L’ancien député Janvier Yahouédéou dénonce un nouveau scandale sous la gouvernance de Yayi Boni. Reçu hier dimanche 24 novembre 2013 sur l’émission « Cartes sur table » d’Océan Fm, il a fait remarquer que le contrat récemment conclu entre le gouvernement et la société Segub au Port de Cotonou est totalement dans l’illégalité. Au micro de Ricardo Kpèkou, il a promis de se battre contre ce contrat de gré à gré dans lequel plusieurs milliards de francs Cfa sont engagés. Lire l’intégralité de son intervention.
Océan Fm : Depuis quelques temps, à part vos publications dans la presse, on ne vous entend plus. Comment peut-on apprécier cette option que vous avez faite ?
Janvier Yahouédéou : Comme vous venez de le dire, il y a plusieurs manières de communiquer. Je peux réagir de différentes manières dans l’intérêt de la Nation. Comme exemple, lorsque Yayi Boni a déclenché sa dernière campagne pour la révision de la Constitution, mon parti politique, Réveil patriotique a réagi. C’est nous qui avons fait les derniers affichages « Touche pas à ma Constitution » avec un monsieur en pleurs, les bras sur la tête. J’ai aussi écrit pas mal d’articles.
Vous n’avez pas été réélu lors de la dernière législative. Et d’aucuns estiment que cette situation relève d’un règlement de compte. Vous confirmez ?
Ce que je peux dire, c’est que tout a été mis en œuvre pour que mon nom soit coincé quelque part. Ce que je peux vous dire, c’est que sur le terrain, j’ai eu suffisamment de voix. Et je pense qu’il y n’y a que les auteurs de l’organisation de ces élections qui pourront en rendre compte.
On vous a donc empêché de faire votre retour au Parlement.
De mille manières. Avant la campagne électorale, pendant la campagne et après la campagne. Je ne suis pas au Parlement, mais je continue de parler. Je sais que mon retour au Parlement devrait déranger.
Votre retour devrait déranger qui ?
Mon retour devrait déranger le gouvernement. Vous pouvez allez consulter les statistiques. Je fais partie des députés qui ont le plus écrit au gouvernement. Et je ne regrette pas d’avoir été Parlement parce que j’ai utilisé cet atout pour faire bouger les choses à l’Assemblée nationale et au gouvernement.
Concrètement, c’est le gouvernement qui vous a empêché de retourner au Parlement.
Je n’ai jamais dit cela.
Honorable Janvier Yahouédéou. Quelle analyse faîtes-vous des tiraillements observés autour de la correction de la Liste électorale permanente informatisée ?
Par respect pour les auditeurs et pour vous-même, je dirai un mot sur la Lépi. Tout simplement, j’ai été le premier, le seul à dire non au début de cette affaire-là. Si mes souvenirs sont exacts, c’était lors du congrès de l’Undp (le parti du président Zinsou) en février 2009 à Bohicon. J’étais à l’époque, mouvancier bon teint. Et je crois que c’est le jour-là qui a été le début de ma rupture avec Yayi Boni. Le jour-là, c’est le député Issa Salifou qui disait que Yayi Boni avait de coffre-fort à la maison et dans sa voiture. Et il demandait où il trouvait autant d’argent pour en distribuer à tout de bras. Il avait évoqué un scandale au niveau de l’escorte des véhicules d’occasion. Il a dit qu’il parlait sous le contrôle du député Janvier Yahouédéou qui avait combattu le président Mathieu et que ce qui se faisait était plus grave. On me donne la parole. Et c’est le jour-là que j’ai dit que « qui n’a pas fait l’enquête n’a pas droit à la parole ». J’avais promis de faire mes enquêtes et que si tout ce qui était dit s’avérait que je combattrais le régime de Yayi Boni jusque dans ses derniers retranchements. Et c’est ce mot de trop qui m’a valu la foudre de qui vous savez. Malheureusement pour moi, juste après ce congrès, j’ai voulu comprendre ce qui se passait réellement parce que j’avais la tête entre les guidons dans cette affaire de mouvance. Pour moi, Yayi Boni est l’homme que je devrais soutenir et défendre même si je devrais mourir dans ce combat-là. Alors lorsqu’on me dit que ce monsieur était à l’origine de plusieurs scandales, vous comprenez que je devrais être déçu. Le jour-là même, on m’a posé des questions sur la Lépi puisque moi-même je suis informaticien. J’avais donné mes avis techniques. Et j’ai trouvé qu’on ne pouvait réaliser une bonne Lépi pour 2011. Et j’ai expliqué. A l’époque, je trouvais qu’il y avait un problème de délai. La Lépi, c’est un outil technique. Et d’après le plan que les gens définissaient, ils voulaient confier la gestion de cet outil à l’Assemblée nationale, c’est-à-dire aux politiques. Or, on ne peut pas confier aux politiques quelque chose qui devrait leur permettre à s’élire. Ils vont forcément tirer le drap de leur côté. Ça ne pouvait pas être sincère. J’avais également évoqué le problème de la capacité des Béninois à faire le travail. J’avais également dit pour toute chose, il fallait voir la période. En toute chose, il fallait voir comment on devrait prendre une décision pour l’assumer pleinement. Le président Yayi Boni qui s’apprête à se faire réélire ne peut pas être au pouvoir et qu’on décide à mettre en place un outil du genre sans qu’il ne cherche à tirer le drap de son côté. Je n’ai pas dit que c’est ce qu’il a fait. Mais je dis que c’est humain et il faut savoir quand lancer cet outil pour que cela soit crédible. Ensuite, il y avait le problème de l’état civil. C’était le problème le plus important. La sincérité de toute la procédure a comme base, je dirai, l’état civil. Est-ce que ceux qui sont recensés sont réels ? Est-ce qu’ils ne sont pas fictifs ? Je pense que Yayi Boni avait compris la chose à son arrivée au pouvoir. Il a lancé le Ravec. Et on avait investi des milliards. Est-ce qu’il y a un Béninois qui peut dire aujourd’hui là où on en est avec le Ravec ? Après avoir englouti des milliards dans cette histoire, ça a disparu. On n’en parle plus. Or le Ravec était une initiative qui devrait permettre à tous les Béninois d’avoir des actes de naissance. A partir du moment où nous avons des Béninois qui ont des actes de naissance, nous pourrons faire des codifications sincères. Lorsque vous allez dans les pays développés, je prends le cas de la France, chaque citoyen a un numéro. Ce qui fait que vous êtes sûrs de ne pas avoir des citoyens portant le même numéro. Ainsi, on évite le double vote des citoyens lors des élections. Pour faire une bonne Lépi, il faut aller à la base des problèmes. J’avais expliqué tous les problèmes. J’ai pris mon bateau de pèlerin et fait les états-majors de la mouvance comme de l’opposition pour dire de façon sincère ce qu’il fallait faire. J’ai demandé à ce qu’on associe plus les techniciens que les politiques. Même si le processus doit être coordonné par les politiques, il faut des techniciens. J’avais expliqué tout cela. Les techniciens européens qui ont conçu la Lépi, ont prévu 12 mois. Nous, nous l’avons en moins de trois mois. Alors comment voulez-vous que ça donne ?
Aujourd’hui, on parle du Cos-Lépi. Qu’est ce que vous en pensez ?
C’est encore un outil voué à l’échec. Je vous le dis de façon sincère. Vous allez gaspiller encore les milliards des Béninois. Ils vont empocher des milliards pour donner un outil qui aura du mal à être accepté.
La Lépi selon vous est voué à l’échec.
Tant que vous n’allez pas faire les choses dans les normes, vous ne pouvez qu’échouer. Et il vaut mieux fermer tranquillement cette page de Cos-Lépi et repartir sur de bons principes.
Quels sont ces principes-là ?
C’est ce que je viens de vous expliquer. Il faut régler d’abord le problème de l’état civil. Forcément, il faut le faire. Pour contourner, les gens nous parlent de biométrie. Vous avez vu le désordre que nous avons connu où des millions de Béninois n’ont pas pu être recensés. Avec ce que j’avais posé comme problèmes, est-ce qu’on avait le droit de prendre mes empreintes digitales dans une machine ? Dans les pays développés, c’est les hommes recherchés par la police qui ont leurs empreintes dans les ordinateurs. Ils n’ont pas à prendre mes empreintes digitales dans les ordinateurs. Cela fait partie des problèmes de fond. Mes empreintes digitales peuvent être utilisées dans mon entreprise, dans une structure bien limitée. On le fait pour la sécurité. Et ce sont des terminaux biométriques qui utilisent les empreintes digitales et ça ne ressort pas. Mais ici, les empreintes vont dans un ordinateur. Et même si on vous dit que c’est pour être utilisé pour faciliter le déboulonnage, les empreintes resteront quand même dans un ordinateur. C’est inacceptable. Et j’avais dit qu’il vaut mieux, au lieu de chercher à faire des gymnastiques incroyables, aller vers les bons principes.
De toutes les façons, des dépenses ont déjà été engagées. Est-ce qu’il n’existe pas aujourd’hui un risque de couplage des communales et des législatives en 2015 ?
Yayi Boni qui est au pouvoir a été élu alors qu’il n’a avait personne au Parlement. Il a été élu alors que Houngbédji et consorts qui avaient des gens à l’Assemblée nationale ont échoué. Cela veut dire que le système n’était pas si mauvais que ça. On a qu’à faire une liste comme on en a l’habitude. Une liste qu’on peut améliorer en faisant une liste informatisée simple. Et on pourra aller aux élections dans trois ou six mois. Si les politiques ont la volonté, on peut aller aux élections. Quand on va finir avec cela, on prend le temps qu’il faut pour faire une bonne Lépi.
L’autre sujet qui défraie actuellement la chronique, c’est la révision de la Constitution. Votre position sur le sujet, on la connaît, c’est non. Pourquoi cette position radicale ?
J’ai été mordu une fois. Et vous voulez qu’avec les yeux ouverts, qu’on me morde à nouveau ? Non. Et quand je dis je, c’est les Béninois. Le peuple béninois a été mordu plusieurs fois. Et je dis que ce n’est pas prudent d’accepter ce projet là. Et dans notre Bénin c’est la première fois qu’on a vu un candidat à la présidentielle passer KO.
Il a fait une bonne campagne.
Mais le résultat, c’est que tout le monde reconnaît que l’outil qui a servi à son élection est mauvais. Et sous son règne, tout ce qu’il a touché a créé des histoires. C’est avec cette Constitution que le président Soglo a dirigé le Bénin avec brio. C’est avec cette Constitution que Mathieu Kérékou quand bien même je le critiquais, a géré ce pays. On ne peut pas toucher à une virgule de la Constitution tant que Yayi Boni est au pouvoir. On ne doit pas le faire. Après son départ, on pourra le faire.
C’est la personne de Yayi Boni qui vous gêne ?
Je vous dis qu’il ne faut pas prendre le risque de toucher à la Constitution à la fin du deuxième et dernier mandat d’un président. Il n’est pas le premier. On a vécu le cas au Sénégal où des gens ont même juré sur le Coran. Lorsque les gens vont commencer par marcher depuis Dantokpa jusqu’à la présidence pour prier le président Yayi Boni de ne pas s’en aller, il sera bien obligé de le faire par pitié pour le peuple béninois. Et le peuple étant souverain, la volonté populaire va l’obliger à se représenter. Ce ne sera pas sa faute.
Et pourtant le président Yayi Boni a donné certaines assurances et puis il compte apporter des innovations à la loi fondamentale de notre pays.
Il faut oublier ces propositions. Il n’y a rien dedans. Il faut à tout prix empêcher Yayi Boni de toucher à notre Constitution. De toutes les façons, à mon avis, il ne peut plus. Certains députés sont en train de se battre pour qu’il n’ait pas la majorité. Je pense même qu’à la date d’aujourd’hui, il ne peut plus. Maintenant, il faut être vigilant pour empêcher Yayi Boni de toucher à une virgule de notre Constitution.
A deux ans de la fin du mandat de Yayi Boni, comment trouvez-vous sa gouvernance ?
C’est la gouvernance la plus catastrophique qu’on puisse avoir dans un Etat. A l’époque, le président Adrien Houngbédji n’avait rien vu avant de qualifier le régime de Yayi Boni de gouvernement ventilateur. Là, c’est pire que ventilateur. Et puis j’espère que le président Yayi Boni a conscience qu’un jour il va répondre de sa gouvernance. Imaginez-vous que rien qu’en 2010, la propagande gouvernementale a coûté 1,5 milliards pour le fameux comité de supervision dirigé par Koupaki à l’époque. Il y avait en plus 450 millions répartis dans les cellules de communication des ministères. Cela veut dire que 2 milliards de nos francs ont été utilisés pour la propagande gouvernementale. Et là, c’est sur la base du relevé du Conseil des ministres du 21 avril 2010. Et lorsqu’on vous dit que c’est un docteur en Economie qui fait une telle gestion, est-ce que c’est acceptable ? Pour moi, ce n’est pas acceptable. Vous aviez bien vu tous les cas de corruption à grande échelle. L’affaire Cen-Sad. Vous voyez la gravité de cette affaire, il dit qu’il n’en sait rien. Il ne dirige pas. De toutes les façons, les ministres ont été convoqués, nous a-t-on dit. On en saura donc plus. J’espère bien qu’on va avancer et que le dossier ne sera pas bloqué puisque depuis un certain temps, on n’entend plus rien. Les ministres vont parler. Lawani a sorti son mémorandum. Il faut le lire un peu. Les gens vont parler. C’est pour ça qu’il faut que le dossier ne soit pas bloqué. Nous allons voir. L’affaire Ocbn. Es-ce qu’on nous a fait le point de l’affaire avec Samuel Dossou ? J’avais crié haut et fort. J’avais décrié cette affaire quand on a confié cette affaire en marché gré à gré à Samuel Dossou. A l’époque, il paraît que ça se passait très bien entre eux. Figurez-vous, on a nous dit en 2005 et 2008, on avait lancé un appel d’offres international pour la concession de l’Ocbn. Appel d’offres infructueux. Après ça, l’Etat a engagé près de 10 milliards sous forme de subvention à l’Ocbn. Après 10 milliards investis, le 19 octobre 2009, le Bénin investit encore 5 milliards pour acheter 6 locomotives. De vieux trucs qu’on repeint et qu’on achète à plus de 5 milliards. A l’époque, j’avais combattu ce dossier parce que je dis que les rails qu’on veut utiliser ne sont pas en bon état. Il fallait revoir complètement ce dossier et faire de gros investissements pour le chemin de fer au Bénin.
Après près de 20 milliards engloutis dans l’Ocbn, on apprend par la suite qu’un contrat de gré à gré aurait été signé avec Samuel Dossou. Si vous saviez que Samuel Dossou allait prendre la société, il ne fallait pas investir autant d’argent. Curieusement, lorsqu’on regarde les dates à l’époque, je nous ai dit que le 19 octobre 2009, le Bénin signe un accord de prêt. Le 28 décembre 2009, l’Assemblée nationale autorise la ratification. 45 jours plus tard, l’opinion publique est informée de l’existence d’un contrat de gré à gré en date de 29 janvier 2008. Cela veut que le contrat était en cours de signature et on éjectait encore de l’argent dans l’Ocbn. Bref, le dossier avec Samuel Dossou était inacceptable. Aujourd’hui, on confie encore cette affaire au groupe Bolloré. Dans quelles conditions ? A l’époque, il y avait un projet. Enfin, le Niger avait découvert un gros gisement d’uranium. Je crois : le deuxième le plus gros au plan mondial. Areva, spécialiste du nucléaire en Europe voulait transporter l’uranium par le Bénin. Ce n’est pas parce que quelqu’un veut investir qu’il faut brader l’Ocbn. Après l’Ocbn, Yayi Boni et Samuel Dossou, voilà Bolloré qui est tombé dedans. Avec ça, on va où ? Je pense qu’il y a un problème de fond.
L’affaire Sodéco. Qu’en pensez-vous ?
Est-ce qu’on a besoin de faire l’économie à l’université avant de comprendre qu’il y a un problème. Aujourd’hui, le contrat Sodéco a été unilatéralement suspendu. Pour rompre ce contrat, l’Etat doit utiliser les démarches connues du dernier des Béninois. Comme je dis, c’est évident qu’il y a un problème. J’ai écouté le ministre Abiola. Il dit qu’on va reprendre les répartitions des parts. Avant d’en arriver là, il y a quand même une procédure qu’il faut suivre. Dans le dernier communiqué du conseil des ministres, on dit que des instructions ont été données aux ministres de la Défense et de l’Intérieur pour assurer la sécurité des usines de la Sodéco. Cela veut dire que les gens ont conscience qu’il y a un problème. On n’a pas besoin de diriger un pays avec autant de forces. Quand même ! Le Général Mathieu Kérékou était militaire au deuxième passage. Et pourtant, on n’a pas vu ça. A cause de Talon, on envoie des militaires partout. Les gens oublient qu’ils vont quitter le Pouvoir un jour. Ce n’est pas normal. Je pense que le problème de Yayi Boni est son entourage. Il est entouré de conseillers qui ont peur d’être chassés. Moi, je me rappelle qu’un jour, j’étais à l’Assemblée nationale, le Président m’a appelé. Il dit : « Honorable, tu es où ? » Je dis : « Président, je suis à l’Assemblée nationale ». Il dit : « Viens me voir tout de suite. ». Je vais à la Présidence. Il me dit : « Tu as appris qu’ils ont été à la télé. Ils ont dit ça, ils ont dit ça. Il faut que tu ailles à la télé pour dire que c’est faux… ». Pendant 15 minutes, je l’ai laissé dire tout. Je lui dis : « Monsieur le Président, je n’irai pas à la télé… ». Il dit : « quoi ? ». Je lui dis : « Nous sommes dans la semaine de la Cen-Sad. Les étrangers seront dans le pays. Si moi je parle, les autres aussi vont réagir. Ce serait dans cette ambiance de ping-pong que les étrangers vont entrer dans notre pays. Ce n’est pas bon pour notre pays… ». Il dit : « Ah ! Ah ! Tu as raison. On ne va pas à la télé. Tu as raison. On ne va pas à la télé… ». Lorsque je me prépare à m’en aller, il se retourne et dit : « Honorable, ne va pas à la télé, hein ! ». Je vous dis que le Président Yayi Boni est un homme qui sait écouter les conseils. Il n’a pas de bons conseillers. Lorsque vous lui expliquez que sa décision est mauvaise, il fait demi-tour. Lorsque vous êtes conseiller d’un Chef d’Etat, vous devez pouvoir vous dire que je peux m’en aller à tout instant.
Honorable, il y a les affaires machines agricoles, avion présidentiel. On se souvient que vous aviez suivi particulièrement l’affaire machines agricoles. Où en est-on ?
Vous avez vu ce qui s’est passé. Certains protagonistes de cette affaire se sont retrouvés à l’Assemblée nationale pour bénéficier de l’immunité parlementaire. Vous savez bien qu’un homme d’affaires est là pour faire du business et tirer maximum de profits. Il revient à l’Etat de protéger ses intérêts..
Il y a aussi l’affaire de construction du siège de l’Assemblée nationale.
Sous le président Kérékou qui est un militaire, je ne dis pas que les militaires ne savent pas gérer, on n’a pas vu des choses du genre. On a perdu tellement d’argent. Ces milliards-là, on aurait pu les utiliser pour la construction de la route Cotonou-Bohicon. C’est la route qui dessert l’Hinterland. Elle va nous permettre de gagner d’argent. On n’utilise pas l’argent pour faire des choses sérieuses. On va gaspiller des dizaines de milliards dans un bas-fond. A l’époque, les députés avaient invité le ministre Noudégbessi poser des questions pour un certain nombre de questions parce que ce n’était pas faisable. On lui a dit qu’il fallait changer de site. Il nous a dit non. C’est grave ce qui se passe. Lorsque vous faîtes le point des milliards avec machines agricoles, Icc services, Cen-Sad, le gaspillage dans tous les sens, je dis ça fait beaucoup pour le Président Yayi Boni. Je crains un autre scandale qui est en train de prendre corps, c’est le dossier Segub. J’ai lu le conseil des ministres des 16 et 17 novembre qui parle d’un contrat avec Segub pour la certification des valeurs en douane, sans appel d’offres. J’ai le sentiment que c’est pour camoufler l’illégalité de cette procédure que le conseil des ministres utilise le terme de partenariat parce que la certification des valeurs en douane dont ils parlent n’est rien d’autre que la vérification avant embarquement. Ce n’est rien d’autre que le Programme de vérification des importations (Pvi). Le Pvi devenu Pvi nouvelle génération. Le Pvi nouvelle génération c’est quoi ? Ce n’est que la vérification avant embarquement et on a rajouté le scanning et le tracking. La vérification avant embarquement a démarré en 1992 avec Cotecna après un appel d’offres international sous le Président Soglo. En 1997, il y a eu le bureau Veritas. Les choses allaient encore bien. En 2011, il y a eu un appel d’offres encore et c’est Benin control Sa qui a gagné et on a ajouté le tracking. Mais là avec ce que j’entends, je suis en train de comprendre qu’on est en train de confier ce qui a été toujours fait par appel d’offres international, on est en train de confier cela de gré à gré à une société Segub. C’est illégal et cela risque de constituer un énième scandale sous le régime du Président Yayi Boni. Un scandale comme cela, l’homme de rue, le citoyen lambda peut se dire que cela c’est sur fond de corruption. Comment on peut confier un dossier de milliards à une société sans appel d’offres. Au nom de quoi ? De toutes les façons, Yayi Boni tôt où tard devra répondre de ses actes. Cette affaire de Segub, je me battrai contre et le Président Yayi Boni sait à quel point je sais me battre. Je me battrai contre parce que là, c’est extrêmement grave.
Vous faites un bilan sombre du passage de Boni Yayi mais est-ce que quelque part vous n’êtes pas comptable ?
Je reconnais que je suis comptable parce que j’ai cru en lui. Je fais partie de ceux qui l’ont fait venir pendant les premières heures puisque moi-même j’ai été candidat en 2006. Au second tour, j’avais le choix entre Houngbédji et Yayi Boni. Si le sang devrait parler, c’étais évident que c’est pour Houngbédji que j’allais demander à voter. Malheureusement, le contexte était tel que j’avais critiqué le Président Mathieu Kérékou pendant dix ans et j’ai estimé qu’il fallait vider la vielle classe politique et faire venir une nouvelle génération d’hommes. Mais malheureusement pour Houngbédji, j’avais estimé qu’il faisait partie de la vielle classe politique et en face de lui un homme que je ne connaissais pas du tout, mais qui avait l’air bien sur papier. Et comme tous les Béninois, j’ai estimé qu’il allait faire l’affaire. Mais il a fait pire que tous les Présidents béninois que nous avions connus. La dernière fois quand le Président Kérékou avait perdu son fils, on a retrouvé tous ses anciens amis. Mêmes tous ceux qu’il avait enlevés étaient venus le soutenir. Mais sous Yayi Boni, vous voyez ce qui se passe ? Les gens quittent son gouvernement et deviennent son adversaire. Vous ne voyez pas qu’il y a un problème ? Il faut qu’il revoie sa copie. C’est ce que je retiens sur le plan de la gestion des hommes. Sur le plan de gestion de l’économie, vous voyez ce que cela donne. C’est plus que catastrophique. Vous avez vu son fameux échangeur de Godomey ? Vous avez vu que les matériaux se cassent déjà ? Ce n’est pas que ce sont les véhicules qui les cassent, c’est le soleil. Et cela n’a pas encore fait deux ans. Vraiment qu’est-ce que Yayi Boni a fait de bien ? Le passage supérieur de Notre dame. Voilà. D’ailleurs lorsque vous montez là-dessus, en descendant vers l’église Notre Dame, si vous n’avez pas des freins en état, vous risquez de faire assez de victimes. Mais est-ce que cela fait leur souci ? Rendez-vous les soirs vers ce pont. Combien de gens l’empruntent ? Ils passent en bas. Cela veut dire que le projet n’a pas été bien conçu. On ne peut pas tout faire dans la précipitation. Gaspillage. Allez voir la piste de l’aéroport. Dites à ceux qui ont voyagé récemment. Les avions, lorsqu’ils atterrissent, vous constatez que la piste est déjà foutue. Ces pistes là, refaites à plusieurs milliards, c’est l’héritage Cen-sad. Qu’est-ce qu’on a fait et on a pris la peine de bien faire ? Donc bref, je suis comptable de tout cela. C’est dommage qu’on ait commis une telle bêtise. Je regrette.
Vous êtes Président d’un parti politique. Un parti dans lequel on ne voit que vous.
Non je ne se suis pas seul dans le parti. Lorsque votre parti est dans l’opposition, les premiers à vous quitter, ce sont les cadres. Nos cadres, quand ils entrent dans les partis politiques, ce qui les intéresse en premier, ce sont les nominations. Ils ne sont pas là pour le combat politique. Quand le responsable politique d’un parti est dans l’opposition, les premiers qui partent ce sont les cadres. Mais heureusement, il y en a encore des combattants dans Réveil patriotique. Je vous ai dit qu’on a pris des initiatives telles que ‘’Touche pas ma Constitution’’, des gens ont cotisé pour démarcher des sponsors pour qu’on nous aide. Donc, c’est tout une équipe qui travaille. Je n’ose pas les citer parce que vous savez qu’on n’est pas en démocratie et qu’il suffit qu’on cite un nom et le cadre en question perd son poste le lendemain.
Quelles sont vos prochaines actions
Nous irons aux élections communales, législatives. Pour les présidentielles, il se pourrait que je sois candidat. De toute façon, nous avions commencé ce combat politique depuis longtemps. Nous l’avions commencé avec le Président Soglo. En 1996, j’étais avec le Président Amoussou à l’époque et on fait le combat ensemble. En 2001, on a tout fait pour déboulonner Mathieu Kérékou mais on n’a pas réussi. En 2006, j’étais candidat. Le camp que j’ai soutenu a gagné mais vous voyez ce que cela a donné. De toutes les façons, tant que nous vivons, nous devons garder espoir. La politique est toujours comme cela. On fait des choix, des fois on choisit mal.
Honorable Yahouédéou, dîtes-nous un mot sur la division des frères d’Agonlin, Aké Natondé, Lambert Koty, Roger Dovonou et vous ?
Qu’est ce qui me concerne encore ? C’est une bagarre entre des gens qui ont été ministres ou des gens qui se battent pour être ministres. Il faut que les choses soient claires. J’ai déjà dit en 2010 à Ouinhi. Yayi Boni était debout, le peuple de Ouinhi était debout. J’ai dit que je n’ai aucunement envie d’être ministre sous le régime de Yayi Boni. Je dis que Yayi Boni est à cent pour cent responsable dans ce qui se passe avec mes frères. Parce qu’il ne peut pas vouloir remplacer Roger Diovonou et aller prendre quelqu’un de la manière dont cela s’est passé. On finit avec Roger Dovonou, on nomme Lambert Koty. Spécialiste des Tp (Travaux publics, Ndlr) nommé ministre aux Tp. Natondé et Koty ne s’entendent pas du tout. Et pour enlever Koty, spécialiste des Tp, on le remplace par un monsieur qui ne connaît rien de la route, son pire adversaire dans sa zone. C’est pour cela que je dis que Yayi Boni est responsable, il ne peut pas faire cela. En terme éthique, ce n’est pas bien.
Transcription :
H. Alladayè, A. Sassé, J.Y Maoussi.