Le style vestimentaire des instituteurs et institutrices sera désormais suivi au Bénin à compter de la rentrée scolaire 2019-2020. Il s’agit d’une décision prise par le ministre des Enseignements Maternelle et Primaire qui suscite de vives polémiques depuis quelques jours. Si pour certains, l’instituteur doit être irréprochable, pour d’autres l’école se veut un lieu d’apprentissage des valeurs de la vie.
Lunette à monture noire au visage, collant moulant mettant en valeur ses jambes et une chemise attirante donnant une place de choix à sa poitrine, Gisèle enseigne depuis 03 ans dans une école de la ville d’Abomey-Calavi. Elle a adopté un style vestimentaire extravagant depuis son enfance et cela n’a jamais impacté ses études encore moins le métier qu’elle exerce avec passion et dévotion depuis quelques années. « Je m’évertue à me mirer tous les matins avant d’aller en classe. Si je ne m’habille pas comme vous, c’est parce que nous n’avons pas les mêmes goûts », a-t-elle répondu à la question de savoir pourquoi elle a adopté un style vestimentaire peu ordinaire.
Tout comme elle, nombreuses sont les institutrices qui ne comprennent pas l’importance de cette note du ministre des Enseignements Maternelle et Primaire Salimane Karimou. « Je n’ai pas reçu personnellement la note. J’ai lu ça sur les réseaux sociaux. Mais nous allons porter quoi pour aller en classe ? Quelle tenue le ministre qualifie d’indécente ? », s’interroge une institutrice de l’École Primaire Publique de Adjagbo. Pour elle, les vêtements de l’enseignant ne peuvent aucunement agir sur la compréhension des apprenants « Seuls les apprenants flemmards qui ne veulent jamais rien comprendre peuvent dire cela », va-t-elle laisser entendre.
L’école n’étant pas seulement un lieu d’acquisition des connaissances, elle se veut aussi un lieu d’apprentissage des valeurs de la vie.
Une mesure qui concerne en l’occurrence les femmes selon certains instituteurs
En interdisant les collants, hauts-talons et autres tenues indécentes, le ministre entend promouvoir les valeurs morales et vestimentaires. Lesquelles valeurs sont importantes, à en croire Jean koffi instituteur. « Les apprenants prennent généralement, leur enseignant comme une boussole. Et si déjà l’enseignant a un style vestimentaire dépravé, ils vont s’adapter à la dépravation depuis tout petit », a-t-il souligné avant de faire remarquer que cette note concerne généralement les institutrices qui ont tendance à séduire partout, où elles passent. S’inscrivant dans la même logique Armel Adanlé a confié que le métier d’enseignant exige des principes, normes, valeurs et obligations. Et c’est d’ailleurs ça qu’il faut enseigner au cours de la formation des instituteurs.
Si les élèves ont l’obligation de se présenter à l’école dans une tenue convenable, avec des vêtements sobres, décents, il en sera de même pour les enseignants, à en croire Joseph Bocco, Directeur d’Ecole qui estime d’ailleurs que les instituteurs doivent être plus corrects que les apprenants qui vivent quotidiennement avec eux et qui les copient bêtement. « Le comportement d’un enseignant influe directement sur la capacité et l’attitude des apprenants. Je peux vous dire que j’ai tellement aimé mon enseignant de la classe de CM2 que j’ai commencé à imiter sa démarche quand mes parents m’ont ramené à l’ordre », a-t-il confié. Pour lui, cette note vient à juste titre puisque l’élève est toujours à l’image de son maître.
Les institutrices et les instituteurs doivent être moralement irréprochables.
Selon Florentin Azihou Sociologue à l’Université d’Abomey-calavi, pour enseigner, les institutrices et les instituteurs doivent être moralement irréprochables. Il souligne que le climat académique dans les écoles normales d’instituteurs doit être calqué sur celui des couvents. La discipline doit être de mise. Les futurs enseignants ne doivent pas se laisser distraire par les bruits du monde. « Ils doivent être formés pour incarner des vertus religieuses auprès des élèves et de leurs parents. » A-t-il laissé entendre. À l’en croire, la formation actuelle ne se penche pas véritablement sur la moralité des instituteurs. De ce fait, ceux-ci sont formés sans une évaluation de leurs valeurs morales. La formation des instituteurs doit se fonder sur un référentiel de compétences qui vise aussi bien le professionnalisme que l’intégrité morale.
Chaque enfant qu’on enseigne étant un homme qu’on gagne, les acteurs du système éducatif doivent trouver le moyen adéquat pour donner un enseignement de qualité aux apprenants. Si le style vestimentaire des instituteurs influe l’éducation des apprenants, le ministre a tout de même, le devoir de taper du poing sur la Table pour changer la donne.