Ce n’est qu’une question de jours. Dans un très proche avenir, elle sera sur la table des députés. Le texte de loi portant amnistie et dont bénéficieront les personnes supposées ou confirmées auteurs d’infractions diverses à l’occasion des récents troubles politiques est à l’ordre du jour. Les « experts » réunis par Patrice Talon et le bureau de l’Assemblée nationale à la suite du dialogue politique des 10, 11 et 12 octobre derniers ont conçu une avant-proposition de texte qui sera versée à la 8ème législature. L’exposé des motifs plante suffisamment le décor de cette mesure dite d’apaisement. En effet, « l’organisation des élections législatives du 28 avril 2019, consécutives à la mise en œuvre de la nouvelle loi portant charte des partis politiques et celle relative au code électoral a occasionné des manifestations publiques au cours desquelles des actes de violence ont été exercées et des atteintes portées contre les personnes et les biens ».
« Ces actes, constitutifs de délits ou de crimes contre l’Etat, les particuliers ou leurs biens ont été, pour certains, poursuivis, pour d’autres, jugés et pour d’autres encore, en cours d’instruction ». L’article premier du texte proposé s’énonce ainsi qu’il suit : « sont amnistiés, tous les faits constitutifs de crimes, de délits ou de contraventions commis à l’occasion de l’organisation, du déroulement et du dénouement des élections législatives du 28 avril 2019 au cours des mois d’avril, de mai et de juin 2019 ». Après le vote de cette loi, « toutes les procédures engagées « seront » dépourvues d’objet, les jugements ou arrêts prononcés non avenus, et les personnes détenues, à titre provisoire ou à la suite de l’exécution des jugements ou arrêts prononcés doivent être libérées si elles ne sont retenues pour autres causes légales ». Le processus législatif qui se mettra incessamment en branle à l’occasion de la deuxième session ordinaire de l’année connaîtra de cette question.
L’amnistie est donc une loi qui fait disparaître le caractère délictueux d’une action. Elle éteint l’action publique c’est-à-dire les poursuites pénales, efface la peine prononcée sans effacer les faits. Contrairement à une grâce présidentielle, une mesure d’amnistie n’est pas une mesure individuelle. Il s’agit d’une mesure générale, issue d’une loi spécialement votée à cet effet, et qui porte sur une ou plusieurs catégories d’infractions. Sur ce coup, seules les personnes réellement complices ou auteurs d’actes délictueux dans le cadre des événements cités supra sont en mesure de se frotter les mains. Leur épreuve est sur le point d’être conjuguée au passé. Mais les victimes et leurs proches qui ont payé un lourd tribut dans cette affaire garderont un arrière goût amer de cette flambée de violence. Malheureusement pour eux, ils n’auront que leurs yeux pour pleurer. Pendant que certains pleurent, d’autres sont en joie. Ainsi va la vie.
Il aurait mieux valu panser les plaies, sécher les larmes, appeler au pardon, offrir des mesures réparatrices et décider de manière souveraine, franche et responsable que plus jamais cela n’arrivera, avant d’aller dans le sens de l’amnistie. Des discussions élargies aux forces vives de la nation permettent de parvenir à cet objectif si tant est que l’on est prêt à poser les actes nécessaires afin que la page des frustrations et de la division se ferme. Le citoyen le plus célèbre qui bénéficiera de cette loi d’amnistie a pour nom Boni Yayi. l’ex chef de l’Etat, cité par le procureur de la République près le tribunal de première instance de première classe de Cotonou comme étant impliqué dans la survenue des actes de violence est sous le coup d’une procédure judiciaire. Certes, le fait qu’il ne sera plus incessamment inquiété participe à l’apaisement de la Cité. Encore faudrait-il qu’après tout ceci, la culture de la paix guide les dirigeants et les citoyens.