La question de l’intégration de l’éducation à la santé sexuelle dans les curricula de formation reste un défi. Pour certains, c’est une incitation voilée à la débauche mais pour les pionniers de cette innovation, c’est un moyen efficace d’informer les jeunes, de les outiller afin qu’ils puissent mieux décider.
L’éducation à la santé sexuelle peut-elle aider la jeunesse à mieux préparer son avenir ? Pour Siaka Coulibaly, coordonnateur résident du Système des Nations Unies au Bénin, une bonne éducation sur les questions de droit et surtout de santé sexuelle est gage de maintien et de réussite scolaire. Lors d’un symposium sur l’éducation à la santé sexuelle à l’ère du numérique, organisé par le Fonds des Nations Unies pour la population, il a salué le Bénin pour le programme d’éducation sexuelle intégré dans les curricula de formation. A l’en croire, les grossesses en milieu scolaire sont passées de 3000 pour l’année académique 2016-2017 à 980 pour l’année académique 2018-2019. Une amélioration de la situation qui est le résultat des actions de tous les acteurs notamment la société civile, les leaders religieux, les directeurs d’écoles, les partenaires techniques et financiers, l’Etat…Et pourtant, parler de sexe aux jeunes et adolescents est culturellement mal perçu. Il y a comme une peur d’aborder le sujet. Les parents font semblant de ne pas voir leurs enfants grandir et ces derniers n’osent pas se confier.
Dans sa présentation sur l’enjeu de l’éducation à la santé sexuelle à l’ère du numérique, le professeur Dodji Amouzounvi, directeur du Laboratoire d’analyse et de recherches, religions, espace et développement (Larres), relève que le sexe est vu comme un sujet tabou que les parents évitent d’aborder avec leurs enfants.
attention aux subtituts
Mais la rue se substitue aux parents et éducateurs en assurant, de façon indélicate et dangereuse, l’information à l’éducation sexuelle… L’internet vient aggraver cette information précoce et biaisée. En effet, ce que les parents refusent de faire, c’est finalement la rue et Internet qui le font, et le font mal. Conséquence, les jeunes sont pris dans un ouragan pervers, sans orientation. «Dans ce contexte, seule une communication responsable et adaptée aux jeunes et à leurs réalités viendra à bout des dérives. Et le numérique peut jouer un rôle important dans cette nouvelle stratégie de communication», affirme le professeur Dodji Amouzounvi. Selon lui, il faudra entre autres, sensibiliser les jeunes au développement de comportements bons et légaux; amener les adultes à comprendre le langage des jeunes et réduire le discours hypocrite… « Les jeunes doivent également comprendre que pour aller au sexe, il faut être prêt dans la tête, dans le cœur mais aussi dans la poche», ajoute-t-il.
Parlant de l’éducation à la santé sexuelle, Eléonore Ladékan Yayi, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, soutient : « Il faut favoriser une mise en œuvre de l’éducation à la santé sexuelle de manière interdisciplinaire et adaptée à l’âge…Il faut donner aux jeunes une éducation à la santé reproductive efficace mais aussi responsable…Dans cette perspective, le numérique peut aider à accélérer les résultats». Si l’information peut aider à la prise de décision chez les jeunes, il serait tout de même irréaliste de négliger les revers de cette initiative qui, si l’on n’y prend garde, peut tourner au vinaigre. Le risque d’aiguiser l’appétit pervers de certains jeunes est bien possible. La réflexion doit se poursuivre et viser le suivi-évaluation de l’éducation donnée. Le Conseil national de l’Education qui vient d’être installé, aura certainement à se pencher sur la pertinence de cette approche.