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Icc services, 10 mois après le verdict : Aucun kopeck n’est encore perçu par les victimes

Publié le mercredi 13 novembre 2019  |  Matin libre
Justice
© aCotonou.com par DR
Justice des faits divers
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(Me Agathe Affougnon explique pourquoi ça traîne)

La Cour de répression, des infractions économiques et du terrorisme (Criet) a connu, du 17 décembre 2018 au 6 février 2019, du procès ICC-Services (Investment Consultancy Computering Services). Un procès de « l’affaire Madoff béninoise » d’une structure de placement illégal de capitaux opérant à la manière des systèmes Ponzi, et qui a réussi à appâter et ruiner des milliers de Béninois (150 000 victimes environ) à hauteur de 150 milliards de francs Cfa). Pendant u peu plus de 30 jours, Avocats, Sachants, accusés, témoins et autres épargnants victimes ont défilé devant la Cour. Au final, la sentence fut prononcée, surtout en faveur des victimes. Elles avaient jubilé, voyant le jour du remboursement de leurs avoirs proche. Bientôt un an que ce procès a vécu. Où en sommes-nous concrètement ? Votre Journal Matin Libre s’est rapproché de l’un des Avocats des victimes, Me Agathe Affougnon Ago qui, dans une interview exclusive, a apporté des clarifications. Nous aurions pu avoir également la version de Herman Mèton, une victime vedette du procès. Mais toutes les fois qu’il a donné son accord de principe et convenir de l’heure, il n’a pas daigné honorer.



Matin Libre : Me Agathe Affougnon Ago, vous voudriez bien rafraîchir la mémoire à nos lecteurs sur ce procès dont le verdict a été prononcé en février dernier par la Criet.

Me Agathe Affougnon : Le procès (…) a connu le jugement d’une partie des personnes mises en cause, au titre de cette activité. Comme vous avez pu le constater au début, il y a eu une disjonction de la procédure en deux ; et ceux qui avaient répondu présents ont été jugés. Ceux qui n’avaient pas répondu présents, leurs dossiers avaient été réservés. Pour ceux qui ont été jugés, c’étaient les principaux responsables de la structure. Il y a un certain nombre qui sont restés, mais ce n’étaient pas les décideurs. Des complices et quelques responsables financiers et des personnes qui auraient bénéficié également, de façon directe ou indirecte, de ce qui s’est passé, des gens qui auraient utilisé d’influence publique également pour se faire des places là-bas. Donc c’est ceux-là qui sont restés. Leur procès a démarré un peu après la première phase qui a connu la condamnation de ceux qui sont encore en prison. Il y en a d’autres qui sont sortis. Et cette procédure a été suspendue parce que la Cour a estimé que le Procureur spécial devrait faire diligence avant que ça ne reprenne. Donc concrètement cette décision a été rendue. Elle est définitive sur le plan pénal mais sur les intérêts civils, il y a l’un des accusés qui a fini de purger sa peine et qui a formé un pourvoir en cassation contre les intérêts civils. Quand on parle des intérêts civils, c’est tout ce qui doit servir pour dédommager les victimes. Donc sur la peine pénale, ils n’ont pas fait de recours. Sur les intérêts civils, il y a le pourvoir qui est formé et qui est pendant devant la Cour suprême du Bénin. La suite n’est pas encore donnée.



Qui a formulé le pourvoir dont vous parlez?



Tihoundro Etienne. Il a été condamné à 8 ans, je crois que le temps de détention correspondait déjà à la peine. Le temps passé en détention provisoire correspondait à la peine qui a été prononcée contre lui, donc il est sorti de prison. Bon, ce n’est pas parce qu’il est sorti de prison qu’il a relevé le pourvoir. Il pouvait très bien être en prison et relever le pourvoir parce que la procédure permet aux prisonniers de faire le recours devant le Greffe de la prison où il est détenu. Mais c’est lui qui a formé le pourvoir en cassation. J’ignore si les autres se sont associés à ce pourvoir, mais c’est son nom que j’ai entendu, qu’il a formé un pourvoir. Nous, on attend que le dossier soit transmis à la Cour suprême, que la Cour commence l’instruction, qu’elle nous invite et puis on va déposer nos observations au soutien des intérêts des victimes de Icc.



Donc c’est ce pourvoir qui vous empêche d’évoluer dans le dossier maintenant ?



Pas du tout. Ce pourvoir n’empêche rien parce qu’au terme de la loi, le pourvoir n’est pas suspensif. Depuis février, il faut dire que c’est une décision qui fait plus de 80 pages. Nous avons suivi avec le Greffe et avec le président de la Cour et ça a mis vraiment beaucoup de temps. C’est bien des mois après que nous avons pu déjà avoir l’extrait et nous avons fini par avoir l’arrêt en entier vers la fin de l’année judiciaire. Au moment où nous avons pu avoir l’arrêt, c’étaient déjà les vacances judiciaires. Nous venons de reprendre, de retour des vacances. Donc la suite qui devrait être donnée, c’est deux choses. Il y a une partie des victimes qui ont été reçues à la Cour, et dont les intérêts ont été constatés dans l’arrêt. Pour ceux-là, on peut passer à la phase de l’exécution, mais avec une difficulté aussi. La difficulté qui est là, c’est que l’arrêt n’a pas dit ce qu’il faut faire des frais d’enregistrement. Etant donné que les intérêts sont lourds, nous aujourd’hui, on est en train de réfléchir pour voir quelle est la formule parce que pour avoir la formule exécutoire, dès lors que l’arrêt n’est pas rendu sur les intérêts civils exécutoires sur minute, cela suppose en droit qu’il faut enregistrer. Enregistrer, ça veut dire qu’il faut payer les frais au niveau des impôts. Ce que nous, on n’a pas, puisque nous, on est en train de travailler de façon bénévole depuis le début. Des victimes de Icc, personne n’a rien payé dans un cabinet d’avocat. Donc les avocats que nous sommes, aucun de nous n’a les ressources à mettre en œuvre pour ça. Nous continuons les réflexions parce que normalement, ceux-là peuvent se faire payer déjà sur l’argent qui a été immobilisé soit par les saisies, soit par la vente des biens. Donc vous avez suivi au cours du procès qu’il a de l’argent qui a été confié au Greffe du Tribunal de Cotonou et également au Trésor public. Donc, les personnes qui ont vu leurs intérêts pris en compte dans l’arrêt, et pour lesquelles on a condamné les accusés à les payer de 2.000F, 3.000F, etc. ; ceux-là peuvent déjà se faire payer si nous réglons la question de l’exécution. Ceux-là ne sont pas nombreux.



Ils sont combien concrètement ?



Je ne les ai pas comptés mais je crois que ça va faire moins de 30 personnes. Les plus nombreux, c’est les milliers que nous avons commencé à enregistrer, qui ne pouvaient pas défiler devant la Cour. Déjà au cours du procès, certains venaient. Après le procès, nous en avons eus énormément. Me Gustave Kassa, qui est également un avocat de Icc services en a enrôlé un grand nombre, dans son cabinet. Moi-même, j’en ai enrôlé ici. Me Alain Orounla également en a enrôlés. Donc nous sommes là, ceux que nous avons enrôlés de façon chiffrée, sont un peu plus de 15.000 personnes aujourd’hui.



Et il en reste encore ?



Moi je ne sais pas, parce que les gens viennent vers nous avec leurs documents, moi je ne sais pas à qui Icc a pris de l’argent. C’est quand ils viennent vers nous avec leurs documents que nous, on les enregistre. Moi je ne sais pas s’il y en a dehors ou pas. Je ne peux pas le savoir. Il est probable qu’il y en ait, il est aussi probable que ce soit terminé. Pour ceux-là d’un point de vue juridique, qu’est-ce qu’il fallait faire ? Il faut initier une nouvelle procédure parce que leurs intérêts ont été réservés. Ça veut dire que la Cour n’a pas statué pour dire oui on leur doit, non on ne leur doit pas, puisque la Cour ne peut pas inventer. La Cour ne peut statuer sur les intérêts civils que sur la base de documents qu’on lui présente et qui soient discutés de façon contradictoire devant elle. Un peu comme pour tous ceux qui sont passés. Donc, la question aujourd’hui, c’est de savoir comment organiser ce procès-là pour que 15.000 personnes passent, l’une après l’autre avec ses pièces, fasse discuter les pièces par les gens qui ont été condamnés pour retenir de façon contradictoire des montants. Vous avez vu qu’au cours du premier procès, il y a un Monsieur qui a déposé ses pièces, qui réclamait, je crois 50 ou bien 150 millions, en tout cas beaucoup d’argent. Et puis au cours des débats, il s’est révélé que celui par qui il est passé, celui à qui il avait remis son livret pour le suivi, a déjà perçu de l’argent. Donc, la contradiction a permis d’extraire de sa demande ce qui était déjà payé par Icc. C’est ça qui fait que de façon générale, la Cour est obligée de faire ce débat-là, individu par individu.



Et là, ce serait devant quelle Cour, ce débat ?



Comme option, la Cour qui a réservé les dépenses peut toujours en connaitre. C’est-à-dire que la Cour qui a rendu l’arrêt pénal peut toujours connaitre des intérêts civils, ça peut être la Criet. Dans le même temps, le Tribunal civil qui a plénitude de juridiction en matière civile, on peut également saisir un juge civil qui peut rendre cette décision-là. Aujourd’hui, les mis en cause, la majorité, ils sont en prison à Akpro-Missérété. Donc si nous allons faire une procédure comme celle-là, ça va être une procédure peut-être devant le Tribunal de Porto-Novo. Mais, nous sommes encore en réflexion pour voir quelle va être la meilleure méthode parce que 15.000 personnes, ce n’est pas 15 personnes, ce n’est pas 150 personnes. Déjà, faire un procès pour 150 personnes en même temps, c’est fastidieux, ce n’est pas évident. Donc, voilà là où on en est. A la date d’aujourd’hui, l’argent qui est consigné au Greffe de Cotonou est au toujours Greffe de Cotonou ; ce qui est consigné au Trésor est toujours au Trésor. La Cour a ordonné que ces montants soient reversés à la Caisse de dépôt et de consignation. Je crois que c’est une Caisse qui est en création au niveau du Trésor public. Nous, en tant qu’avocats des victimes, nous avons notifié l’arrêt à ces deux structures à savoir le Greffe de Cotonou et l’autorité entre les mains de qui l’argent se trouve au Trésor. Nous avons notifié l’arrêt et nous leur avons demandé d’exécuter les instructions de l’arrêt de la Criet qui leur demande de reverser l’argent dans ce compte-là. Jusqu’à présent, nous n’avons pas eu de suite. C’est vrai qu’il n’y pas si longtemps que ça et il y avait eu des vacances judiciaires. Donc, tout le monde partait en vacances, voilà.



Donc, pour vous résumer, à la date où nous sommes, personne n’a encore perçu un kopeck ?



Pas en passant par les cabinets d’avocats qui sont constitués dans le dossier. Même les avocats n’ont pas été couverts, d’un franc des frais de péage que nous avons payés pendant trois mois, pour gérer le procès. Personne. Tout l’argent qui est consigné est demeuré consigné.



Et quand on vous suit également, M. Guy Aplogan, Emile Tégbénou et consorts sont toujours en prison…



Ils ont été condamnés à dix ans. L’arrêt a été rendu publiquement. Ils ont été condamnés à dix ans de prison.M. Tihoundro seul a été condamné à huit ans et puis le cadre du ministère des finances qui était poursuivi, M. Ahizimè, lui aussi, il est sorti. Ce sont les deux qui sont sortis. Les autres n’ont pas encore couvert les dix ans. Maintenant, ce n’est pas moi le gardien en chef de la prison. Je ne peux pas vous dire qu’ils sont physiquement en prison. Je sais qu’ils ont été condamnés à 10 ans.



Mais vous êtes avocat des victimes ?



Oui je suis avocat des victimes, mais je ne vais pas contrôler qui dort à la prison, qui ne dort pas. Mais je sais qu’ils sont condamnés à 10 ans. Et donc, au terme de cet arrêt, ils sont sensés être encore à Akpro-Missérété.



Que doivent retenir nos lecteurs et les victimes d’Icc services quant à la suite du dossier ?



Ils doivent retenir que la procédure est en cours. Si quelqu’un a une recette miracle, il peut aller la proposer aux avocats. Mais nous, nous sommes en train de chercher la solution pour faire le procès pour les personnes que nous avons enregistrées ici, à cause du volume. Si c’étaient 20 personnes, 200 personnes, on aurait déjà introduit la procédure.



Pensez-vous que l’Etat ou le gouvernement doit faire quelque chose pour booster ce dossier ?



L’Etat ne nous a pas bloqués. Le gouvernement ne nous a pas bloqués. C’est une procédure judiciaire ordinaire, sauf que le nombre de personnes concernées est énorme. C’est tout. Qu’est-ce l’Etat va faire ? Sur le plan judiciaire, je ne sais pas ce que le gouvernement viendrait faire dedans.



Donc ça peut durer le temps que ça va durer encore ?



Moi je ne sais pas.



Merci Maitre



Propos recueillis par Jacques BOCO
Transcription : Janvier Gbedo (Coll.)
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