comme lui sur 20 ans que vous aurez des résultats tangibles sur le long terme.
Des femmes qui s’ennuient dans les foyers et une jeunesse au chômage peuvent-ils comprendre et accepter vos points de vue ?
Je comprends leurs situations plus facilement qu’ils ne peuvent accepter mon opinion sur la question. Dans un élan de développement même celui que je dessine, ces couches ne seront pas mises de côté. On ne mettra pas les jeunes au carreau pendant 20 ans pour développer le Bénin. On ne laissera pas les femmes, la fondation de nos familles traditionnelles aux oubliettes au cours de ces 20 années de révolution. Rien qu’à la veille de la célébration de ces 59 ans d’indépendance, le Chef de l’Etat dans son discours sur l’Etat de la Nation a annoncé des réformes à l’endroit de ces deux couches sociales : les microcrédits qui passent à 10 milliards par année pour les femmes et le recrutement annuel de 2 mille jeunes pour une expérience professionnelle unique. C’est sans compter sur les traditionnels concours de recrutement à la fonction publique et les réformes incitatifs à l’entreprenariat des jeunes. Nous devons être reconnaissants envers Talon et cette politique durable qu’il a mise en œuvre.
Votre mot de fin
Je voudrais féliciter chaque membre de la société béninoise et leur rappeler que ce qui nous unit est plus fort que ce qui nous divise. Nos peines d’aujourd’hui ne doivent pas nous faire oublier que nous aimerions, tout de même voir un Bénin beau, prospère et enviable. C’est ce rêve qui doit guider nos conduites et non nos intérêts personnels qui, eux, ne sont pas de nature durables. Ceux qui nous opposent et nous incitent à bafouer les valeurs fondamentales de la République n’aiment pas ce pays. La politique sous tous les cieux est un jeu, un beau jeu. Et il ne devrait pas se jouer avec la violence. La paix est cet héritage qui a de tout temps caractérisé notre pays. La tension n’a jamais été une solution en vue du progrès. La violence n’est pas la meilleure arme politique. Les autres pays du monde et mêmes nos voisins africains font des pieds et des mains pour avancer. Ne restons pas en marge du mouvement mondial de progrès autour de nous. Ouvrons les yeux et marchons sous la lumière.
Réalisation : Adrien TCHOMAKOU