L’Assemblée nationale du Bénin a adopté une révision de la Constitution de 1990. La nouvelle loi fondamentale prévoit notamment la création d’un poste de vice-président.
Au Bénin, la loi portant révision de la Constitution - une première depuis son adoption en février 1990-, a été votée à l'unanimité par les 83 députés de l'Assemblée nationale.
Au total une quarantaine d'articles ont été modifiés.
La Constitution conserve la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels. Cependant, la nouvelle loi fondamentale prévoit que le président de la République ne pourra pas faire "plus de deux mandats dans sa vie", alors que l’ancienne formulation évoquait un mandat renouvelable une fois.
Selon le nouveau texte, les députés "ne pourront plus excéder trois mandats". Aucune limitation n'était jusque-là prévue pour les députés.
"Quand on se rappelle que Patrice Talon (le président de la République, ndlr) avait laissé entendre réintroduire le projet à nouveau à un moment favorable, on ne peut se surprendre de la célérité avec laquelle les 83 députés acquis à sa cause ont adopté près d’une cinquantaine de dispositions modifiées. Le peuple souverain reste de marbre. Ses craintes sont donc loin d’être infondées et nous sommes là pour voir la suite", défend Jean Kpoton, observateur de la vie politique.
Plusieurs nouveautés
La principale nouveauté, le Bénin se dote d’un poste de vice-président qui sera élu en même temps que le président de la République à la majorité absolue des suffrages lors d'un scrutin à deux tours.
Pour le Rapporteur Général des travaux du dialogue politique tenu le mois d’octobre, il s’agit d’un préalable pour une stabilité et une certaine pérennisation du modèle des élections générales vers lesquelles tend le Bénin.
"Si vous avez des mandats à cinq ans et que par un coup du sort un président venait à décéder, vous êtes obligés lorsque le poste de vice-président n’est pas prévu, de reprendre les élections. Ce qui crée un nouveau décalage. Lorsque le président ghanéen ou le président nigérian est décédé en cours de mandat, automatiquement, le vice-président a pris le relai et dans la même journée, l’Etat a continué de fonctionner comme si de rien n’avait été. Et donc c’est un peu dans ce sens-là que le Bénin aussi a choisi d’aller. Il n’est là que pour assurer la vacance et éventuellement, accomplir les tâches que le président voudra bien lui confier", argumente Victor Prudent Topanou, enseignant de sciences politiques à l’Université d’Abomey-Calavi, par ailleurs rapporteur général du dialogue politique et membre du Comité d’experts.
Autre innovation, l'abolition de la peine de mort, une meilleure représentation des femmes au Parlement, l'organisation d'élections générales (présidentielle, législatives, municipales et locales) à partir de 2026 sont également prévues par la révision.
Un Parlement monocolore
L’Assemblée nationale du Bénin est composée uniquement de députés de la majorité présidentielle. L'opposition a été exclue des législatives du 28 avril dernier qui ont provoqué une crise politique. Les manifestations qui s’en sont suivies ont fait une dizaine de morts par balles.
Après cette adoption, l'opposition a annoncé son intention d'organiser une nouvelle manifestation pour protester cette fois contre la révision constitutionnelle. Aucune date n’est prévue pour l’heure.
Plusieurs leaders de l'opposition se sont réunis à Cotonou à la fin de la semaine dernière sous l’égide de l'ancien président Nicéphore Soglo, afin de définir les actions à mener.
Le parti des Forces Cauris pour un Bénin émergent (FCBE) de l'ancien président Boni Yayi (2006-2016), actuellement en exil, a également critiqué "une révision précipitée et unilatérale".
Avant son entrée en vigueur, la nouvelle Constitution doit être validée par la Cour constitutionnelle et promulguée par le chef de l'Etat, Patrice Talon.