Les députés de la 8ème législature ont examiné et adopté dans la soirée du jeudi 21 novembre 2019 une nouvelle loi portant statut de l’opposition. La nouvelle loi est née sur l’initiative du député Barthélémy Kassa. Elle compte vingt-deux (22) articles répartis en quatre (04) Titres qui traitent respectivement des dispositions générales, des critères d’appartenance à l’opposition, des droits et devoirs de l’opposition, des dispositions diverses et finales. Le texte indique clairement que « Le Statut de l’Opposition est l’ensemble des règles juridiques permettant aux partis politiques de l’opposition de disposer des libertés et des moyens nécessaires en vue de leur libre et pleine participation à l’animation de la vie politique nationale » (Article 2)
L’article 3 du nouveau texte apporte des clarifications sur qui est de l’opposition ou non. En effet, cet article stipule que « Constitue l’opposition, l’ensemble des partis politiques représentés ou non à l’Assemblée nationale et qui ont choisi de soutenir pour l’essentiel des positions différentes de celles du Gouvernement et de construire une alternative politique crédible dans le cadre démocratique. L’appartenance à l’opposition doit faire l’objet d’une déclaration officielle et publique et doit être enregistrée au Ministère de l’Intérieur…». L’article 4 va plus loin en précisant que les moyens d’actions de l’Opposition sont entre autres la critique du programme, des décisions et actions du gouvernement, la proposition d’une alternative aux solutions préconisées par l’Exécutif pour la satisfaction des besoins du peuple, le développement de l’Etat, l’élaboration d’un projet de société en vue d’œuvrer pour une alternative au pouvoir par les voies légales.
Conformément au statut de l’opposition, est considéré comme l’un des chefs de l’opposition, tout chef d’un parti politique de l’Opposition dont le nombre de députés au Parlement constitue de façon autonome un groupe parlementaire. De même, est considéré comme l’un des chefs de l’Opposition, tout chef d’un groupe de partis de l’Opposition constitué en groupes parlementaires. Enfin tout chef de parti politique de l’Opposition représenté ou non à l’Assemblée nationale mais ayant totalisé au moins 10 % des suffrages exprimés à l’issue des dernières élections législatives ou communales est également considéré comme l’un des chefs de l’Opposition. (Article7).
A noter que le présent texte accorde la liberté à tout parti politique de quitter l’Opposition. Autrement dit, ce parti politique doit faire une déclaration officielle de changement de position. Laquelle déclaration doit faire l’objet d’enregistrement au ministère en charge de l’Intérieur.
Signalons que cette séance plénière est présidée par le Président de l’assemblée nationale, Louis G. Vlavonou en personne et le texte est adopté à l’unanimité des députés.
Lire l’intégralité de la Loi n° 2019-45 portant statut de l’opposition
REPUBLIQUE DU BENIN
FRATERNITE – JUSTICE – TRAVAIL
ASSEMBLEE NATIONALE
Loi n° 2019-45
portant statut de l’opposition
L’Assemblée nationale a délibéré et adopté en sa séance du 21 Novembre 2019, la loi dont la teneur suit :
TITRE 1er
DES DISPOSITIONS GENERALES
Article 1er : La présente loi a pour objet de fixer les dispositions relatives au statut de l’opposition en République du Bénin.
Il est reconnu à tout parti politique le droit de se déclarer parti politique de l’opposition.
Article 2 : Le statut de l’opposition est l’ensemble des règles juridiques permettant aux partis politiques de l’opposition de disposer des libertés et des moyens nécessaires en vue de leur libre et pleine participation à l’animation de la vie politique nationale.
Article 3 : Constitue l’opposition, l’ensemble des partis politiques représentés ou non à l’Assemblée nationale qui soutiennent pour l’essentiel, des positions différentes de celles du Gouvernement et envisagent de construire une alternative politique dans le cadre démocratique.
L’appartenance à l’opposition doit faire l’objet d’une déclaration officielle et publique.
Article 4 : Les moyens d’action de l’opposition sont :
la critique du programme, des décisions et des actions du Gouvernement ;
la proposition de solutions alternatives à celles préconisées par le Gouvernement pour la satisfaction des besoins du peuple, le développement de l’Etat et la cohésion de la Nation ;
l’élaboration et la mise en œuvre de projets de société en vue d’œuvrer pour une alternance au pouvoir par les voies légales.
Article 5 : L’Etat garantit à l’opposition les libertés publiques dans le respect des règles constitutionnelles, légales et réglementaires en vigueur.
TITRE II
DES CRITERES D’APPARTENANCE A L’OPPOSITION
Article 6 : Tout parti politique désireux d’appartenir à l’opposition doit :
être un parti politique régulièrement enregistré ;
faire une déclaration officielle et publique de son appartenance à l’opposition et la faire enregistrer au ministère en charge de l’intérieur. Ce dernier transmet, dans un délai ne pouvant excéder deux mois l’enregistrement au Journal officiel en vue de sa publication ; la publication au Journal officiel peut aussi se faire à la diligence du parti politique concerné ;
ne pas accepter une nomination à un poste politique de la part du Gouvernement.
Tout parti politique de l’opposition est en droit de développer pour l’essentiel des positions et des opinions différentes de celles du Gouvernement.
Article 7 : Est considéré comme l’un des chefs de l’opposition, tout chef d’un parti politique de l’opposition dont le nombre de députés à l’Assemblée nationale constitue de façon autonome un groupe parlementaire.
Est également considéré comme l’un des chefs de l’opposition, tout chef d’un groupe de partis de l’opposition constitué en groupes parlementaires à l’Assemblée nationale.
Est enfin considéré comme l’un des chefs de l’opposition, tout chef de parti politique de l’opposition représenté ou non à l’Assemblée nationale mais ayant totalisé au moins 10% des suffrages exprimés à l’issue des dernières élections législatives ou communales.
Article 8 : Est chef de file de l’opposition, le chef du parti politique déclaré de l’opposition, ayant le plus grand nombre de députés à l’Assemblée nationale à l’occasion des dernières élections législatives.
En cas d’égalité du nombre de députés, le chef de file de l’opposition est le chef du parti politique déclaré de l’opposition ayant le plus grand nombre d’élus communaux à l’occasion des dernières élections communales.
En cas d’égalité du nombre d’élus communaux, le chef de file de l’opposition est le chef du parti de l’opposition ayant réuni le plus grand nombre de suffrages aux dernières élections législatives.
En cas d’absence de représentation de l’opposition à l’Assemblée nationale, est désigné chef de file de l’opposition le chef du parti politique de l’opposition ayant obtenu le plus grand nombre d’élus communaux.
En cas d’égalité du nombre des élus communaux, le chef de file de l’opposition est le chef du parti de l’opposition ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages exprimés lors des dernières élections communales.
Le chef de file de l’opposition est nommé par décret pris en Conseil des ministres sur proposition du Conseil électoral de la Commission Electorale Nationale Autonome (CENA).
TITRE III
DES DROITS ET OBLIGATIONS DE L’OPPOSITION
Article 9 : Les partis politiques de l’opposition bénéficient d’un accès équitable aux moyens officiels d’information et de communication. Ils jouissent de toutes les libertés publiques garanties par la Constitution.
Article 10 : L’opposition peut exprimer son opinion sur toute question d’intérêt national et sur toute décision du Gouvernement.
Article 11 : L’opposition peut être consultée par le président de la République sur les questions importantes engageant la vie de la Nation, notamment :
les menaces à la paix civile ;
les menaces d’atteinte à l’intégrité territoriale ;
l’engagement des forces de défense à l’étranger.
La consultation peut être écrite ou orale. Lorsqu’elle est orale, l’opposition peut être consultée dans son ensemble.
L’avis de l’opposition est consultatif.
L’opposition peut être consultée sur toute autre question d’intérêt national et international.
Le chef de file de l’opposition peut être sollicité par le Chef de l’Etat pour des missions entrant dans le cadre de la défense des intérêts supérieurs de la Nation.
Article 12 : L’Etat assure la sécurité des responsables des partis politiques de l’opposition en accord avec ceux-ci.
Ils doivent, dans le cadre de l’exercice de leurs activités politiques, être à l’abri de toute mesure portant atteinte à leur intégrité et à leur sécurité personnelle.
Toute entrave ou toute tentative d’entrave non motivée à l’exercice des droits et des activités des partis politiques de l’opposition par une autorité administrative est interdite et punie d’une peine de un à deux ans d’emprisonnement et d’une amende de cinq cent mille à cinq millions de francs ou de l’une de ces deux peines seulement.
Article 13 : Tout acte de discrimination ou d’exclusion à l’égard d’un citoyen dans ses activités culturelles, sociales, économiques, professionnelles et administratives en raison de son appartenance à un parti politique de l’opposition, constitue un délit puni d’une peine d’emprisonnement de un mois à deux ans et d’une amende de cinq cent mille à cinq millions de francs ou de l’une de ces deux peines seulement.
Article 14 : L’opposition a le devoir de respecter scrupuleusement la Constitution ainsi que les lois et règlements de la République.
Article 15 : Le chef de file de l’opposition bénéficie des avantages protocolaires et dispose d’une liste civile fixés par décret pris en Conseil des ministres.
TITRE IV : DES DISPOSITIONS DIVERSES ET FINALES
Article 16 : A l’occasion des réunions et manifestations publiques qu’ils organisent, le parti ou groupe de partis politiques de l’opposition prend les dispositions nécessaires à l’effet de prévenir tout trouble à l’ordre public conformément aux lois et règlements en vigueur. Ils bénéficient des services d’ordre et de sécurité publique.
Toute interdiction de réunions et de manifestations publiques par l’administration doit être spécialement motivée.
La décision d’interdiction est susceptible de recours devant la juridiction compétente du siège de l’autorité administrative ayant prononcé l’interdiction. La juridiction compétente statue en procédure d’urgence.
Article 17 : Les partis politiques de l’opposition doivent, dans leurs programmes et dans leurs activités, proscrire l’intolérance, le régionalisme, l’ethnocentrisme, le fanatisme, le racisme, la xénophobie, l’incitation ou le recours à la violence sous toutes ses formes.
En tout état de cause, les actes de violence et les menaces, notamment à caractère ethnique, régionaliste, raciste, religieux et philosophique constituent des manquements graves à l’ordre républicain et punis conformément au code pénal.
Article 18 : En cas de non-respect des droits de l’opposition prévus par la présente loi, le parti politique concerné peut saisir la juridiction compétente. Celle-ci examine la requête en procédure d’urgence.
Article 19 : Les activités des partis de l’opposition, à l’occasion des réunions publiques d’information et des opérations électorales, sont régies par les textes en vigueur.
Article 20 : Tout parti politique est libre de quitter l’opposition. Dans ce cas, il fait une déclaration officielle de changement de position. Cette déclaration est enregistrée au ministère en charge de l’intérieur, qui fait publier l’enregistrement au Journal officiel. La publication au Journal officiel se fait dans les mêmes conditions qu’à l’article 6 de la présente loi. Ce changement de statut entraîne pour le parti politique la perte de tous les droits acquis au titre de la présente loi.
Article 21 : La présente loi qui abroge toutes dispositions antérieures contraires notamment la loi n° 2001-36 du 14 octobre 2002 portant statut de l’opposition, sera publiée au Journal officiel et exécutée comme loi de l’Etat.