La réforme du franc CFA a été actée ce samedi à Abidjan pour la mise en œuvre de la monnaie ECO dans l’espace UEMOA. Cette nouvelle qui enchante les pays concernés a suscité plusieurs réactions d’économistes et d’aguerris des questions de monnaie comme l’ex-ambassadeur du Bénin près la Turquie, Moïse Kérékou. Ce cadre béninois auteur de plusieurs recherches sur la monnaie unique en l’Afrique a salué la réforme du franc CFA mais a relevé un problème dans l’Eco, la nouvelle monnaie créée en remplacement. La réforme, outre le changement de nom, devrait induire le changement du fonctionnement du franc CFA. Elle devrait permettre, entre autres, de mettre fin au dépôt de réserves de changes par les pays utilisateurs du franc CFA en France. Les représentants de la France ne devraient plus siéger dans les instances de direction de la monnaie. « Nous accueillons favorablement ces trois réformes du Franc CFA »a écrit l’ex-ambassadeur du Bénin près la Turquie. « Cette réforme est assurément un grand pas dans un contexte de guerres et de tensions au Sahel qui a vite fait de cristalliser les acteurs et les parties », estime Moïse Kérékou.
Mais les trois changements opérés ne sont pas suffisants selon le fils du feu président Mathieu Kérékou. « Je reste sur ma faim malgré les trois réformes qu’on peut qualifier d’historiques », a fait savoir Moïse Kérékou soulignant qu’un aspect très important n’a pas été pris en compte dans la réforme du franc CFA. Il évoque notamment la convertibilité de la monnaie. « Tant que je ne peux pas changer mon Eco en Livres sterling, en Yuan chinois ou en Dinar koweïtien, et que je dois toujours transiter ou faire escale en Euro, le problème persiste », pense Moïse Kérékou pour qui, « il ne faut pas donner le mouton et garder en même temps la corde ».
« Car quelqu’un ou un groupe à travers sa monnaie contrôle toujours et à un œil sur mes opérations et peut décider du jour au lendemain de me priver de sa plateforme de transit », justifie-t-il avant de questionner : « Dans ce cas, comment je me rends ou j’opère avec le reste du monde ? ».
Dans sa réaction, Moïse Kérékou s’est également intéressé à la situation des autres pays utilisateurs du franc CFA, notamment en Afrique centrale et s’est demandé si cette partie de l’Afrique n’est pas concernée par la réforme du franc CFA. Il pense que la réforme doit être élargie aux pays utilisant le CFA en Afrique Centrale et les encourager à adopter l’ECO comme monnaie unique des deux zones.
Il est important cependant de rappeler que le sommet des chefs d’État et de gouvernement de la CEMAC qui s’est tenu les 21 et 22 novembre 2019 à Yaoundé a permis de jeter les bases d’échanges futurs pour des évolutions, puisque les six pays ont décidé d’engager une réflexion approfondie sur les conditions et le cadre d’une nouvelle coopération avec la France. L’UEMOA et la CEMAC demeurent cependant dans des situations différentes, ne serait-ce qu’au regard du projet de monnaie unique CEDEAO qui n’a pas d’équivalent en Afrique centrale.