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Le Matinal N° 4229 du 18/11/2013

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Réparation de l’adultère en milieu « kotafon » : deux importantes étapes pour une purification acceptée
Publié le mardi 19 novembre 2013   |  Le Matinal




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Les « Kotafon » constituent une partie des ethnies du Bénin. Ils sont répartis dans plusieurs localités du Mono, notamment à Lokossa, Athiémey, Bopa et Dogbo. C’est une ethnie qui reste attachée à ses traditions et ne pardonne pas celui qui enfreind aux règles établies depuis le temps des ancêtres. Si dans d’autres régions, l’adultère passe inaperçu, il est sévèrement puni chez les « Ekotafon ».

Dans le but de mieux comprendre la réaction qui suit ce ‘’péché’’ en milieu « Kotafon » et les éventuelles démarches à mener pour ne pas subir la colère des divinités traditionnelles, nous nous sommes rapprochés de Pierre Claver Anagonou, une personne ressource issue de cette ethnie. Il nous explique ici les différentes étapes nécessaires à franchir avant de se faire purifier. C’était en août dernier, au cours d’une cérémonie organisée à cet effet dans un village appelé Sazokpa, arrondissement de Kpinnou, Commune d’Athiémey.

Selon Claver Anagonou, l’adultère est considéré comme un crime à l’échelle familiale ou clanique. Lorsqu’une femme déclare avoir commis cet acte et/ou si le fâ le confirme, elle est systhématiquement répudiée du foyer, en attendant les cérémonies nécessaires. C’est une manière de protéger sa vie ainsi que celle de son époux. Le fâ, divination très chère aux peuples « Kotafon » est l’Alpha et l’Omega de ces cérémonies. C’est souvent par ses révélations qu’on détermine le crime, au cas où la femme suspectée nie les faits. La plupart des cas, c’est quand la coupable tombe malade, et que cette maladie se complique et échappe à la médecine moderne qu’on consulte le ‘’fâ’’.

Celui-ci révèle que la femme garde un secret qu’elle devra révéler pour survivre. A partir de cet instant, le soupçon est établi et la famille est alertée pour amener l’accusée à faire ses révélations. Les aveux une fois faits, un jour est retenu pour la cérémonie de purification. Le mari n’a rien à dépenser jusqu’à la fin des cérémonies. Tout est à la charge de la femme accusée ou la famille. Plusieurs accessoirs sont importants pour le succès de la cérémonie de purification. Il s’agit de : deux jarres neuves, trois coqs et deux poulets, quatre à cinq litres de sodabi, deux bouteilles de bière et deux bouteilles de sucrerie, du maïs, des condiments de cuisine, en plus une somme de deux mille francs. Mentionnons que les dépenses varient selon la rigueur des « tassinon ».

Les cérémonies proprement dites

Les cérémonies de purification se déroulent en deux volets : la réparation du fâ et celle de la famille.Le fâ, considéré comme l’ange gardien, le principal guide spirituel du « Kotafon » est associé à ces cérémonies. En effet, un collège de prêtres de fâ (les bokonon) sont sollicités pour réparer le fâ du mari qui est considéré comme agressé et détruit par l’acte d’adultère commis. Le fâ est lavé selon les rites appropriés et il est procédé au remplacement systématique d’une noix de palme spéciale et sacrée appelée « afâkun » ; le fâ d’un homme étant 16 noix fois 2, donc au total 32 noix. Cette cérémonie exige 2 poulets, deux litres de sodabi, une bouteille de bière et une bouteille de sucrerie.

Les cérémonies achevées, on considère que la première et la plus importante étape de la purification est franchie. Ensuite, le deuxième volet consiste au lavage du corps physique de la femme et de la concession clanique. Très tôt le matin, les « tassinon » se dirigent dans la brousse et la forêt sacrée à la quête des feuilles requises. On en compte 9 ou 11 selon les cas et l’expertise des officiantes. A leur retour solennel (bouche bée), elles sont accueillies joyeusement par les « Akosunu » (les hommes membres du clan).

La femme coupable s’agenouille, torse nu. On procède ensuite au remplissage des deux petites jarres déposées sur des coussinets de rameau par des feuilles propitiatoires. Elles sont juxtaposées dans les jarres selon l’ordre requis. Les jarres sont remplies d’eau, on en compte sept jets. Une fois remplies, l’une d’entre elles est comptée sept fois sur la tête de la coupable et elle se lève et précède le collège des « tassinon ». Une d’entre elles porte une branche feuillue de rameau portant à son bout un poussin, servant de bouc-émissaire.

On asperge tous les lieux supposés pollués, des maisons, des concessions du clan concerné. A la fin, le cortège se dirige vers le « tofioloko », l’iroko sacré ancestral. Les hommes sont invités à rejoindre les femmes pour achever les cérémonies. On procède premièrement à la cérémonie de bastonnade. En effet, les hommes se répartissent en deux groupes, l’un chargé de la flagellation, l’autre pour accueillir la purifiée. On compte sept fois la poignée d’eau sur elle et à la fin de la septième on lui ordonne d’aller rejoindre ses ‘’maris’’. C’est en ce temps que commence la flagellation. On simule cette flagellation sept fois. Au septième coup on frappe dur. Elle tente de fuir mais est poursuivie jusqu’à être reçue par le groupe des hommes. Une fois cette étape franchie, les hommes sont renvoyés. Les tantes entourent la femme des pagnes, et procèdent au lavage du corps et du sexe’’pollués’’ou ‘’violés’’.

On lui rase les poils (du pubis) et elle rend tous les objets portés pendant l’acte sexuel. Il s’agit des perles, des bracelets, des boucles d’oreilles, du slip, des pagnes etc. La dernière phase consiste à raser la tête de la purifiée et tuer un poulet et un coq au vodun « loko ». Le soir de la même journée, la purifiée prépare un mets copieux de son choix à toute la famille. La nuit, elle va dormir désormais en paix avec son mari. Mais avant, un coq est sacrifié au vodun « bègba » du mari pour consacrer la fin de la cérémonie.

Qui sont les « Kotafon » ?

Les peuples « kotafon » sont issus des migrations causées par les nombreuses incursions guerrières des rois d’Abomey au 17ème siècle. Ils sont des peuples qui ont traversé à gué le fleuve Couffo ou le lac Ahémé pour se réfugier chez leurs ancêtres, les Adja. Ainsi, les « kotafons » sont répartis dans les Communes d’Athièmè, de Lokossa, de Bopa et de Dogbo. Ils sont constitués en des clans tels que les Kusinu (venus de Kusi),les Takonnu (venus de Takon), les Glonu (venus de Glo), les Zunhwènu (venus de Tunwè,les wasanu (venus de Wasa), les Ggenu (venus d’Age), les aglanu (venus d’Agla), les Kpoganu ou Tofonu (venus de Kpoga ou de Tofo), les Untehuelinu (venus de Untehweli…).

C’est après ces différentes migrations que les peuples « Kotafon » occupent les terres fertiles et développent une agriculture de subsistance constituée du maïs, principale nourriture, du manioc, d’igname, du haricot. Ils sont aussi très attachés à la culture du palmier à huile qui détermine le potentiel économique de chaque individu ou de chaque famille. Mais par l’autosuffisance, la méfiance, la sécurité, la conservation, l’identité et l’orgueil personnel, ils aiment ériger une clôture autour de leurs maisons. Vivant dans l’abondance, ils sont très conservateurs et gardent jalousement certaines pratiques ancestrales.

Gaétan Nato

(Br/ Mono-Couffo)

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