Un Béninois figure dans un manuel didactique pour être enseigné au Japon. Le prophète hors de chez soi se révèle en son Excellence l’ambassadeur du Bénin à Tokyo.
« La vie et l’œuvre d’illustres Blacks, qui plus est des Africains, méritent d’être contées dans les lycées et collèges du Japon », ainsi en a décidé, depuis l’année dernière, l’instance nationale de l’éducation de l’Empire du Soleil-Levant. Composée d’éminents membres (enseignants-chercheurs, députés au Parlement, hommes d’Etat et des médias, …) et présidée par le charismatique professeur Gomi Fumihiko, recteur de l’Université Daigaku (Hoosoo Uni.), cette instance a confié la matérialisation de sa décision aux Éditions Tokyo Shoseki. La reconnaissance est unique pour les deux personnalités d’origine étrangère nominées, dont le Béninois Zomahoun D. C. Rufin, de compter désormais parmi les plus emblématiques de l’histoire du peuple nippon. Leurs photos en illustration aux textes de la page 71 dédiée de l’ouvrage, et le mérite est d’une double dimension pour l’enfant du « Quartier latin » d’Afrique. D’abord, cette consécration comme modèle se réalise et lui est notifiée de son vivant. Ensuite, et bien plus remarquablement, elle se joue en balance à la notoriété de Nelson Mandela, qu’on ne présente plus.
On croit rêver de le voir…
Aux styles différents -mais avec la vision identique se résumant en l’émancipation par eux-mêmes de leur peuple respectif- ils sont identifiés pour être racontés dans un livre de sciences sociales et humaines consacré à la découverte de la planète, vue de la lorgnette insulaire de la 2è puissance économique mondiale. Le parcours en Asie-Océanie, et plus singulièrement au Japon, de Zomahoun D. C. Rufin, la star du petit écran et écrivain à succès, est ainsi élevé à la dignité d’une leçon de vie et d’un « success story » immortalisé dans du marbre. Les autorités de son pays d’accueil jugent qu’il fait partie des « promoteurs de l’éducation nationale les plus talentueux du Japon ».
Intellectuel africain noir le plus adulé en Asie-Océanie, il y tient avec compétence, depuis juin 2012, en tant qu’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Bénin, la chancellerie la plus active des pays les moins avancés. « Empereur noir », comme on le surnomme dans la presse internationale, il est l’unique à ce jour, parmi les diplomates à Tokyo, à être reçu en audience par Sa Majesté Impériale, l’Empereur Akihito, pour plus d’une demi-heure d’un mémorable tête-à-tête au cours duquel il a échangé avec son hôte… sans interprète. C’est aussi le seul à vivre le bonheur de voir son chef d’Etat se rendre au Japon, en visite d’Etat et en visite officielle, en moins de six mois.
La vie de Zomahoun D. C. Rufin dans un ouvrage scolaire du Japon, c’est finalement l’aboutissement d’une foi et d’un travail acharné. Deux valeurs portées par l’élan de cœur d’un homme à peine conscient de faire tourner une page de l’histoire d’une puissance mondiale au sommet de laquelle on croit rêver de le voir déjà se hisser. Rappelant, en cela, un certain… Barack Obama au pays de l’Oncle Sam.
Polyglotte à souhait sur plusieurs cultures
Par un froid glacial de mars 1994, Zomahoun D. C. Rufin débarque à Tokyo, en provenance de la Chine où il a séjourné sept ans, environ. En poche, un doctorat de troisième cycle d’étude de la civilisation chinoise qui le fait devenir, il y a vingt-ans, le premier sinologue noir. Son impressionnante articulation du mandarin en fait foi. Le natif de Dassa-Zoumé, où il a roulé sa bosse -comme tout bon gamin de son époque- à aller à l’école, parcourant de ses pieds nus les sentiers rocailleux de cette ville du département des Collines (Centre Bénin), était loin d’imaginer la responsabilité que lui ferait porter sa destinée, loin du bercail. Sa trajectoire atypique finit de le propulser aux devants des projecteurs de l’actualité internationale. Non sans douleur.
Il lui a fallu bosser comme un âne pour arrondir les fins de mois. Jardinier, chauffeur et interprète dans les ambassades africaines à Pékin et Tokyo, Zomahoun D. C. Rufin a tâté tous ces métiers pour survivre et payer ses études. Il prend des cours de japonais ; sa maîtrise de l’anglais, de l’espagnol et du chinois étant déjà acquise. A Sophia University, la prestigieuse, où n’accède pas qui veut, il soutient avec brio une deuxième thèse de doctorat. Cette fois, en sociologie de l’éducation.
Plus tard la révélation d’une série télévisée de la chaîne TBS, il est, sur l’une des émissions intitulée: « Kokoga Hen Da Yo Nihonjin » (« Les habitudes étranges des Japonais »), l’associé du très célèbre humoriste et cinéaste japonais, Beat Takeshi. Il s’agissait pour lui de « sensibiliser les Japonais à la cause africaine ». En septembre 1999, son livre en japonais intitulé: « Le Japon vu par Zomahoun » est un best-seller. Le Premier ministre de l’époque, M. Yoshiro Mori, évoquera le « parcours remarquable du Béninois » qui s’illustre. Convaincu de la responsabilité des Africains, quant au développement de leur continent, il finance la construction d’écoles primaires dans les régions déshéritées du Bénin sur les fonds recueillis de la vente de son premier livre, et met en place une cantine scolaire. Zomahoun D. C. Rufin se lance ensuite dans des forages de puits avec d’abord ce que lui rapportent différentes conférences données dans les universités, les firmes et autres multinationales, les lieux publics au Japon, etc. Son expérience dans l’humanitaire, il la consigne dans un autre livre. La « Ifê Foundation », d’étude de la langue et de la culture japonaises, sise à Cotonou-Sainte Rita, est son œuvre. On y accorde, depuis septembre 2003, des bourses japonaises de formation en agronomie, en médecine, en mécanique, etc. à des apprenants méritants. A ce jour, plus de la trentaine de Béninois des deux sexes sont allés au Japon par le biais de la « Benin Takeshi’s Japanese Language School », la seule école, sur le continent, à dispenser à partir de Cotonou un enseignement à titre totalement gratuit de la langue japonaise. En onze ans d’existence, plus d’une vingtaine de professeurs japonais y sont passés assurer leur part du succès de l’école.