Autre époque, autres mœurs. Les nouveaux indicateurs du secteur bancaire au Bénin annoncent une baisse historique des dépôts. Comme une trainée de poudre, la nouvelle publiée sur le site de l’Uemoa a été très tôt reprise par les médias. Le rapport de la Bceao sur les conditions de banque dans l’espace sous régional Uemoa révèle que les dépôts à terme ont connu une régression de 4,6% en 2018. Si pour les détracteurs du régime de la rupture, cette baisse est une conséquence de la santé économique ou la résultante du panier de la ménagère précaire, les avertis, spécialistes et habitués des banques restent formels et strictes.Il s’agit selon eux d’un bon signe pour l’économie béninoise secouée par des réformes audacieuses depuis avril 2016. A première vue, l’on pourrait penser à une récession économique, mais loin de cette hypothèse impossible traduite par l’évolution du PIB qui lentement et sûrement progresse vers une croissance à deux chiffres, on se demande si cette baisse n’est pas le fruit des mesures d’assainissements.
Si on est tous d’accord qu’il faut avoir de liquidité avant d’épargner, la logique veut que dans les banques les dépôts à terme connaissent de hausse si et seulement si l’activité économique dans le pays augmente. Au-delà de ce paramètre, plusieurs autres facteurs expliquent cette baisse des dépôts courant l’année 2018.
Sur le plan de la lutte contre la corruption, cela s’explique par le fait que la lutte engagée contre le fléau porte ses fruits. Les agents de l’administration qui s’y enrichissaient n’ont plus d’autre choix que de se ranger. En témoignent les différentes notes obtenues par le pays en 2018. Avec les réformes économiques de Talon, chaque citoyen gagne en fonction de son activité économique quotidienne. Adieul’argent sale. Et comme effet résonnant, les gains faciles entre temps versés dans les comptes des promoteurs de la corruption disparaissent voire meurent progressivement.
Au premier trimestre de 2018, la cellule nationale du traitement des informations financières (CENTIF) en collaboration avec l’Union européenne et le GIABA avaient déjà salué le progrès enregistré par le Bénin dans la lutte contre le blanchiment des capitaux.
L’autre facteur qu’il ne faut guère occulter, c’est la réduction voire la suppression de certaines primes dans les ministères et sociétés d’Etat dans le but de rationaliser les ressources publiques. Dans cette vague de la nouvelle dynamique administrative, figure l’interdiction relative à l’organisation des ateliers et séminaires fantaisistes à l’intérieur du pays auparavant transformée en une source de revenus pour de nombreux fonctionnaires. En conséquence, plusieurs cadres sont aujourd’hui obligés de se contenter de leurs salaires.
Dans ce lot des mobiles expliquant cette baisse des dépôts à terme, la régression des détournements, sans oublier la vache à lait des marchés publics en sont pour quelque chose. Dans le Bénin d’aujourd’hui, les cadres ne prennent plus le risque de réclamer des pots de vins avant d’accomplir leurs devoirs professionnels.
Avec cette panoplie de facteurs, la baisse des dépôts au niveau des banques est inévitable. Plutôt que de prendre la nouvelle comme une donnée économique négative, vaut mieux s’en réjouir car, même si les réformes paraissent douloureuses et amères, cela participe à l’émergence d’une économique dynamique et durable.
Clément ATCHADE