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Edito: Une croissance inattendue

Publié le lundi 6 janvier 2020  |  L`événement Précis
Monsieur
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Monsieur Patrice TALON, Président de la République, Chef de l`État, Chef du Gouvernement lors de son message sur l`état de la nation
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L’économie béninoise a enregistré une croissance de 7,6% en 2019. Ce chiffre rendu public par le ministère des finances montre une nette amélioration par rapport à 2018 qui avait connu une croissance de 6,70% sur l’année 2017. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il s’agit d’une surprise remarquable.
Ce n’est pas tant le bond mais son ampleur qui tranche avec les prévisions du FMI. Le Fonds Monétaire International avait prévu en septembre une croissance d’environ 6,9% tandis que le gouvernement lui-même projetait 8% environ. Les prévisions du FMI ont été dépassées, même si les ambitions du gouvernement n’ont pas été atteintes. Pour autant, il faut reconnaître qu’il s’agit d’un élan d’autant plus exceptionnel qu’il intervient en période de fermeture des frontières.
Je me rappelle qu’en novembre dernier, dans l’une de ses correspondances qui laissent sans voix, Tundé Fa Tundé avait affirmé sur RFI que les Béninois ne mangeaient désormais qu’un repas par jour et difficilement encore, du fait de la fermeture des frontières. Il indiquait alors que les marchés étaient vides et que bientôt nous, Béninois, finirions par nous plier aux injonctions du puissant voisin de l’Est. Non seulement ses sombres prévisions ne se sont pas réalisées, mais plus encore, dire que les Béninois ne prenaient qu’un repas par jour, c’est oublier que le Bénin est un pays, et pas un Etat du Nigéria. Oui, il a pu exister une politique par le passé, tendant à faire passer notre pays pour le 37ème Etat du vaste Nigeria. Ce qui peut sembler curieux, c’est que ces ambitions provenaient justement des autorités que nous payions pour défendre notre pays contre les ambitions hégémoniques naturelles d’une grande puissance comme le Nigeria. 37ème Etat du Nigeria… Mais alors, on ne se demande jamais pourquoi le Tchad, le Cameroun ou encore le Nigeria qui ont pourtant des frontières tout aussi longues avec le Nigeria, n’avaient jamais cette rhétorique. Nous ne sommes pas plus dépendants du Nigeria que les autres. Et le Nigeria est en train d’apprendre que les intentions de base qui l’avaient amené à fermer ses frontières, ne se réaliseront pas. Ils n’asphyxieront pas le Bénin. Bien entendu, les populations frontalières habituées à la contrebande souffrent. Les hommes d’affaires ayant des clients au Nigeria ont d’énormes difficultés. Plus encore, les opérateurs économiques et une bonne partie des commerçantes de nos marchés dont la prospérité est liée à l’afflux de leurs homologues nigérians, sont en détresse. Mais ils ne constituent qu’une infime minorité de la grande masse des Béninois. Le travail de l’exécutif doit s’orienter vers la recherche d’une solution durable qui nous épargne les caprices de ce grand voisin aux intentions encore floues.
Mais cette résilience indique qu’il y a un travail de fond qui a permis à l’économie béninoise de résister à ce choc extérieur. Ce travail de fond est dans la montée en flèche de la fiscalité intérieure. La Direction générale des impôts (DGI) affirme avoir encaissé en 2019 environ 530 milliards de FCFA, tandis que la douane a pu recouvrer 384,78 milliards dans la même période. Autrement dit, la fiscalité de porte qui a fait du port le poumon économique du Bénin, est désormais dépassée par la fiscalité intérieure. C’est une évolution majeure de l’économie béninoise qui change ainsi de paradigme.
Jusqu’à présent en effet, nous avons toujours considéré que le Bénin est un Etat entrepôt (pour parler comme John Igué) dont les ressources budgétaires dépendent essentiellement des activités portuaires. D’où l’attention constante dont le port a toujours fait l’objet. Mais on ne construit pas une économie sur le commerce et la contrebande, mais sur la production. Au regard du budget 2020, ce virage devient irréversible et promet de renflouer davantage les caisses de l’Etat. L’économie béninoise n’est plus construite sur la contrebande vers le Nigeria.
Même si la croissance est forte, elle pose toujours la question de son caractère inclusif. En d’autres termes, en quoi impacte-t-elle le quotidien du citoyen ordinaire ? L’éternelle question qui doit renvoyer aux chiffres de l’emploi, au panier de la ménagère, à l’inflation, à la possibilité pour le citoyen lambda de percevoir les fruits de la croissance. Sur ce chapitre, du moins, il y a encore à faire.

Par Olivier ALLOCHEME
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