La décision des autorités d’Abuja de fermer les frontières de leur pays, au-delà d’impacter l’économie béninoise, a de lourdes conséquences sur les populations nigérianes.
Le premier secteur impacté par cette mesure protectionniste est celui de l’importation du riz. Face à la demande croissante des consommateurs, les conducteurs de taxi-motos transportent des poches de riz cachés sous le selle de leur engin par des voies détournées le long des 700 km de frontière fermée.
Des conducteurs de voitures eux ont trouvé l’ingénieuse idée de cacher le riz dans les pneus secours de leurs véhicules pour braver l’interdit.
Ces fraudeurs sont régulièrement la cible des forces armées et des douanes qui n’hésitent pas à leur tirer dessus.
Depuis le 20 août dernier que le Nigéria a fermé ses frontières, le prix du riz selon les informations, a plus que doublé passant de 9 000 nairas (14 500 FCFA pour le sac de 50 kg) à 22 000 nairas (36 000 FCFA). Ce qui dépasse le salaire minimum mensuel du Nigérian qui est de 18 000 nairas (moins de 30 000 FCFA).
Un transporteur rapporté par Le Monde a confié qu’il n’a plus assez d’argent pour nourrir ses enfants et que ces derniers n’ont pas pu effectuer leur rentrée scolaire lundi 9 septembre, faute d’argent pour payer leurs frais de scolarité.
« S’il y avait assez de riz au Nigéria, on n’aurait pas besoin d’en importer », fustige Adewolé.
Selon les statistiques, la production locale de riz (4,78 millions de tonnes en 2018) est loin de couvrir les besoins des 190 millions de Nigérians qui sont friands de cet aliment de base.
Par ailleurs, le riz local qui n’est pas très apprécié à cause de son prix élevé laisse à désirer pour sa qualité.
L’autre secteur non moins touché par cette mesure est celui de l’essence de la contrebande.
Ce carburant à bas prix que le géant de l’Est déverse sur les pays voisins profitent à de nombreux commerçants nigérians dont les activités sont au ralenti depuis que les patrouilles ont été renforcées le long des frontières terrestres, maritimes et fluvio-lagunaires.
Le Nigéria viole les accords communautaires
Les Nigérians sont les premières victimes de « cette politique protectionniste d’un niveau extrême », a affirmé Adedayo Ademuwagun, analyste pour le cabinet d’études Songhai, basé à Lagos, rapporté par l’AFP.
La situation est désolante sur le grand marché d’Ajara, une grande ville frontalière de Badagry. La pénurie de riz, de macaronis, d’huile alimentaire et de sucre se fait déjà sentir. « Nous ne pouvons pas dépendre uniquement de la production locale », déplore le responsable du marché, chef Todowede Baba Oja, cité par l’AFP.
Même le boucher du marché, qui vend du bœuf local, et dont les activités sont en chute a dû augmenter ses prix pour combler ses pertes, rapporte la même source. « Les gens n’ont plus d’argent », se désole-t-il.
La conjoncture est d’autant plus profonde que les activités des opérateurs économiques nigérians qui opèrent de par et d’autres des frontières sont bloquées.
Après vingt huit jours de blocus, rien ne se dessine encore concernant la réouverture des frontières. Et les organisations sous-régionales commencent par s’en préoccuper.
A l’ouverture de sa deuxième session extraordinaire tenue à Monrovia le 16 septembre dernier, le parlement de la CEDEAO a appelé le Nigéria à ouvrir ses frontières pour la libre circulation des personnes et des biens.