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Accusée de pratiques de sorcellerie: Justine Gnimon acquittée au bénéfice du doute

Publié le lundi 23 decembre 2019  |  La Nation
Justice
© Autre presse par DR
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Le tribunal de 1re instance de 2e classe d’Abomey, statuant en matière criminelle, a acquitté au bénéfice du doute, mercredi 18 décembre dernier, dame Justine Gnimon, âgée de 56 ans, accusée de pratiques de sorcellerie sur David Alimagnidokpo.
Ce mercredi 18 décembre, l’émotion était bien forte dans la salle d’audience du tribunal d’Abomey. La bonne humeur et la crainte se partageaient les esprits de ceux qui étaient présents à l’audience. L’accusée Justine Gnimon présente à la barre est bien connue à Abomey où elle a toujours vécu jusqu’au jour où elle s’est retrouvée en prison pour pratiques de sorcellerie. Elle s’est mariée deux fois et s’est retrouvée veuve toutes les deux fois. Vivant ainsi sans enfant, elle semble en marge de sa communauté. A la barre, elle a eu beaucoup de peine à se maitriser. Nullement ébranlée ni intimidée par le tribunal, elle nie tout et défie même. Les juges lui rappellent que des jeunes à qui elle aurait donné la sorcellerie avaient bien déclaré qu’elle est leur devancière dans cette société secrète et qu’elle a même l’habitude de leur remettre des piécettes de 5 francs apprêtées mystiquement avec du sang qu’on jette sur les routes pour provoquer des accidents mortels. Elle nie et jure sur ses aïeux.

Gestuelles et logiques incontrôlées

Durant l’instruction à la barre, dame Justine s’est montrée très irritable face aux questions du tribunal. Une attitude agressive qui serait son trait de caractère. Le public qui assiste à l’audience murmure qu’elle souffrirait d’une altération cérébrale et psychologique. Car, tout le temps, elle répond aux questions du tribunal en se lançant dans des gestuelles et logiques souvent incontrôlées. Par moments, quand elle cherche à se défendre, elle se retrouve très vite dans l’incapacité à rationaliser son comportement, même en s’accrochant à la dénégation. Puis, elle jure : «Que la terre s’ouvre pour m’avaler si je mens ». Et le tribunal n’a que sa version car, les témoins dans cette affaire étaient tous absents à l’audience.
Représentant le ministère public, Ousmane Alédji ne se laisse pas toucher par le tableau affiché par l’accusée dans son récit des faits. Prenant ses réquisitions, il dira que l’accusée doit payer pour ses pratiques de sorcellerie. Des pratiques qui lui ont permis la manipulation des entités visibles et invisibles. La sorcellerie est bel et bien une réalité. La victime de sorcellerie est prise dans les nacelles non seulement du comportement rétrograde et inexplicable, mais également des problèmes pluriels tels que les maladies non décelées par la médecine moderne, les maladies chroniques, l’instabilité, les troubles divers.
Pour Ousmane Alédji, après avoir examiné le dossier et écouté l’accusée, il ne fait l’ombre d’aucun doute que tout le corps du délit est bel et bien constitué, et pour cela, il demande à la cour de condamner l’accusée Justine Gnimon à 10 ans de réclusion criminelle afin de rendre justice.
La défense représentée par Me Germain Adingni n’est pas de cet avis. Pour lui, il n’y a aucune preuve dans le dossier et même les témoins ne sont pas présents. Alors, poursuit-il, « qu’elle soit sorcière ou pas, aucun des témoins n’est présent pour soutenir devant le tribunal ce qu’ils déclaraient au cours de l’enquête ». Mieux, dira Me Adingni, on aurait pu aussi solliciter des experts de sorcellerie connus dans le pays pour confirmer ou pas la sorcellerie de dame Justine Gnimon.
Délibérant, le tribunal invoque les articles 360 à 363 du Code de procédure pénale pour acquitter au bénéfice du doute l’accusée qui s’était livrée à des pratiques de sorcellerie consistant à porter atteinte à la personne de Issa Etchlekoun et Louis Guy Alimagnidokpo en emprisonnant l’âme de Issa ainsi que la tête et les dents de Louis Guy dans une bouteille.


Les faits

Louis Guy Alimagnidokpo et Issa Etchlekoun se plaignent depuis quelques jours de multiples douleurs, ignorant l’origine réelle de leurs maux. Ils en étaient là, lorsque le 11 mai 2013, suite aux déclarations troublantes des jeunes garçons David Alimagnidokpo et Cédric Gbetable, la nommée Justine Gnimon, soupçonnée de sorcellerie, fut conduite et présentée à son neveu Louis Guy Alimagnidokpo comme étant auteur des maux dont il souffre. Ainsi, Justine Gnimon, David Alimagnidokpo et Cédric Gbetable furent confiés à la brigade territoriale d’Abomey.
Aussi bien à l’enquête préliminaire que devant le magistrat instructeur, Justine Gnimon n’a pas reconnu les faits à elle reprochés.
Par contre, David Alimagnidokpo et Cédric Gbetablé, tous deux âgés d’environ 12 ans, ont reconnu être des sorciers et révélé qu’ils appartiennent ensemble avec Justine Gnimon à un même groupe. Et pour corroborer leur thèse, chacun d’eux déclare respectivement ce qui suit :
Cédric Gbetable: « C’est dame Justine Gnimon qui capte les esprits. Elle appelle le nom des intéressés neuf fois et leur esprit vient vers elle et elle les met là où elle veut. C’est l’esprit de ceux qui nous embêtent ou ne veulent pas de notre bien qui est capturé et souvent embouteillé pour les faire souffrir avant de les tuer, mais on aime les faire souffrir plus.
On se rassemble à Djodji au carrefour Adandédjan et à Honmè. On est souvent très nombreux. Mais je fais partie des responsables, car j’ai beaucoup de puissances. J’ai fait au total trente-sept victimes en plus de ma tante, donc au total trente-huit.
Maman Justine Gnimon est notre cerveau. Elle a des puissances pour faire renverser les véhicules même les poids lourds. Mais elle n’est pas mon chef, car si elle me commande, je peux refuser. C’est le cas ici maintenant où tout est à nu et à la portée de tout le monde»
David Alimagnidokpo: « Le nommé Cédric Gbetable vient d’abord chez dame Justine Gnimon aux environs de deux heures du matin et comme nous sommes tous initiés, un oiseau apparaît et après un cri de reconnaissance, chacun se dirige vers son oiseau, nous tapons la tête de l’oiseau, il se calme, notre maman Justine Gnimon cherche la feuille d’usage et après les diverses invocations, chacun de nous incarne son oiseau et nous nous retrouvons sur les lieux des assises nocturnes. C’est ainsi qu’arrivés nous adoptons tous la position à genoux et nous saluons à tour de rôle Cédric Gbetable, et c’est lui qui répartit les diverses tâches à chaque sorcier présent sur les lieux. Je précise que ces diverses tâches sont liées aux travaux domestiques. A la fin de ces travaux, Cédric Gbetable ordonne que chaque sorcier saisisse une âme pour la viande. Après cette opération, Cédric Gbetable prononce des incantations sur chaque âme saisie qui se transforme en animal et que nous consommons. Après avoir fini, chaque oiseau retourne à la maison et l’âme reprend son corps.
Effectivement, le flacon comportait une poudre constituée de l’âme de mon père et du grand-frère. C’est parce que mon père a tenté de me bastonner que nous avons saisi son âme et c’est ainsi qu’il souffre des maux de tête. Pour les délivrer, il faut ouvrir le flacon et verser le contenu dans des latrines et tous les maux seront guéris »

Composition du tribunal

Président : Antoine Houézé
Assesseurs : Bienvenu
Anagonou, Alphonse Gbossou, Saliou Mohamed Obonou, Gédéon Adjiboyé
Ministère public : Ousmane Alédji
Greffier : Alain Ayikoué Kakpo





Par Valentin SOVIDE, AR/Zou-Collines,
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